Droit de vote des étrangers ? Pour ou Contre ?
Suffrage universel ou communautaire ?
Comment éclairer notre route ?
Dans son programme, le candidat Hollande a inscrit l’attribution du droit de vote aux étrangers (hors Union Européenne) résidant en France depuis plus de cinq ans, pour les élections municipales. Le Parti Socialiste vient de relancer le débat.
Il n’est pas interdit d’examiner les arguments qui sont le plus souvent avancés sur un sujet aussi sensible.
Les socialistes répètent à l’envi que Mitterrand avait déjà inscrit cette proposition dans ses engagements de campagne pour l’élection présidentielle de 1981, une promesse qu’il n’a pas tenue.
Il est possible de remarquer qu’entre 1981 et 2013, la situation démographique de la France a beaucoup changé du fait de l’immigration, et que certains départements ou communes comptent un nombre important, soit de citoyens français d’origine étrangère, soit d’étrangers en séjour régulier et résidant en France depuis plus de cinq ans.
Il est évident que ce dossier ne peut être examiné sans transparence et sans affichage des statistiques du corps électoral nécessaires pour mesurer les effets éventuels d’une telle mesure.
Quid des conséquences de cet élargissement du corps électoral sur le résultat des élections ?
Autre argument, les socialistes répètent que ce type de mesure permettra un mieux vivre ensemble, donc de lutter contre le communautarisme,mais comment la République fera en sorte que, dans telle ou telle commune, où le nombre des étrangers est important, par exemple en banlieue parisienne, ou dans des départements comme Mayotte ou la Guyane, les membres de cette ou de ces communautés ne proposent pas de voter pour une liste de candidats appartenant à une communauté, avec une possibilité de sièges, et de toute façon, d’arbitrage des élections municipales ?
La restriction légale, proposée, qui les priverait du droit de pouvoir accéder aux fonctions de maire ou d’adjoint, ne parait pas suffisante pour éviter une dérive communautaire de ces élections.
Cette proposition fait d’ailleurs l’impasse sur les statistiques encore tabou des citoyens qui ont la double nationalité, alors que la connaissance de ce type de données serait utile également pour pouvoir apprécier les tenants et aboutissants d’un tel élargissement des droits politiques.
Motif supplémentaire pour mettre sur la table, commune par commune, toutes statistiques utiles à une meilleure connaissance du sujet et des effets d’une telle proposition.
Avant toute décision, les Préfets devraient être invités à réunir ces éléments statistiques dans les communes importantes où l’effectif des habitants et des résidents d’origine étrangère est important, et les publier.
Les services préfectoraux ont une longue expérience de la prévision plus ou moins fiable des scrutins électoraux, mais ici leur travail sera plus facile puisqu’il ne s’agit pas de prévision, mais de récolte des chiffres commune par commune, avec l’affichage des résultats.
Sans disposer de tous ces éléments de connaissance et d’appréciation du dossier, dont disposent peut-être déjà le gouvernement ou le Parlement, une telle mesure parait encore prématurée.
L’idée de faire participer les résidents étrangers de plus de cinq ans payant leurs impôts aux élections municipales est sans doute une idée novatrice et intéressante, mais encore faut-il avoir toutes les informations utiles avant d’élargir le corps électoral.
Pourquoi ne pas expérimenter une solution intermédiaire qui donnerait à ces nouveaux électeurs la possibilité d’élire un conseil des résidents étrangers, avec avis de consultation obligatoire sur les ordres du jour du conseil municipal, avis obligatoirement communiqué à ce conseil municipal avant de passer à l’ordre du jour ?
Sur des sujets institutionnels aussi complexes, pourquoi ne pas expérimenter avant d’aller plus loin ? Et avant toute chose, connaître les enjeux statistiques du choix qui pourrait être fait.
Jean Pierre Renaud