Les hauts-fonctionnaires : l’ancien monde, le nouveau monde ou l’entre-deux monde ? Quatrième, Cinquième, et Troisième République

Les hauts fonctionnaires : l’ancien monde, le nouveau monde ou l’entre-deux monde ?

1 – Quatrième et Cinquième République

2- Troisième République avec l’ ancien haut-fonctionnaire Tardieu

&

1 – Quatrième et Cinquième République

            Le  début de l’année 2019 a été marqué par une avalanche de révélations sur les rémunérations des hauts fonctionnaires, qu’ils exercent des fonctions de direction dans les administrations centrales ou territoriales ou dans des services industriels ou commerciaux relevant de l’Etat, ou encore à la tête d’autorités administratives et publiques indépendantes.

            Tout au long de ma carrière, j’ai observé l’évolution de l’état d’esprit de cette « caste dominante de gens très influents », ainsi dénommée par Mme Le Branchu, gagnée de plus en plus par l’appétit du « fric », beaucoup plus que par l’esprit de servir le pays : en résumé, je sors de l’ENA, plutôt dans les grands corps, j’alimente rapidement mon carnet d’adresses, le sésame, en passant rapidement quelques années dans un cabinet ministériel, et je prends le vent du large…

            Résultat, une haute fonction publique de plus en plus perméable aux tentations de l’argent, souvent gangrenée par un autre mal, celui du mélange des genres dans un même couple, entre public et privé, sans que personne ne s’en offusque, même quand il s’agit de secteurs sensibles.

            Comme le relevait le Canard Enchaîné dans un article intitulé « Le bazar chez les cumulards » : « … c’est l’ancien ministre Jacques Toubon qui décroche le pompon… Le total pourrait avoisiner les 30 000 euros mensuels…

           Le défenseur des droits a bien défendu les siens. »

       Ce  débat pose utilement un certain nombre de bonnes questions sur le sens du service public, et sur son évolution au fur et à mesure des années après sa refondation complète par une élite issue de la Résistance en 1945, et la création de l’ENA, considérée alors comme le symbole républicain de la haute fonction publique, en concurrence avec d’autres grandes écoles, Normale Sup, Polytechnique, Saint Cyr, ou encore l’ENFOM, condamnée à disparaître, avec la disparition de l’Empire.

       Le cas Toubon soulève à titre complémentaire deux autres questions d’un autre ordre, à savoir la possibilité du cumul d’une haute fonction publique avec une retraite de haut fonctionnaire, ou d’élu, d’une part, et d’autre part sur l’éthique du service public.

      C’est le cas par exemple, et sauf erreur, des anciens hauts fonctionnaires qui siègent au Conseil Constitutionnel, arbitre des plus hautes élégances juridiques : il est évident que ce type de situation conduit à s’interroger sur la conception du service public qui justifie une telle situation.

        Ce type de nomination trouverait-il son explication dans une conception étrange d’un cursus de haut fonctionnaire, qui classerait le Conseil Constitutionnel, non pas comme une Cour Suprême du modèle européen, mais comme le dernier échelon d’une carrière politico-administrative ?

       Le Figaro du 22 janvier 2019 a proposé dans ses pages 14 et 15 un bon éclairage de ce sujet à la fois complexe et sensible sous le titre « Plongée au sein des très généreuses institutions de la République « 

            Certaines déclarations de hauts fonctionnaires m’ont laissé rêveur, celle de l’ancien Vice-Président du Conseil d’État : « Quel État voulons-nous ? Un Etat paupérisé ou attractif ? Est-ce que  le service de l’intérêt général et du bien commun doit être pénalisé au regard des activités industrielles ou commerciales du secteur marchand ?

            Celle du Gouverneur de la Banque de France jugeant : « blessant pour les fonctionnaires qui ont choisi de s’engager  dans le public plutôt que de gagner nettement plus en entreprise, qu’on leur jette à la figure les trois fromages restants (sic)… »

   Est-ce que ces hauts-fonctionnaires exemplaires sont un exemple pour une jeunesse avide de servir son pays, sans avoir l’obsession du fric, comme ce fut le cas pour nombre d’anciens ?

       Que doit-on alors penser des officiers, militaires, des professeurs, des policiers, des médecins de nos hôpitaux qui ne bénéficient pas du même sort ?

     Est-ce que l’on ne mélange pas le régalien et les marchands des services industriels ou commerciaux relevant de l’État ?

         Que penser aussi des centaines de milliers de Français et de Françaises qui se dévouent jour et nuit au service du bien public, au « prix » de modestes salaires ?

      De quelle France est-il question, de la France « paupérisée » ou « blessée » ?

        Jean Pierre Renaud

PS : beaucoup d’initiés peuvent mettre des noms sur de nombreux transfuges de la haute fonction publique passant dans l’entre-deux monde de façon plus ou moins précoce dans leur courte ou longue carrière, et quelque soient leurs affinités politiques supposées ou affichées, soit pour aller dans le grand business bancaire français ou étranger, fusse en Suisse, ou d’autres grands business privés, y compris le « social », avec une  petite ou grosse fortune à la clé.

Humeur Tique: CAC 40 et rémunérations des PDG anciens hauts fonctionnaires

         Les journaux ont publié les rémunérations des PDG des grandes sociétés du CAC 40, et les lecteurs ont été ravis d’apprendre que les rémunérations de la plupart d’entre eux ont baissé d’une année sur l’autre, de l’ordre de 14% si le chiffre est exact, sur des ordres de grandeur de 200, ou 300 fois le SMIC. Les lecteurs auront donc pu remarquer que certains journaux ont présenté la chose en titrant sur le « moins 14% »

Comment ne pas être choqué par le montant de ces rémunérations, d’autant plus choqué, lorsque les PDG en question, ont fréquenté les grandes écoles de la République, garni leurs carnets d’adresses dans des cabinets ministériels, et n’ont pas été les créateurs de l’entreprise qu’ils managent ?

Dans quelle République sommes-nous ?