Immigration, vérités, et cartes sur table: réflexions

Immigration, vérités, et cartes sur table !

Réflexions d’un citoyen sur l’immigration en France

            Le dossier de l’immigration est un dossier français politiquement sensible, mais il est très difficile, pour un citoyen curieux du sujet, désireux d’en comprendre les éléments fournis par la presse écrite, d’interpréter les statistiques produites, tant elles sont changeantes, diverses, pour ne pas dire contradictoires.

A dire vrai, et après deux années de lecture de ce type d’informations, mon opinion est encore incertaine sur les chiffres et leur interprétation.

Le Monde –

En ce qui concerne les chiffres, Le Monde du 4 décembre 2010, notait dans sa page « Décryptages Focus » la stabilité des chiffres de l’immigration entre 1986 et 2006 : « Si l’immigration s’est stabilisée, son visage en revanche s’est tranformé… », soit entre 7,4% et 8% d’étrangers en France.

Mais le même journal, dans sa page Contre-enquête du 12 avril 2011, propose une représentation graphique intitulée « Immigration en France : pas de baisse depuis 2001 », et on lit effectivement que le flux d’entrée à caractère permanent est passé de 137 903, en 2001, à 199 467, en 2004, le maximum, et 181 316, en 2009.

Comment ne pas noter par ailleurs que le titre des graphiques est manipulateur ? « Pas de baisse », alors qu’il y a augmentation ?

Sur ces flux, le nombre d’immigrés entrés par la voie d’une migration familiale représente sur l’ensemble des années de l’ordre de 800 000 immigrés, lesquels ont naturellement vocation à entrer dans la communauté française

Et sur ces tableaux, les chiffres de migration des travailleurs ne constituent pas un vrai sujet, compte tenu de leur faible pourcentage, et montrent que les déclarations récentes, et du ministre de l’Intérieur, et de la présidente du Medef, à ce sujet, n’ont pas de réel fondement.

Alors qui croire et à quoi croire ?

Incompétence des journalistes, manipulation des chiffres, complexité technique du sujet, laquelle est incontestablement la plus forte en ce qui concerne l’évaluation des immigrés sans papiers, ou de ceux venus avec des faux papiers ?

 Les Echos-

Un autre journal, Les Echos vient de présenter, le 26 avril, son analyse du sujet, et le contenu de cette analyse découpée en quatre thèmes soulève également quelques questions :

La proportion d’immigrés augmente-t-elle sur le territoire français ? Le journal fait référence au chiffre des années 1920, mais est-il bien sérieux de la part d’un journal économique et financier de partir d’une telle référence, dénuée de tout crédit, ne serait-ce qu’en raison de sa date et des millions de morts de la guerre 1914-1918 ?

Dans le même paragraphe, l’auteur écrit «  Par ailleurs, 100 000 individus quittent chaque année l’Hexagone… Autour de 100 000 personnes par an, en moyenne, restent donc à accueillir. Un chiffre bien modeste comparé aux autres pays développés. »

100 000 personnes seulement ? Vraiment ? Par quel processus, et sur le fondement de quelles statistiques ? Le quotidien aurait pu à la fois l’expliquer et le justifier, car c’est un aspect ignoré de ce dossier.

Les immigrés pèsent-ils sur les comptes sociaux ?  Le journal propose une analyse dont les résultats sont d’ailleurs nuancés, fondée sur l’hypothèse, sauf erreur,  que la population d’origine immigrée et intégrée dans la communauté française ne vieillira pas dans notre pays. Difficile à croire tout de même !

Une diminution de l’immigration suffirait-elle à faire baisser le chômage ? Conclusion évidemment négative, et bien connue des spécialistes, le facteur majeur du débat n’étant pas l’immigration officielle, mais clandestine, celle dont personne ne connait le chiffre exact, 300 000 ? 400 000 ? Un flux de travailleurs sans papiers qui alimente le recrutement de beaucoup d’entreprises, grandes ou petites dans certains secteurs économiques.

L’immigration peut-elle pallier le vieillissement de la population ? Conclusion négative du journal, mais qu’il serait bienvenu de relier à la conclusion précédente sur les comptes sociaux.

Dans le même numéro, un des éditorialistes du journal écrit sous le titre « Penser l’immigration » : … Dans l’enquête que nous publions aujourd’hui, trois contrevérités sont démontrées. »

Est-ce bien sûr ?

Impossible donc pour un citoyen curieux de saisir les véritables données de ce dossier et d’en interpréter les éléments !

Dans cette sorte de désordre des chiffres et des interprétations, quelques informations paraissent établies aujourd’hui, ou en tout cas communiquées :

La concentration anormale des flux migratoires sur certains territoires, ceux que Luc Bronner a fort bien décrit dans son livre « La loi des ghettos ».

Le Haut Conseil de l’Intégration vient du reste de le souligner.

L’importance des flux liés à l’immigration familiale, et les questions légitimes qu’il est possible de se poser, afin de comprendre le fonctionnement dont l’image de pelote de laine multiforme rendrait assez bien compte :

 1- Quant à l’interprétation du concept de parenté dans la culture africaine et dans notre propre culture, à l’évidence, très extensible dans la première. A titre d’exemple, dans certaines régions de l’Afrique de l’ouest, un oncle est encore réputé « père » de son neveu ! Comment voulez-vous qu’un employé municipal ou préfectoral comprenne ce type de relation ?

Cette immigration familiale, qui peut être chez nous source de problème, atteste de la solidarité puissante et toujours vivante de beaucoup de communautés africaines, une solidarité qui est incontestablement positive sur le plan humain.

2- Quant aux facilités d’intégration de personnes issues de certaines cultures africaines d’émigration, pour ne pas évoquer le redoutable problème de l’alphabétisation et acculturation  de beaucoup d’entre elles.

Le sociologue Lagrange a publié les résultats d’une enquête sérieuse qui montre les difficultés réelles que peuvent rencontrer certains jeunes issus de cette immigration dans leur processus d’acculturation à la française ?

Un grand intellectuel africain, Moussa Konaté, dans son livre « L’Afrique noire est-elle maudite » propose à cet égard un certain nombre de clés de compréhension de la culture africaine.

Vrais et faux papiers 

Quant au contrôle de l’authenticité de papiers soi-disant officiels présentés par nos immigrés, dans son livre « Madame Bâ », l’académicien Orsenna, bon connaisseur de l’Afrique, et ancien collaborateur de M. Mitterrand, propose à ses lecteurs quelques ouvertures de réflexion à ce sujet (voir pages 386 à 388).

Mais me direz-vous, ce n’est qu’un roman !

Les mariages mixtes

L’importance des mariages mixtes, de l’ordre de 50 000 par an (Les Echos numéro 20913), sur un total de 250 000 en France : dans quelle rubrique sont- ils comptés ? Et l’interprétation d’un certain nombre de ces unions pose aussi des questions.

En conclusion, le débat avance effectivement, et aussi, une meilleure connaissance du sujet, mais la presse serait bien avisée de proposer à ses lecteurs une vue complète, précise et rigoureuse des flux d’immigration, des problèmes qu’elle soulève effectivement, même si une des conclusions d’une étude récente sur les résultats, est en partie positive sur l’intégration à la française.

Dans ce domaine aujourd’hui sensible de l’immigration, il faut jouer carte sur tables, sauf à continuer à empoisonner le débat politique, économique, et social, et la France n’a vraiment pas besoin de cela.

Jean Pierre Renaud

Délinquance, immigration et culture: les avis de MM.Fassin (Libé du 27/09 et le Monde du 30/09/10

Mélange des genres entre science et politique ?

Sujet : délinquance, immigration et culture

En réponse critique de l’ouvrage « Déni des cultures » – H.Lagrange

Corrélation entre le contenu des contributions et les travaux de leurs signataires ?

Textes E.Fassin (Libé du 27/09/10) : « La famille noire est toujours un problème pour ce culturalisme » – D.Fassin et E.Fassin (Le Monde du 30/09/10) : « Misère du culturalisme. Cessons d’imputer les problèmes aux étrangers »

            Au demeurant, des contributions claires et bien écrites, qui abordent un sujet très classique pour les spécialistes, la relation, sinon la corrélation existant entre misère sociale et délinquance, avec le « piment » supplémentaire du racisme, et tout autant pour leurs auteurs, celui de la « culture ».

            Est-ce qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle sorte de terrorisme intellectuel et idéologique que d’interdire à d’autres chercheurs, pas nécessairement incompétents et partiaux, d’avancer des thèses qui déplaisent à une partie de la communauté intellectuelle, quelquefois dominante, et donc de déranger effectivement des tabous ?

            Je serais donc un électeur de droite, conservateur, parce que j’adhérerais en partie à la démonstration contestée, sans obligatoirement me référer à l’expérience américaine, alors que la ségrégation « officielle » y est encore très fraîche, et que le questionnement de M.Lagrange porte sur des phénomènes d’immigration jusques là inconnus dans notre pays ?

            Les deux contributions en question accusent tout simplement l’auteur de partager des idées de la droite conservatrice, alors que la problématique des « ghettos »  concentre évidemment un ensemble de facteurs que, ni la gauche, ni la droite, n’ont eu le courage de traiter depuis trente ans.

            Alors, il faudrait ignorer le facteur culturel dans les villes qui contiennent une proportion importante de français d’origine immigrée ?

Sous le prétexte que : « Or la longue histoire de la question sociale nous enseigne que le culturalisme de la misère qui prétend rendre compte des différences et des inégalités par l’origine ne fait jamais autre chose que trahir la misère du culturalisme » (Le Monde-page 23)

            Je serais donc un « lépéniste » qui s’ignore, au même titre que je serais un « colonialiste » sans le savoir, parce que je souffrirais de « la persistance d’une figure de l’indigène logée » dans mon corps. (Le livre « Fracture coloniale, page 200).

Parce que je partagerais les inquiétudes de citoyens français qui habitent encore des « ghettos », dont ils ont vu les dérives sociales et culturelles de toute sorte se développer au cours des quinze ou vingt dernières années ? Il faut interroger ces citoyens français, qu’ils soient de souche, comme on dit, ou d’origine immigrée.

            Est-ce que M.Konaté aurait pris sa carte à l’UMP pour avoir osé décrire dans son livre récent « L’Afrique est-elle maudite »,  une situation sociale et culturelle qui donne du crédit aux observations du sociologue ?

            Et enfin pourquoi la  « médecine » sociale s’interdirait-elle d’effectuer des recherches sérieuses, et démontrées statistiquement, sur ce que certains pourraient dénommer une immigration de type « invasif » à laquelle beaucoup de  communautés humaines sont confrontées, en Europe, en Asie, ou en Afrique, et proposer des outils de solution ?

Jean Pierre Renaud

Les non-dits des bien pensants: immigration, insertion et culture: le travail de M. Lagrange

Les non-dits des bien-pensants

« Ma position scientifique est qu’il vaut mieux dire les choses, même si elles nous gênent » (H.Lagrange)

Fracture sociale, culturelle ou coloniale, dans nos quartiers sensibles ?

« Un chercheur lance le débat sur l’impact de l’immigration dans les quartiers ghettoïsés. »

            Le Monde du 14 septembre 2010 consacre sa page 12 aux travaux d’un sociologue sur la jeunesse des quartiers sensibles de Mantes la Jolie et des Mureaux, 4 000 cas d’adolescents examinés en détail entre 1999 et 2006.

            Un de ses constats est qu’il existe une corrélation incontestable entre l’origine familiale des adolescents délinquants et la délinquance : « les adolescents éduqués dans des familles du Sahel sont trois à quatre fois plus souvent impliqués comme auteurs de délits que les adolescents élevés dans des familles autochtones »

            Il relève également que les adolescents d’origine maghrébine sont deux fois plus impliqués que les « autochtones ».

            Puis-je indiquer que dans les milieux bien informés, politiques, médiatiques, administratifs, et judiciaires, le même constat a été fait depuis longtemps ?

            Le sociologue défend une thèse qui ne va pas plaire à tout le monde, étant donné qu’un certain nombre d’intellectuels et de politiques ont plaidé jusqu’à présent pour une causalité sociale ou « coloniale » de ces phénomènes, alors qu’il introduit dans l’analyse sociologique la variable importante de la culture, et plus précisément du rôle des femmes, des mères de famille.

            « Or, souligne le chercheur, le caractère le plus prédictif de la réussite scolaire reste le niveau culturel de la mère et son insertion professionnelle. » « Il faut agir en amont avec les mères ».

            Je recommande aux lecteurs curieux la lecture du livre de M.Konaté « L’Afrique est-elle maudite ? » pour mieux apprécier le distinguo que le sociologue fait entre adolescents d’origine sahélienne et d’origine côtière, et surtout pour mieux apprécier le bien-fondé de cette analyse, qui a naturellement soulevé aussitôt une polémique de la part d’associations qui ne prennent pas toujours leurs responsabilités pour lever ce type d’obstacle culturel.

            Je laisse par ailleurs aux promoteurs de la « fracture coloniale » et aux médias qui propagent cette thèse jamais démontrée, le soin de mettre à jour leurs « stéréotypes » et sans doute aussi, «  leur inconscient collectif » cher à des historiens « coloniaux » qui n’ont jamais apporté la moindre démonstration statistique à ce sujet.

Jean Pierre Renaud.