« L’ART DE MANGER
RITES ET TRADITIONS »
Exposition du Musée Dapper
J’écrirais volontiers, et comme à l’habitude, une exposition remarquable dans sa présentation et dans son contenu sur l’art de manger qui était pratiqué dans les sociétés traditionnelles de l’Océanie et de l’Afrique.
La plaquette de présentation de cette exposition explique :
« La thématique de cette exposition s’attache à mettre en lumière des traditions, des savoirs et des actes qui se vivent au quotidien ou de façon exceptionnelle, lors de cérémonies et de rituels. Ainsi les aliments liquides ou solides, de même que les préparatifs liés à leur absorption ou les offrandes faites aux ancêtres, aux divinités et aux esprits, sont-ils indissociables d’objets particuliers dont les formes et les matériaux sont extrêmement divers. »
Comment ne pas être saisi par la beauté de tous ces objets, mais aussi, et peut-être plus encore, de toutes les figures sculptées qui ornent le parcours de l’exposition ?
Comment également ne pas prendre conscience que toute la panoplie de l’art de manger qui est proposée baigne presque toujours dans une sorte de monde magique de créatures de l’au-delà, tout en notant que beaucoup de ces objets appartenaient naturellement et le plus souvent aux chefs, aux nobles, aux membres des castes supérieures ?
La même plaquette fait d’ailleurs preuve d’un certain courage pour enfreindre un des « tabous » que des groupes de pression politiques ou intellectuels font peser sur l’histoire de ces pays, je cite :
« Il est une nourriture à laquelle seuls des individus initiés ou aguerris peuvent avoir accès. Dans plusieurs cultures océaniennes, la consommation de chair humaine apparait comme un privilège distinguant des personnes ou des groupes particuliers qui incorporent la force vitale d’autrui : un ancêtre, un esclave ou un ennemi. Des objets extrêmement divers sont liés aux rituels d’anthropophagie organisés à des moments de la vie des individus. Dans les îles Salomon (Mélanésie) où se pratiquait la chasse aux têtes, les guerriers qui partaient en expédition ornaient l’avant de leurs longues pirogues d’une figure de proue représentant un esprit protecteur. Le musu musu tenait souvent entre ses mains une petite tête coupée »
La lecture des premiers récits d’explorateurs, d’officiers, et d’administrateurs apporte la preuve que ce type de pratique, religieuse ou non, existait aussi dans un certain nombre de peuples d’Afrique, à la fin du dix-neuvième siècle.
Jean Pierre Renaud