« Le fer à repasser » postcolonial ? Pourquoi pas?

Les mystères de l’histoire postcoloniale : « Le fer à repasser ou « l’inconscient collectif » colonial, dans le journal la Croix du 22 décembre 2015

            Au cours des années passées, j’avais constaté, avec une certaine curiosité et surprise, que des historiennes, tout à la fois coloniales et postcoloniales, plutôt connues dans leur monde savant, proposaient à leurs lecteurs de découvrir qu’une des clés de la compréhension d’une histoire coloniale, qui intéressait peu de monde, était l’existence d’un « inconscient collectif », colonial, qui logeait clandestinement dans les profondeurs de la conscience des Français et des Françaises.

           Dans  les livres qu’ils ont publiés, les chercheurs du collectif Blanchard ont, également, et à maintes occasions, fait appel à cet « outil » historique de nature magique pour convaincre le lecteur que la France, tout au long de la période coloniale, a été imprégnée, sans en avoir conscience, de l’idéologie coloniale, une véritable immersion dans le fameux « bain colonial ».

            Pourquoi ne pas rapprocher ce « bain colonial » du bain des reines de Madagascar, le fandroana, à l’issue duquel le bon peuple de la Grande Ile, était aspergé par l’eau lustrale de ce bain royal ?

            Il est superflu de rappeler aussi que l’historien Stora s’inscrit dans ce courant de pensée de la psy-histoire.

        Je désespérais d’avoir un jour la divine surprise, pour ne pas dire magique,  c’est-à-dire la preuve que cet inconscient collectif existait bien. 

        Eureka ! La lecture d’un des billets d’Alain Rémond, publié dans le journal la Croix, du 22 décembre dernier, intitulé « Le fer à repasser » m’a évidemment rassuré, sauf à indiquer que son auteur ne m’a pas encore communiqué les références de sa source, si ce sondage a été effectivement effectué.

         Il conviendrait de citer en entier le contenu de ce billet spirituel, mais je me contenterai de quelques citations :

         « C’est un chiffre qui donne le vertige. 23,8% des Français redoutent d’avoir un fer à repasser à Noël, selon un sondage tout ce qu’il y a de plus sérieux…. D’où vient cette peur irrationnelle du fer à repasser à Noël, qui depuis des siècles et des siècles, traumatise l’inconscient collectif des Français ? La peur du fer à repasser à Noël durera-t-elle jusqu’à la fin des temps, comme quoi le ciel et la terre  passeront, le fer à repasser ne passera pas ? Je pose juste la question. »

         Grâce au fer à repasser, faux plis et mauvais plis coloniaux ou postcoloniaux, ont donc du souci à se faire !!!

         L’occasion m’est donc donnée de publier le chapitre 9 du livre « Supercherie coloniale », intitulé « Le ça colonial ! L’inconscient collectif !… », afin d’apporter ma modeste contribution à ce débat digne des théosophies les plus  obscures.

        Il s’agit du livre que j’ai pris la peine de publier moi-même en 2008, compte tenu, entre autres, du refus très poli d’un grand éditeur de la place, féru d’histoire, lequel, en toute conscience, s’interdisait de mêler sa voix à l’agitation historique ou mémorielle, au choix, qui agitait la petite planète des chercheurs postcoloniaux.

        Compte tenu du nombre des visites qui ont fréquenté mon blog en 2015, plus de 3.400, pourquoi ne pas ouvrir la nouvelle année par cette première publication, la deuxième (une réédition), étant consacrée à la « mémoire collective » tout aussi introuvable dans les sondages de toute nature et de tout acabit qui tombent chaque jour sur nos tables, comme les balles à Gravelotte.

        En ce qui concerne « la guerre des mémoires » qui ravagerait notre pays, et qui concerne avant tout l’Algérie, l’IFOP a effectué une enquête sur la mémoire de la guerre d’Algérie, commanditée à la fois par la Fondation Jean Jaurès et par le journal Le Monde.

              Comme je m’en suis expliqué sur ce blog, le 17 novembre 2014, il s’agit d’une enquête méritoire, une première sur le sujet peut-être, mais dont une partie de la méthodologie statistique prête sérieusement à discussion.

            Les résultats de cette enquête ont été publiés dans Le Monde du 31 octobre 2014, sous le titre

               « Les passions s’apaisent sur la guerre d’Algérie 

Soixante ans après le début du conflit, l’IFOP a sondé les Français pour « Le Monde » et la Fondation Jean Jaurès »

          Comment ne pas rappeler à tous ces chercheurs qui mettent en avant le concept de mémoire dans le domaine de l’histoire coloniale et postcoloniale, en tout cas, qu’ils seraient bien inspirés de faire des enquêtes de mémoire statistiquement sérieuses, plutôt que d’avancer des théories sans preuves ?

           C’est une demande que j’ai souvent formulée, mais sans succès, et lorsqu’une enquête mémorielle a enfin été effectuée, comme celle relatée plus haut, son ambition portait sur la mémoire algérienne chère à Monsieur Stora et non à la mémoire coloniale dans son ensemble.

         La deuxième publication aura donc pour titre « La guerre des mémoires », un article que j’ai publié le 11 novembre 2007 sur le blog « Etudes coloniales »

       L’ancien directeur des journaux Le Monde et La Croix, Monsieur Frappat, vient de publier un article intitulé « Souvenirs longue portée » à la gloire de la thèse idéologico-mémo-historique que défend Monsieur Stora sur la ou les mémoires coloniales.

           Seul problème, mais de taille, il s’agit d’une thèse idéologique sans évaluation statistique, sans enquête mémorielle sérieuse, une thèse qui fait appel à toute une panoplie d’outils qui manquent incontestablement de pertinence scientifique.

         Je l’ai fait savoir par courrier au très honorable Monsieur Frappat.

         Au cours des prochaines semaines, je me propose donc de publier aussi  une lettre adressée aux Psy, docteurs en histoire coloniale ou post coloniale, une interprétation libre de la BD Bidu-Cauvin publiée dans Spirou et intitulée :

« Dites- moi tout »

Jean Pierre Renaud

« Anne Hidalgo s’attaque au statut de Paris » ? Qu’en penser ?

« Anne Hidalgo s’attaque au statut de Paris »

Le Monde du 23 septembre 2015, page 7

Nouveau conflit historique en  perspective ?

            Le sujet est important, et j’ajouterais volontiers « capital ».

            Pour avoir servi l’Etat à Paris pendant de longues années, mis en application, à mon niveau, les deux lois importantes qui ont modifié le statut des collectivités parisiennes, et écrit deux livres sur le sujet, j’aimerais vous faire part des observations que suscitent les propositions ambitieuses de Madame Hidalgo.

            Citation du début de cette interview :

            « C’est « un très grand chantier », prédit elle. Anne Hidalgo veut fusionner la commune et le département de Paris en une seule collectivité et reconquérir la quasi-totalité des pouvoirs du préfet de police dans la ville. « A moi de porter une nouvelle étape dans l’histoire de la conquête démocratique de Paris, qui ne fasse plus peur à l’Etat central » confie au Monde la maire (PS) de la capitale. »            Avant de faire un petit  rappel historique sur le statut de la capitale tiré du livre « Paris un Etat dans l’Etat ? » (1993), pourquoi ne pas se poser la question préliminaire de savoir s’il s’agit d’un problème de démocratie parisienne, de démocratie métropolitaine, ou plutôt de démocratie française, étant donné le rôle de la capitale dans le fonctionnement des institutions démocratiques de la France ?

            Dans l’introduction de ce livre :           

          … « Il se pose beaucoup de questions, souvent très simples, pourquoi la capitale a-t-elle eu un maire si tard, ou pourquoi un maire élu dans une capitale d’Etat ?

         Qui commande à Paris ? le Président de la République, le Maire ou le Préfet ?

         Le pouvoir local est-il vraiment un Etat dans l’Etat, comme beaucoup le disent ou l’écrivent ?…

       Paris est-elle une ville comme les autres ? » (p,8)       Dans le chapitre 1, « Aperçu historique des institutions parisiennes », j’esquissais les caractéristiques historiques des institutions parisiennes :

       « … prédominance de l’Etat sur la longue durée historique, ambiguïté des conflits entre Paris et l’Etat, difficultés intrinsèques des solutions institutionnelles, spécificités historiques des institutions et enfin, à partir du deuxième empire, inadéquation de plus en plus grande des institutions à la démographie. » (p,13)

        « … Jusqu’au XXème siècle, l’emprise de l’Etat est restée très forte sur les affaires de la capitale, que ce soit sous la monarchie, l’empire, ou la république, avec des périodes plus ou moins longues d’emprise complète de l’Etat sur la capitale. »  (p,14)

          Avec au moins six épisodes successifs de crise au cours des siècles, su XIVème siècle au XXème siècle dont le plus connu est sans doute celui de la Commune en 1870, mais ces crises trouvaient naturellement leur source dans l’ambiguïté inévitable des pouvoirs à Paris, capitale de la République française, dont tout gouvernement ne peut accepter que son pouvoir soit contesté par la rue.

        «  III – « Difficultés des solutions :

         « … Les analyses qui précèdent ont montré que les gouvernements successifs, quels qu’aient été leurs fondements, n’ont jamais trouvé la bonne solution institutionnelle, le juste équilibre entre un pouvoir d’Etat qui ne peut être contesté dans sa capitale, et un pouvoir local exprimant une volonté parisienne. Le fait « Capitale » l’a toujours emporté sur le fait « Paris », sauf depuis une période récente. » (p,25)

        «  IV – Les spécificités historiques :

         Depuis l’origine jusqu’à nos jours, c’est-à-dire à partir du choix capétien de Paris comme capitale au XIème siècle, les institutions parisiennes sont singulières à un quadruple titre :

         L’Etat s’est toujours réservé des responsabilités prépondérantes dans les affaires de la capitale, et dans les structures actuelles il conserve encore un poids qui n’est pas négligeable.

         Le pouvoir central a toujours veillé à conserver la haute main sur l’ordre public au sens large, qu’il s’agisse de sûreté d’Etat ou de sûreté locale. Le Préfet de Police en est le symbole et il est le successeur des lieutenants de police de la monarchie.

       Les pouvoirs publics centraux ont quasiment toujours eu deux représentants dans la capitale, un  pour l’administration, un pour la police…

       Enfin, et depuis 1800, les collectivités locales parisiennes ont une double nature… » (p,32)Les institutions actuelles      La ville de Paris est dotée de deux collectivités de droit commun, une commune,             avec un  maire élu par le Conseil, et un département, avec un Président qui est également le maire de Paris, avec la spécificité d’une seule assemblée qui délibère pour le compte des deux collectivités.

       Le Préfet n’exerce plus qu’un contrôle de légalité a posteriori des délibérations des deux collectivités, mais à côté de lui existe toujours un Préfet de Police dont les pouvoirs sont importants en matière de police générale et d’ordre public.

      Il existe vingt arrondissements, que la loi Paris Lyon Marseille du 31 décembre 1982 a dotés d’un Conseil issu du suffrage universel, lequel élit lui-même le maire. Ces arrondissements de taille très différente ont des pouvoirs assez réduits.

       « Est-ce que la démocratie locale s’est trouvée renforcée par cette réforme ?… Il semble toutefois que les nouveaux arrondissements aient un peu rapproché les administrations de leur gigantesque administration centrale, encore napoléonienne  à beaucoup d’égards, et contribué à mettre de l’huile dans ses rouages, un peu plus d’humanité dans ses relations. » (p,47)

      1964 : Paris devient ville-département

       1975 : une loi donne à Paris un maire à part entière, et le département est également aligné sur le droit commun. Comme chacun sait, Chirac fut le premier maire de la capitale.

     1982 : le Maire de Paris remplace le Préfet comme exécutif du Conseil Général.     Le Préfet de Police

        «  Le Préfet de Police est planté comme un monolithe de l’Etat dans le paysage institutionnel parisien depuis près de deux siècles et a traversé  quasiment sans encombre, sauf un court intermède sous le régime de Louis XVIII où le ministre de la Police était tout à la fois Préfet de Police et Directeur Général de la Police, toutes les péripéties de l’histoire riche et mouvementée des institutions de la capitale.

       Les fondements de l’institution reposent sur la loi du 28 Pluviôse an VIII (17 février 1800) et sur l’arrêté du 1er Messidor an VIII (1er juillet 1800) ayant valeur législative, textes qui ont conservé à la fois leur valeur et leur vigueur, puisqu’ils règlent toujours le fonctionnement de cette puissante et ancienne institution.

       Ces actes consulaires ont donné deux types de compétences au Préfet de Police, des pouvoirs normaux de police d’Etat chargés de la sûreté de l’Etat, et des pouvoirs exceptionnels de police municipale normalement dévolus aux maires, tournés vers la préservation de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité de la capitale commune….

        Précisons que le Préfet de Police dispose de deux budgets, un budget alloué par l’Etat pour l’exécution de ses missions d’Etat, et un budget voté par le Conseil municipal pour l’accomplissement des tâches municipales.

       Ajoutons enfin que contrairement à ce que beaucoup pensent, le Préfet de Police n’est pas uniquement placé sous l’autorité du ministre de l’Intérieur, mais sous l’autorité immédiate des ministres pour les objets qui dépendent de leurs départements respectifs.

       Au titre de la police d’Etat, le Préfet de Police est le garant de l’ordre public de la capitale, manifestations, cortèges, grèves, sécurité des lieux publics, des sièges des pouvoirs publics, des ambassades, lutte contre la criminalité, mais de façon plus prosaïque, il exerce la police des cultes, des livres et des spectacles, des armes, des étrangers et des prisons.

       Au titre de la police municipale, ainsi que l’indique le texte, il procurera la liberté et la sûreté de la voie publique, celle du commerce, et plus généralement, il assumera toutes les attributions attachées à la circulation sur la voie publique, à la sécurité publique notamment en matière d’incendie, à la tranquillité publique, en ce qui concerne le bruit et la sécurité dans les établissement publics, ils sont nombreux dans la capitale, à la salubrité des denrées, à l’hygiène des établissements publics.

     Immeubles de grande hauteur et installations classées (ateliers et usines) relèvent également de ces compétences de police municipale.

     Il est évident que la réforme des institutions parisiennes, en donnant des pouvoirs de droit commun au Conseil de Paris, a créé inévitablement certaines difficultés de relations entre les deux types de pouvoir…

    La situation actuelle est politiquement plus confortable, puisqu’elle leur permet de faire endosser par l’Etat une grande partie des difficultés d’ordre public qui sont indissolublement attachées aux fonctions d’une grande capitale, ville lumière avec son corollaire inévitable d’ombres….

      La Préfecture de Police constitue le dernier rempart de l’Etat dans la capitale… «  (p,48,49,50,51)

La pertinence historique, politique, juridique des propositions Hidalgo

            Du simple au composé !

            Fusionner les deux budgets de la commune et du département parait plutôt simple avec les moyens informatiques qui existent de nos jours, sauf à bien articuler les recettes et les dépenses respectives, et en matière de contrôle, à veiller à ce qu’il ne s’agisse pas de vases communicants non fondés. Dans le passé, les services de la ville et du département ont manifesté beaucoup d’ingéniosité dans ce domaine.

        Dans le livre intitulé « La méthode Chirac »,  j’ai eu l’occasion de mettre en lumière quelques exemples de manipulation budgétaire que la juxtaposition de budgets soumis à la même autorité pouvait faciliter.

        Supprimer un certain nombre d’arrondissements compte tenu de leur poids démographiques, pourquoi pas ? Mais à la condition de poser une organisation administrative qui sauvegarde les acquits réels de démocratie locale que les institutions actuelles ont permis de réaliser.

      Revoir la répartition des compétences du maire et du préfet de police, pourquoi pas ? Mais en n’oubliant pas :

  •               L’histoire de la capitale de la France et de son rôle dans notre histoire, deux histoires souvent confondues qui militent pour la préservation d’une Préfecture de Police solide.
  •          Que la nouvelle répartition des compétences, s’il y en a une, et il peut y en avoir une, soit faite au cas par cas, après un examen rigoureux des intérêts de l’Etat, du pays, et de tous les habitants de l’Ile de France.

Qu’en sera-t-il par exemple de la préservation des intérêts de la sécurité de l’Etat, à proximité du Parlement, des grandes cours de justice, des ambassades, etc ?

  •       Que les transferts opérés, sur le terrain de la police municipale, soient cohérents, ce qui veut dire que Mme Hidalgo doit proposer une vraie organisation de police municipale, financée sur le budget communal, comme c’est d’ailleurs déjà le cas, et assumer les charges et devoirs de cette police municipale, en lieu et place du Préfet de Police. Il est évident que cette police municipale pourra, en tant que de besoin d’ordre public dans la capitale, être mise à la disposition du Préfet de Police.

            &

Telles sont les réflexions que suscitent actuellement les propositions connues sous le titre : « Anne Hidalgo s’attaque au statut de Paris », mais pourquoi n’a-t-elle pas évoqué un autre sujet très sensible l’indépendance de la Justice dans la capitale ?

       Ses idées auraient été d’autant plus intéressantes, que dans son corps d’origine de l’Inspection du Travail, elle fut à même d’expérimenter la problématique souvent délicate des relations juridiques entre inspecteurs et préfets.

       Au cours de ma carrière, j’ai eu maintes occasions de vérifier la susceptibilité souvent légitime des inspecteurs du travail, quant à la défense de  leur périmètre d’inspection.

       A Paris, la police judiciaire est placée sous un double commandement, le Procureur et le Préfet de Police, ce qui veut dire concrètement que le Préfet de Police est aussitôt informé de toute affaire de justice sensible, les sources les mieux informées diraient avant même le Procureur, et dans la pyramide, le ministre de l’Intérieur avant même le Garde des Sceaux.

&

        Quelles que puissent être les réformes du statut de la capitale, il va de soi que les gouvernements de la République  doivent se réserver un droit de substitution entière ou partielle dans les pouvoirs du Maire et de son Conseil, en cas de crise nationale.

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

Ces migrants qui ne font pas rêver les Français !

« Ces migrants que la France ne fait pas rêver »
Titre de la première page du journal Le Monde des 13 et 14 septembre 2015
OU
 Ces migrants qui ne font pas rêver les Français !

            En comprenez-vous les raisons ?

            Il ne s’agit pas de celles qu’évoque Monsieur Stora, historien, camarade de gauche bien connu, qui semble avoir oublié l’accueil enthousiaste que la France a « réservé » au million de Français d’Algérie à l’occasion de l’indépendance de ce pays, et il ne s’agissait pas alors de « migrants ».

            A voir le succès de fréquentation de la Cité de l’Immigration, il n’est pas interdit de se demander si cette création purement politique (Chirac), sorte de gage du malaise des quartiers sensibles, n’est pas à la fois inutile et coûteuse.

            Il ne s’agit pas des raisons caricaturales  qu’il développe dans sa tribune du Monde des 6 et 7 septembre 2015, la «  diabolisation des combats antiracistes », « la mise au secret des histoires migratoires qui ont fait la France »

            Diable, c’est le cas de le dire !

            Comment ne pas souligner que Monsieur Stora, en compagnie de nombreux autres intellectuels ou chercheurs développent depuis des années un discours mémoriel et historique d’autoflagellation, pervers, idéologique, politique, d’une France coupable de tous les maux coloniaux imaginables ou pas, avec en prime l’inévitable guerre d’Algérie qui, aux yeux de l’historien, représenterait l’alpha et l’oméga de notre histoire coloniale.

            Comme je l’ai écrit à plusieurs reprises, la propagande coloniale n’a jamais eu l’ampleur de celle que ces groupes de chercheurs politiques, animés par un esprit d’anticolonialisme anachronique développent dans notre pays depuis des dizaines d’années.

            Au feu ! Au feu ! Clament-ils ! Alors qu’ils ont allumé la mèche, et qu’ils en entretiennent  les braises !

            Ce discours pervers a donc produit des effets dans l’opinion publique aussi bien d’adhésion que de rejet.

            Les spécialistes parleraient à juste titre d’un discours autoréalisateur, avec la sorte de mission réussie de mise en accusation permanente de l’histoire de notre pays, une mise en accusation qui fait logiquement peur à une partie de l’opinion publique, une peur de l’étranger.           

            Le livre « Supercherie coloniale » que j’ai publié en 2007 dénonçait déjà ce discours d’intoxication qui produit de nos jours des résultats destructeurs.

            Le lecteur pourra se reporter plus loin aux textes que j’ai publiés à ce sujet, en particulier la postface.

            Pour les citoyens bien ou mal informés, le « secret » dénoncé par Monsieur Stora ne serait-il pas au contraire celui qui pèse en partie sur certaines statistiques de l’immigration, sur les origines « ethniques », sur les flux du regroupement familial et des mariages mixtes, sur les chiffres des binationaux par pays, sur la réalité historique des demandeurs d’asile.

        On sait que les trois quarts de ces demandeurs n’ont pas droit à l’asile, et qu’en cas de refus, le retour dans leur pays d’origine est pure illusion.

       Faites le calcul sur les dernières années,  sur des demandes annuelles de l’ordre de 60 000, 45 000 restent concrètement dans notre pays, sous quel statut ?

     La démonstration que vient de faire l’OFPRA à Munich pour tenter de faire venir en France quelques centaines de demandeurs d’asile est tout à fait surréaliste, compte tenu de l’impéritie qui a été la sienne depuis plusieurs dizaines d’années.

    Pour beaucoup de nos compatriotes, une autre raison, bonne ou mauvaise : on a déjà donné ! Dans le passé, et par exemple, des régularisations massives de clandestins.

     La France a une situation qui n’a rien à voir avec celle de l’Allemagne.

     Le pays n’est pas bien portant, le chômage est important, beaucoup de Français souffrent, alors qu’ils voient se déployer, année après année, de nouveaux flux de population venant du sud ou de l’est, des concurrents économiques et sociaux qui viennent déstabiliser, qu’on le veuille ou non, l’accès au travail ou aux soins.

     Est aussi à citer, le multiculturalisme dont les tenants de l’« établissement »  parisien raffolent, sauf que sur le terrain, ce mouvement de fond anime tout autant un communautarisme socio-politique et culturel, pour ne pas dire religieux, qui donne en prime, la majorité, dans telle ou telle collectivité, aux populations venues d’ailleurs.

     Un communautarisme à caractère de plus en plus religieux, compte tenu du poids de la population de confession musulmane, du prosélytisme d’une partie d’entre elle, et de l’absence d’interlocuteurs représentatifs.

      La communauté musulmane est divisée, tiraillée, entre plusieurs courants, principalement entre chiites et sunnites qui se font une véritable guerre de religion, au Moyen Orient ou ailleurs, pour ne pas parler d’autres nombreuses allégeances.

       Enfin, face à ces vagues de jeunes migrants qui semblent bien portants,  qui se recommandent de nos droits de l’homme,  les Français sont en droit des se poser la question : combien seraient-ils prêts à s’engager pour la cause des droits de l’homme à établir dans leur pays ?

        La France est en quête de vérité.

Jean Pierre Renaud, avec la collaboration de MCV

« Supercherie coloniale »
Jean Pierre Renaud
Postface (page 273)

           Le discours anachronique, idéologique, et pseudo scientifique  de ces chercheurs n’aidera certainement pas les Français d’origine immigrée à trouver leur juste place au sein de la communauté française. Il ne contribuera pas non plus à assurer la paix des esprits et des cœurs, ou tout simplement la paix civile.

            Aujourd’hui, on mélange tout, mémoire et histoire, et le dossier algérien submerge toute réflexion objective sur notre mémoire, comme sur notre histoire nationale, car la population française compte aujourd’hui des millions de citoyens d’origine algérienne qui cultivent des mémoires conflictuelles. Et une proportion encore plus importante de Français de souche qui entretiennent d’autres mémoires conflictuelles. Ces conflits n’étant pas prêts de s’apaiser, il convient donc de traiter ce dossier à part parce qu’il empoisonne tout.

            Il n’est pas sérieux de dire que l’histoire coloniale française (y compris algérienne) a été une histoire cachée, alors que des travaux innombrables ont été effectués et non censurés, avec des thèses historiques souvent opposées. Que l’histoire coloniale n’ait pas fait l’objet de pages et de pages dans les livres scolaires modernes, quoi d’étonnant alors qu’elle n’occupait pas une place beaucoup plus grande au temps béni des colonies ! Cette situation continue à exprimer tout simplement le désintérêt continu du pays pour son ancien empire.

            Alors il est vrai que notre histoire nationale est une sorte de roman, comme l’ont écrit certains, mais elle a au moins le mérite, en comparaison d’autres, d’être ouverte à toutes les critiques.

            Alors il est vrai  que certaines minorités françaises se plaignent de voir ignorer leur propre histoire, mais personne ne les a empêchées, semble-t-il, de manifester leur curiosité pour leur propre histoire. J’ai rencontré il n’y a pas si longtemps une fort belle antillaise qui ne s’était jamais préoccupée de ses origines : s’agissait-il d’une exception ? Et auparavant, j’avais fait la même expérience avec de jeunes membres de l’élite malgache.

            Rassurez-vous, les Français de métropole cultivent la même ignorance de l’outre-mer, sauf lorsqu’il se pare, comme dans le passé, des couleurs d’un exotisme, depuis peu mâtiné de générosité internationale.

            Et en ce qui concerne l’Afrique francophone, il est heureux que l’histoire coloniale ait permis à beaucoup de traditions orales d’être transcrites, au lieu d’être perdues, et mises à la disposition de l’histoire africaine !

            Ce livre met en évidence le manque de culture générale de ces chercheurs et leur goût forcené pour le tout médiatique, imitant à leur façon et dans leur domaine,  toute une partie de notre élite politique, culturelle, sociale, et économique, qui souffre du même travers.

            Alors, on raconte n’importe quoi !

Le 12 décembre 2007

            Je publierai ultérieurement la quatrième de couverture de ce livre.

La gauche au pouvoir: Cartel 1924-1926 et Présidence Hollande 2012-2015

1924-1926

« La faillite du Cartel »

« Leçon d’histoire pour une gauche au pouvoir »

Jean-Noël Jeanneney

Points 1981

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2012-2015

Trois années de Présidence de gauche

&

« Faillite » ou non ?

Ou « Fin de stage » ?

            Une journaliste du journal Le Monde vient de publier un petit livre dont le contenu parait correspondre au  jugement politique, partagé par beaucoup de Français, sur l’amateurisme de la Présidence Hollande, lesquels n’ont pas attendu la fin du soi-disant « stage ».

       Le Parti Socialiste est arrivé au pouvoir avec un catalogue de soixante mesures qui ne correspondaient pas du tout à l’état du pays.

       Le Président aurait donc découvert  tardivement, après avoir fait de longues classes politiques, avec Mitterrand, puis comme Premier Secrétaire du PS, que l’économie et l’entreprise étaient au cœur de la lutte contre le cancer du chômage !

        En 1981, Jean-Noël Jeanneney, l’historien de gauche bien connu, mettait en garde, dans sa mise à jour du livre, la gauche revenue au pouvoir, sur l’échec du Cartel des gauches qui était arrivé au pouvoir en 1924, sans avoir fait le bon diagnostic sur l’état de la France et sur les solutions, c’est-à-dire le même amateurisme.

        Comme quoi l’histoire se répète, à cette différence près que le régime constitutionnel n’est plus du tout le même, et qu’il permet au Président de se maintenir au pouvoir, alors qu’il parait bien, au gré des consultations électorales successives, qu’il ne disposerait pas du soutien majoritaire des Français.

Jean Pierre Renaud

Face à Daech, le manque de courage de l’Europe, avec Le Monde !

Vagues de réfugiés ou de migrants ?

Face à Daech, le manque de courage de l’Europe !

Dans Le Monde du 3 septembre 2015,(page 22) une chronique Arnaud Leparmentier sous le titre « Aidons Merkel »

         Le journaliste propose comme solution de changer les règles sur cinq points :

      « … Changer les règles…

          … Pour cela, il faut changer les règles en Europe.

Un, mettre en place et financer comme prévu des centres d’accueil de réfugiés…

Deux, contingenter, moyennant solidarité financière, les réfugiés…

Trois, harmoniser les conditions d’asile…

Quatre, les Européens doivent s’entendre sur les pays jugés « sûrs » dans lesquels on peut renvoyer des réfugiés…

Cinq, sans préjuger de la résolution des conflits en Lybie et en Syrie, avoir une ferme explication avec les pays devenus des pays de transit quasi organisé… »

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Six :

      J’ajouterais volontiers un sixième point, à mes yeux le plus important, que l’Europe ait, à la demande de pays arabes, le courage d’envoyer au Moyen Orient un corps expéditionnaire capable, puisque la barbarie de Daech nous fait la guerre, de la combattre, car elle est la source des flux de réfugiés.

         Et pourquoi ne pas soumettre à la justice militaire les combattants djihadistes de retour dans la « patrie » ?

       Je me souviens avoir lu un article du même journal dans lequel le journaliste s’étonnait de la passivité dont faisait preuve les Etats Unis dans ce conflit.

       Les Etats-Unis n’ont-ils pas eu le courage de lutter avec succès contre la barbarie nazie ?

Alors, le journal de référence des Français continuera à dire, sans le dire, à la manière bien connue du quotidien : « Courage, fuyons ! »

        Un mot d’ordre qui semble partagé par le monde politique, médiatique, et culturel !

        Les politiques, de droite ou de gauche confondues, ne font-ils pas leur rentrée en faisant comme si la guerre contre Daech n’existait pas ?

Jean Pierre Renaud

A propos du Mistral, avec Le Monde, le conflit d’intérêt !

A propos du Mistral ! Dans le journal des 2 et 3 août 2015 International & Europe page 4
Une haute fonction publique en complicité avec le journal Le Monde : un vrai conflit d’intérêt !
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            Ou pourquoi les deux détectives infatigables du journal, D et D, continueraient à se mettre en chasse des secrets de l’instruction, alors que tant de sources sont à leur discrétion ?

&

            Tout le monde connait aujourd’hui cette histoire tout à fait étrange d’un pays, qui se croit encore grand,  la France, qui hésitait à livrer à la Russie de Poutine deux beaux bâtiments de guerre, d’un pays qui viole les traités internationaux en croquant la Crimée et en attisant, sinon en alimentant, une nouvelle  guerre d’annexion en Ukraine.

            Le journal faisait donc l’annonce d’un accord, qui n’en était pas encore tout à fait un, de remboursement des deux bateaux à la Russie.

            Le gouvernement avait chargé de cette négociation un haut fonctionnaire :

            « … le secrétaire général pour la défense et la sécurité nationale Louis Gautier (par ailleurs membre du conseil de surveillance du Monde) était rentré avec une facture de plus de 1 milliard d’euros… »

            Curieuse conception de la liberté de la presse de la part de ce journal, pourfendeur de toutes les turpitudes publiques, et de la part des pouvoirs publics qui cautionnent un conflit d’intérêt, au cœur même de notre système de défense !

Jean Pierre Renaud

« Français et Africains? » Un livre de Frederick Cooper, avec Catherine Simon, dans Le Monde, sous le titre  » Citoyens de deuxième zone: le cas africain »

A propos du livre de M.Frederick Cooper intitulé « Français et Africains ?
Etre citoyen au temps de la décolonisation »
et de la critique élogieuse de la journaliste du Monde Catherine Simon,dans le journal Le Monde des 25 et 26 décembre 2014, page 23.
Titre de l’article : « Citoyens de deuxième zone : le cas africain »
« Entre 1945 et 1960, le concept de « citoyenneté » a été au cœur des questions qui agitaient les élites de l’Afrique coloniale française. Un passionnant essai de Frederick Cooper les met en lumière »

En marge : « La plupart des représentants africains n’étaient pas des nationalistes et moins encore, des indépendantistes (ou des révolutionnaires). Les débats n’en furent pas moins vifs et douloureux »

&

Avec en ombre chinoise et contraire, la thèse de Mme Huillery sur le même territoire, d’après laquelle, l’homme blanc aurait été le fardeau de l’homme noir en Afrique Occidentale Française.

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La journaliste conclut sa lecture ainsi :

« Récit magistral, Français et africains ? met en lumière, comme rarement, les acteurs africains de notre histoire française. »

&

Après avoir lu cet ouvrage, je serais tenté d’écrire :
« Citoyens de deuxième zone : le cas africain »
Ou Français, nouveaux citoyens de deuxième zone en Europe ?

&

Comme je l’ai fait longuement sur ce blog pour l’analyse critique d’un ouvrage du même auteur intitulé « Le colonialisme en question », je me propose d’annoter ce livre et de publier ma propre lecture critique d’ici quelques mois, mais le contenu du texte même de l’éloge Simon suscite d’ores et déjà quelques réflexions de cadrage de cet objet d’histoire.

Première remarque : la question de citoyenneté fit débat, bien avant 1945, peut-être plus d’ailleurs dans les colonies, et plus particulièrement chez leurs « évolués », alors qu’en métropole, le même débat n’intéressait qu’un petit nombre de spécialistes du monde politique ou économique.

Comment dissocier en effet ce concept de citoyenneté avec celui d’assimilation, une ambition coloniale ambiguë que la France n’a jamais été capable de mettre en œuvre dans ses colonies, tellement cette ambition était éloignée de toute réalité coloniale et métropolitaine ?

Il s’agissait donc d’un vieux débat, d’un très vieux débat !

Deuxième remarque : les élites africaines, mais il serait plus juste d’écrire les minorités d’ « évolués » d’Afrique noire, n’ont été, sauf exception, ni nationalistes, ni indépendantistes, ni révolutionnaires.

Pourquoi cette absence de revendication ? Très sommairement, on pourrait répondre, par absence de sentiment national dans des colonies caractérisées encore par un patchwork religieux et culturel que la colonisation n’avait pas encore réussi à unifier en profondeur.

Avant même que le Mali ne devienne indépendant, est-ce que Modibo Keita n’avait pas déjà compris que seule la solution du parti unique apportait la garantie de survie d’un Etat qui n’était pas national, en tout cas pas encore.

Quelle conception de la citoyenneté avait donc M.Modibo Keita, et quelques-uns de ses collègues qui se sont empressés de gouverner avec des partis uniques : une citoyenneté de quelle zone, première ou seconde zone ?

Troisième remarque : à l’arrière- plan ou au premier plan de la discussion constitutionnelle et juridique qui a occupé des parlementaires ou conseillers de la métropole, avec en face d’eux, les parlementaires africains les plus « évolués » qu’étaient Senghor ou Houphouët- Boigny, il y avait au moins deux revendications qui faisaient problème, une représentation au sein des institutions de la République Française qui ne fasse pas de la France « la colonie de ses colonies », l’expression qu’avait utilisée le Président Herriot, d’une part, et d’autre part le coût financier pour la métropole d’une égalité sociale, c’est-à-dire des avantages sociaux, accordée aux nouveaux citoyens de l’Union Française.

Rappelons que le général de Gaulle avait utilisé le même type d’argument en ce qui concerne l’intégration de l’Algérie dans les institutions françaises.

Le problème du coût – Une deuxième revendication portait tout autant, sinon plus, sur les droits sociaux, avec l’incidence très lourde que la satisfaction d’une telle revendication avait sur les finances de la France, donc une solution impossible à mettre en œuvre.

Le groupe des « évolués », partisan de cette égalité sociale, exerçait une pression d’autant plus forte qu’il était constitué majoritairement de fonctionnaires et de salariés qui bénéficiaient déjà d’avantages sociaux, une minorité au sein des populations locales, notamment au Sénégal, terrain d’analyse privilégié par M.Cooper.

Quatrième remarque : la phrase « quand les premières fissures apparurent dans l’édifice impérial de la France », ne correspond pas plus aux réalités historiques de l’époque coloniale.

J’ai par exemple souvenir d’un texte de l’africaniste Delafosse où ce dernier, dans les années 1900-1920, évoquant un attentat qui venait de se produire en Indochine, ne cachait pas qu’il pourrait y en avoir un jour dans d’autres colonies.

Pour ne citer qu’un autre exemple, mais ils seraient nombreux, le gouverneur général d’Indochine Varenne évoquait déjà, et bien avant 1945, les perspectives d’évolution de l’Empire qui n’étaient pas obligatoirement celles de l’assimilation et de la citoyenneté.

Cinquième remarque : qu’entendait-on par « citoyenneté » ?

Est-ce que l’appellation de « citoyen de seconde zone » est appropriée pour caractériser l’analyse juridique et historique que propose l’historien ?

Rien n’est moins sûr, car sa démonstration vise à faire apparaître la complexité du débat constitutionnel engagé en 1945, avec une superposition et une juxtaposition de statuts politiques ou personnels qui rendaient quasiment toute solution standard et cohérente impossible.

Sixième remarque : cette analyse de type historique fait quasiment l’impasse sur l’histoire de la France, avant et après 1945, et sur l’histoire des sociétés coloniales de l’Afrique de l’ouest, une fois la conquête à peu près achevée.

Septième et dernière remarque : l’ouvrage de M.Cooper fait une impasse complète sur le volet des relations économiques et financières entre l’Afrique noire et la France, ce qui est bien dommage.

Pourquoi ne pas penser en effet, et c’est tout le sens de la critique que j’ai faite de la thèse Huillery sur ce blog, que la balance financière entre l’Afrique noire et la France n’était pas si mauvaise ou détestable pour les Africains, puisque les nouveaux dirigeants de ces pays auraient bien voulu continuer, comme avant, avec cette fois tous les droits et avantages de la citoyenneté politique et sociale.

Pour en terminer provisoirement avec cette première lecture, il conviendra de répondre à quatre questions :

La première : Africains de seconde zone ou Français de seconde zone en Europe ? Compte tenu du gouffre qui séparait les niveaux de vie de la métropole et de l’AOF, puisqu’il s’agissait d’abord de cela, même après le désastre que fut la Deuxième Guerre mondiale pour le pays.

La deuxième : la thèse de Frederick Cooper d’après laquelle les deux partenaires de cette négociation, Africains et Français, auraient eu le choix des solutions constitutionnelles et institutionnelles, est-elle pertinente sur le plan historique ?

La troisième : dans quel registre d’histoire s’inscrit ce type d’analyse, histoire centrée ou décentrée, histoire globale ou sectorielle, connectée ou déconnectée …, pour user de termes aujourd’hui à la mode ?

La quatrième : est-ce qu’en 1945, la situation d’une France détruite et ruinée par la guerre n’attestait pas du fait que ce type de débat passait largement au- dessus des préoccupations des Français ?

Nous poserons en définitive la question de savoir s’il ne s’agit pas d’une histoire hors sol, hors temps historique, c’est-à-dire d’une histoire insuffisamment « connectée ».

Jean Pierre Renaud

Humeur Tique au fil des jours, le bac ou Hollande, le vin du Monde, la tragédie grecque, les criquets politiques de Madagascar

Humeur Tique au fil des jours

Au choix, le bac ou Hollande, réflexe journalistique du Monde pour le vin, la tragédie grecque, les criquets politiques de Madagascar

Sur France 2, au choix et chaque jour, ou le bac ou Hollande !

Ces pauvres apprentis bacheliers qui n’en peuvent mais, et ce pauvre président qui, chaque jour aussi, bat une campagne qui n’est évidemment pas électorale ! Comme si la France n’avait pas mieux à faire !

Et comme dit un proverbe, non présidentiel, « La charité commence par soi-même » : Le Président de dire, j’ai un excellent Premier Ministre, et ce dernier de dire , j’ai un Président formidable.

Quelle chance pour le pays !

Un vrai réflexe journalistique pour le vin

Dans le journal daté des 14 et 15 juin, le Monde a publié un magnifique supplément de dix-huit pages intitulé « LE MONDE DES VINS »

A la page 12, et sous le titre « La pub face au juge », le journal a manifesté un vrai réflexe journalistique, la vitesse grand V (IN), en écrivant :

« La loi Evin qui vient d’être assouplie interdit aux publicités pour l’alcool d’être trop incitatives. A travers cinq exemples, voici ce qu’il est possible de publier »

Un amendement soutenu par la gauche et la droite pour une fois réunies venait effectivement d’être voté le 11 juin, par l’Assemblée Nationale.

Chaque jour aussi, une nouvelle tragédie grecque !

Chaque jour aussi, le grand prêtre Tsipras propose au monde entier une nouvelle version de sa tragédie grecque. Il est bien dommage qu’il n’ait pas pris le soin auparavant d’aller consulter la Pythie du grand temple de Delphes !

Chaque jour aussi, les criquets politiques de Madagascar sont de retour pour ravager et mettre en péril la grande île !

Comme cela a été écrit à plusieurs reprises sur ce blog, il y a bien pire que les criquets de la nature qui ravagent périodiquement les champs malgaches, ce sont les criquets politiques de cette belle île !

Année après année, ils se reproduisent et s’adonnent à des jeux de pouvoir et d’argent qui se déroulent au mépris de l’intérêt général de leur pays !

Esclavage et colonisation, mémoire ou histoire, pourquoi ne pas tout mélanger?

Esclavage et colonisation, mémoire ou histoire, pourquoi ne pas tout mélanger ?

Réparations et repentance ?

Les pérégrinations du roi Hollande dans les Caraïbes, ses multiples déclarations, associées au remue-ménage causé par la réforme du collège sur les programmes d’histoire ont une fois de plus provoqué beaucoup de réactions dans les milieux politiques, médiatiques, et intellectuels.

Guillaume Goubert dans la Croix du 12 mai 2015, intitulait son éditorial :

« Repentance et fierté

Les examens de conscience sur la colonisation ou la traite négrière suscitent de vives réactions »

De son côté, Le Monde du 14 mai 2015, publiait une chronique relative à la réforme du programme du collège (page 7), avec un premier article, « Le programme d’histoire idéal n’existe pas » et un deuxième article, « Des historiens dénoncent lacunes et manque de cohérence », dans lequel le journal donnait la parole à M.Nora, lequel déclarait :

« Il faudrait faire en sorte que « les enfants de France aient de bonnes raisons de se sentir français », plaide-t-il, en déplorant « un penchant à l’exagération dans le masochisme national et colonial. »

Puis à M. Winorcka en rappelant sa mise en garde, dans le Journal du Dimanche, contre le risque de transformer l’histoire en morale. « Indigènes de la République, Vendéens, anciens combattants, Arméniens, descendants d’esclaves… tous ces groupes revendiquent leur place dans l’histoire. Le danger est de transformer l’histoire en histoire des victimes. »

Evoquons successivement les deux sujets de l’esclavage et de la colonisation.

Les esclavages, au pluriel

M.Hollande a été inaugurer un musée sur l’esclavage en Guadeloupe. Très bien ! Mais qu’il le veuille ou non, ou le souhaite-il peut-être, cette commémoration faite à coup de grosses trompettes, pourrait laisser croire aux ignorants, que la France a joué un rôle majeur dans la traite des esclaves des Caraïbes et des côtes américaines, en faisant l’impasse sur les traites de marque anglo-saxonne beaucoup plus importantes.

Une France toujours au premier rang pour commémorer les destinées tragiques de toutes les victimes, la seule à l’assumer, dans le cas des Caraïbes ?

L’histoire ferait ainsi l’impasse sur tous les autres flux de la traite négrière, ceux dirigés vers les pays de l’est arabe et musulman, et en premier lieu sur ceux qui ont nourri ce trafic humain, c’est-à-dire ceux d’origine africaine elle-même ?

Il n’est pas besoin d’avoir beaucoup lu de récits sur l’état du continent africain, notamment dans ses territoires de l’ouest pour savoir que beaucoup de ses émirs, Almamy, et rois, avaient l’habitude de procéder souvent à des razzias d’esclaves destinés à alimenter leurs armées, leur cour, ou la traite négrière elle-même.

Pourquoi ne pas rappeler qu’à la fin du dix-neuvième siècle, et pour la seule Afrique de l’Ouest, devenue « provisoirement » française, les Almamy Samory et Ahmadou, ainsi que le roi Béhanzin d’Abomey, étaient des esclavagistes, ce dernier, à quelques encablures du fameux port de Ouidah, commémoré de nos jours comme un des hauts lieux de mémoire de l’esclavage ?

Pourquoi ne pas rappeler aussi qu’une fois les conquêtes faites, la France a supprimé l’esclavage qui sévissait dans ses nouvelles colonies, dans des conditions qui n’ont pas toujours été satisfaisantes, compte tenu de toutes les difficultés d’application de ces mesures, liées à la fois à la culture des sociétés africaines et à leur pauvreté ?

Qui, en France, de nos jours sait par exemple, que c’est Gallieni qui a supprimé en 1896 l’esclavage à Madagascar ?

Alors, oui, il est nécessaire de rappeler la mémoire de cette traite abominable, mais en ne laissant pas dans l’ombre, les responsabilités des différents « partenaires », au risque de laisser croire, peut-être à juste titre, que derrière ce débat se cache l’épineuse et insoluble question des réparations financières, doublée d’une sempiternelle demande d’assistance que justifierait ce passé.

Lors de son passage en Guadeloupe, le Président a tenu des propos fort imprudents en ce qui concerne un vieux contentieux avec Haïti, qu’il a d’ailleurs aussitôt démenti en faisant une escale dans cette île.

Rappelons le compte rendu qu’en a fait le journal Le Monde, le 12 mai 2015, dans l’article intitulé : « Hollande aux Antilles, c’est Noël en mai »

Le 14 mai, le même journal titrait en première page « Haïti – Hollande reconnait la « dette morale » de la France », mais le compte-rendu du même journal notait « Des propos du chef de l’Etat avaient laissé espérer aux Haïtiens des réparations financières »

« Des manifestants affichaient une pancarte indiquant leurs exigences : « Argent oui, morale non »,

Le journal intitulait d’ailleurs une partie de sa chronique :

« Gaffe d’envergure »

Le journal Ouest France du 12 mai 2015, proposait sa lecture de l’escale du Président à Cuba (page 2) :

« Sauf qu’en réalité, personne n’a attendu le conquistador Hollande, escorté par sept ministres et une escouade de dirigeants d’entreprises (Accor, GDG Suez…), François Hollande est donc plutôt en mission de rattrapage. Il n’empêche, sa prétention à damer le pion aux Occidentaux agace : « Cuba c’est un très petit marché. Un pays de 11,5 millions d’habitants, la moitié de l’Ohio » minorait, hier, à Paris, Stefen Selig, le sous- secrétaire d’Etat américain au commerce. »

Colonisation et repentance

Il s’agit très largement d’un débat « pourri » pour tout un ensemble de raisons, avec au moins quatre principales :

Première raison principale : l’histoire de l’Algérie, avec la ou les mémoires de la guerre d’Algérie !

A lire ou à écouter certains historiens, intellectuels, ou politiques, l’histoire de la colonisation se résumerait à celle de l’Algérie, et encore plus à celle de la guerre d’Algérie.

Un historien de l’Algérie, aujourd’hui très bien en cour, développe ce type de discours ambigu.

Une nouvelle propagande qui pourrait laisser croire que dans cette guerre, tout était noir du côté français, et tout était blanc du côté rebelle, que les « saloperies », pour ne pas dire les crimes de guerre, n’ont été commises que dans un camp, ce qui est évidemment faux.

Pour avoir servi la France en Algérie, comme officier du contingent dans les SAS, je regrette depuis longtemps que les Accords d’Evian qui ont scellé l’indépendance de l’Algérie aient stipulé que toutes les exactions commises pendant ce conflit seraient amnistiées.

A la vérité, des crimes de guerre ont été commis dans les deux camps et si ladite repentance devait se manifester elle devrait l’être par tous ceux qui, au service de la France, ou au service du FLN, en ont été les auteurs.

Beaucoup de ceux qui ont servi la France en Algérie n’ont pas commis de crime de guerre, le seul crime dont il serait possible de les accuser est celui d’avoir servi la France.

En serait-il de même dans l’autre camp avec les attentats et l’assassinat en particulier des membres du MNA, les vendettas de clans, ou enfin l’assassinat de nos harkis ?

Deuxième raison principale, et en dépit de ceux ou celles qui racontent, le plus souvent « d’en haut » (autre façon d’exprimer l’ethnocentrisme blanc), avec un parti pris idéologique ou politique, et au dire des « témoins » dits d’« en bas », la colonisation n’a pas non plus été, ou tout noire, ou tout blanche, mais mélangée, mixte, avec des ombres mais aussi des lumières.

Je ne citerai à ce sujet que le seul témoignage d’Hampâté Bâ, ce grand lettré d’une Afrique occidentale, anciennement française :

« Une entreprise de colonisation n’est jamais une entreprise philanthropique, sinon en paroles… Mais, comme il est dit dans le conte Kaïdara, toute chose a nécessairement une face diurne et une face nocturne. Rien, en ce bas monde, n’est jamais mauvais de A jusqu’à Z et la colonisation eut aussi des aspects positifs, qui ne nous étaient peut-être pas destinés à l’origine mais dont nous avons hérité et qu’il nous appartient d’utiliser au mieux. Parmi eux, je citerai surtout l’héritage de la langue du colonisateur en tant qu’instrument précieux de communication entre ethnies qui ne parlaient pas la même langue et moyen d’ouverture sur le monde extérieur – à condition de ne pas laisser mourir les langues locales, qui sont le véhicule de notre culture et de notre identité. » (« Amkoullel, l’enfant peul » Babel, page 492).

En ce qui concerne l’analyse récente des problématiques de citoyenneté par Frederick Cooper, un historien « d’en haut », parce qu’appartenant au monde occidental, tend à démontrer qu’en 1945, les « évolués », politiques ou syndicalistes du monde africain aspiraient à la citoyenneté française, en dépit de tous les « méfaits » de la colonisation.

Il est notoire qu’avant, mais tardivement, surtout après les indépendances, les intellectuels des nouveaux Etats d’Afrique noire se sont efforcés, avec plus ou moins de succès, d’écrire ou de réécrire leur roman national, à l’exemple de ce que la France a su faire pour son propre roman national, mais avec beaucoup plus de difficulté dans les contrées où la source principale des histoires ou de l’histoire reposait sur les épaules des griots, c’est-à-dire des traditions orales.

Troisième raison principale, une ignorance béante de l’histoire coloniale aussi bien de la part des citoyens de la plupart des anciens pays colonisés, de leurs descendants en France, que des Français eux-mêmes !

C’est la raison pour laquelle il est possible de nos jours de dire ou d’écrire n’importe quoi, et cette ignorance fait le lit d’une nouvelle propagande postcoloniale qui est d’autant plus efficace qu’elle nourrit le cahier de doléances permamentes de certains partis politiques de métropole ou d’outre-mer.

Un ou plusieurs courants de chercheurs, plus ou moins pertinents, avec l’appui d’intellectuels ou de politiques, surfent de nos jours sur la mauvaise conscience, un humanitarisme sympathique qui est venu fort opportunément se substituer au marxisme, des adeptes affichés ou clandestins de la fameuse repentance nationale.

Ils feraient bien d’aller porter la bonne parole dans le monde anglo-saxon, russe, ou chinois…

Quatrième raison principale : des enjeux électoraux ou financiers trop souvent cachés, aussi bien dans nos outre-mer actuels que dans certaines banlieues françaises.

A lire les journaux ou à regarder la télévision, le dernier voyage du Président Hollande a été un modèle de propagande électorale, déjà pour 2017, mais ses prédécesseurs ne faisaient pas mal non plus dans le genre.

Les électeurs auraient sans doute été intéressés par un reportage circonstancié et fouillé sur les paradis fiscaux et mondains de certains outre-mer français, entre autres ceux des îles Saint Martin et Saint Barthélemy, « Saint Barth » pour les intimes !

Ajoutons qu’à l’arrière-plan de beaucoup de revendications « hallucinées », se profilent souvent des questions de gros sous, et en ce qui concerne certains acteurs des outre-mer français anciens, une demande d’assistance permanente qui trouverait sa justification dans les péchés coloniaux de la France.

Jean Pierre Renaud

Le livre « Les empires coloniaux » Chapitre 9 « Conflits, réformes et décolonisation » de Frederick Cooper – Epilogue

Le livre « Les empires coloniaux »

Sous la direction de Pierre Singaravélou

Lecture critique 6

 Suite et fin

Chapitre 9

« Conflits, réformes et décolonisation »

La situation impériale mise en cause

Frederick Cooper

En épilogue

       Comme je l’ai déjà signalé sur ce blog, j’ai l’intention de publier une analyse critique du livre que le même historien vient de publier sous le titre «  Français et Africains ? ».

       En « appetizer » historique, et pour oser l’expression, j’écrirais volontiers que dès son prologue et son introduction, l’auteur propose quelques-unes des clés qui permettent de situer les ambitions d’un ouvrage très fouillé sur l’histoire constitutionnelle et politique de la décolonisation française en Afrique noire, car il s’agit d’abord des relations politiques entre la France et  l’Afrique noire, souvent réduite d’ailleurs à l’expression géographique et politique du Sénégal et de l’Afrique Occidentale Française (AOF

      L’auteur note dès le départ d’une riche et longue analyse : « Ceci est un livre sur la politique » (p,9) en distinguant l’aspect interactif, conflictuel, ou de compromis, et l’aspect conceptuel des mots citoyenneté, nation, empire, Etat, souveraineté, un sens qui soulève incontestablement de redoutables problèmes d’acception, pour ne pas dire de compréhension, ou tout simplement d’application concrète, selon les moments coloniaux et les sociétés coloniales en question.

          Dans sa conclusion, l’’auteur pose la question centrale qui fonde la thèse politique ou historique qu’il défend à savoir :

« Comment expliquer que les dirigeants ambitieux et intelligents de la France européenne et de la France africaine se soient retrouvés en 1960 avec une forme d’organisation politique –l’Etat-nation territorial – que peu d’entre eux avaient recherchée et que tous, sauf la Guinée avaient rejetée en 1958 ? …

Si l’on croit dès le départ au grand récit de la transition globale à long terme, de l’Empire vers l’Etat-nation, on peut aussi bien passer à côté de la question (cidessus) qui ouvre ce paragraphe. » (p,446)

        Est-ce qu’il pouvait en être autrement entre la France et ses anciennes colonies, alors que les dirigeants africains d’une partie seulement de l’ancien empire, demandaient à la France de résoudre la quadrature du cercle coloniale ?

         La France regardait ailleurs, de Gaulle y compris.

         Est-ce qu’il existait un autre choix, ou les jeux étaient-ils déjà faits depuis longtemps ?

Nous verrons ce qu’il convient de penser de ce type de thèse dans l’exercice de lecture critique que nous publierons après l’été 2015, mais nous proposerons avant juillet une première réaction d’écriture sur l’article tout à fait élogieux qu’a publiée sur ce livre Catherine Simon dans le journal Le Monde des 25 et 26    décembre 2014.

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés