SUBVERSION ET POUVOIR – TRUCS ET TRUQUAGES

V –  Trucs et truquages des scènes du théâtre d’opérations de la subversion : subversion, inversion et perversion !

          Mots et slogans détournés, les mots flash qui fâchent !

        Imprécations et anathèmes ! Détournement du sens des mots ! Faux mémoriels ou historiques !

          Les couples de mots toxiques !

Le colonialisme : certains chercheurs, historiens ou mémorialistes postcoloniaux ont fait tout un plat du colonialisme, de sa violence ou de ses vices, en laissant accroire, soit par ignorance, soit par idéologie, soit tout simplement par intérêt, que l’Occident avait exercé une sorte de monopole du colonialisme à travers les âges, pratiqué une sorte de viol de peuples qui connaissaient alors une bienfaisante paix civile, religieuse, ou culturelle. 

     Ajoutons que pour ces idéologues la France a été évidemment le champion du colonialisme.

Origines et identités : comment ne pas remarquer qu’au fur et à mesure des années, dans notre pays, des minorités agissantes  se sont plaintes de voir leurs origines ou identités bafouées ? Sans avoir l’honnêteté intellectuelle de remarquer que leur pays d’accueil ou de naissance était le fruit d’un très long passé historique habitué depuis des siècles à ouvrir sa culture à d’autres cultures, à la condition qu’elles respectent nos libertés et notre droit des hommes et des femmes.

          Il faut leur dire : Soyez fier de vos origines, mais respectez tout autant les origines de la société qui vous a accueilli ou donné naissance !

Le racisme, les blancs sont racistes : vaste sujet !

       D’autant plus vaste que le sens historique de ce terme a évolué, que dans notre société le racisme est condamné, qu’à titre individuel ou familial, il existe maints exemples de l’inexistence du phénomène, sauf à dire qu’avec l’évolution démographique, l’importance des flux migratoires dans certaines de nos cités, une bonne cohabitation de populations de toutes origines n’est pas toujours facile ou pacifique, d’autant plus quand les citoyens de notre pays ont eu maintes fois l’occasion de constater que beaucoup d’étrangers entraient chez nous sans y être autorisés, en quelque sorte par effraction.

        Indiquons par ailleurs que les pays d’origine de ces contempteurs patentés ne sont pas exempts de racisme, hier et encore aujourd’hui en Afrique, en Asie, ou au Moyen Orient,  pour ne pas parler du racisme russe ou américain.

        Qui oserait prétendre que l’on ignore tout racisme sur le fleuve Niger, au Sahel, sur la Betsiboka, ou sur les rives du Maghreb ?

      Cessez donc de manipuler l’opinion publique !

L’esclavage, oui parlons de l’esclavage !

     Les esprits les plus objectifs savent que les premiers explorateurs ou officiers qui ont découvert l’Afrique, pour ne parler que de ce continent, y ont rencontré des royaumes ou des tribus qui pratiquaient encore l’esclavage  bien après l’interdiction internationale des trafics d’esclaves, pour ne pas citer d’autres pratiques encore plus révoltantes.

      L’historien Pétré-Grenouilleau a fait l’objet d’une sorte de « fatwa » intellectuelle de la part de ces groupes politico-intellectuels qui rament sur la mauvaise conscience, la réparation des péchés, et pour solde de tout compte, de la monnaie sonnante et trébuchante, à l’exemple de certains animateurs du mouvement dit des Indigènes de la République, car il ne faut pas continuer à cacher que l’esclavage  était encore vivace en  Afrique et à Madagascar, à la fin du dix-neuvième siècle.

        Qui plus est, l’histoire des trafics d’esclaves d’Afrique noire, à destination du Maghreb ou des pays arabes, a fait longtemps l’objet d’un tabou, de même que de nos jours, la prudence et la réserve que manifestent certaines universités africaines sur le sujet, en tout cas, celle de Dakar, comme c’était encore le cas il y a quelques années.

Aujourd’hui, l’islamophobie, mais il n’était pas question d’Islam, de voile, de mosquées dans nos sociétés, il y a cinquante ans.

      Cherchez en les raisons sous le nouveau masque de la propagande !

     Est islamophobe le citoyen ou la citoyenne qui est opposé  à  la transformation de notre pays démocratique et laïc en régime théocratique,  le pouvoir étant détenu par des imams venus d’ailleurs, un saut rétrograde pour le fameux « état de droit » dont se gargarisent à tout bout de champ nos hommes politiques, un état de droit qui, à la vérité, sert souvent de parapluie à l’expansion de l’islam dans notre pays, et au terrorisme.

      Islamophobe celle ou celui qui refuse de voir le statut des femmes, fruit d’un long combat, qui n’est d’ailleurs pas fini, rétrograder dans un pays de libertés.

       En France, les initiés savent qu’il y aurait plus de cinquante mille femmes excisées, et le combat pour l’égalité des sexes est permanent.

       Il n’y a que les imbéciles pour ne pas voir que depuis des années des prédicateurs influents, souvent d’origine étrangère, font pression dans nos villes pour imposer le voile aux femmes d’origine musulmane, comme signe religieux, comme aux petites filles dans nos écoles publiques.

     L’anathème d’islamophobe est lancé pour cacher le véritable objectif de cette nouvelle propagande de subversion de notre état de droit et de nos libertés, de les toucher au cœur.

     A titre d’anecdote, il fut un temps où le maire socialiste du XVIIIème arrondissement à Paris, ancien ministre de l’Intérieur, fermait les yeux sur des attroupements de prières dans la rue.

      Il est tout de même curieux de voir de belles âmes protester contre les conditions de détention de terroristes qui ont assassiné, estropié hommes, femmes et enfants, des terroristes ennemis de notre pays qui bénéficient de toutes les garanties de notre état de droit, aux frais des contribuables et de nos morts et blessés.

Les couples de mots toxiques

     Plus de cinquante ans après leur indépendance, quelques groupes de pression actifs animés aussi bien par des animateurs venus des anciennes colonies, surtout d’Afrique, de première ou de deuxième génération, que par d’autres animateurs de métropole dont les mobiles sont divers, envoient à pleine volée des couples de mots toxiques tels que repentance-assistance, ou culpabilité- réparation.

Jean Pierre Renaud   –   Tous droits réservés

Esclavage et colonisation, mémoire ou histoire, pourquoi ne pas tout mélanger?

Esclavage et colonisation, mémoire ou histoire, pourquoi ne pas tout mélanger ?

Réparations et repentance ?

Les pérégrinations du roi Hollande dans les Caraïbes, ses multiples déclarations, associées au remue-ménage causé par la réforme du collège sur les programmes d’histoire ont une fois de plus provoqué beaucoup de réactions dans les milieux politiques, médiatiques, et intellectuels.

Guillaume Goubert dans la Croix du 12 mai 2015, intitulait son éditorial :

« Repentance et fierté

Les examens de conscience sur la colonisation ou la traite négrière suscitent de vives réactions »

De son côté, Le Monde du 14 mai 2015, publiait une chronique relative à la réforme du programme du collège (page 7), avec un premier article, « Le programme d’histoire idéal n’existe pas » et un deuxième article, « Des historiens dénoncent lacunes et manque de cohérence », dans lequel le journal donnait la parole à M.Nora, lequel déclarait :

« Il faudrait faire en sorte que « les enfants de France aient de bonnes raisons de se sentir français », plaide-t-il, en déplorant « un penchant à l’exagération dans le masochisme national et colonial. »

Puis à M. Winorcka en rappelant sa mise en garde, dans le Journal du Dimanche, contre le risque de transformer l’histoire en morale. « Indigènes de la République, Vendéens, anciens combattants, Arméniens, descendants d’esclaves… tous ces groupes revendiquent leur place dans l’histoire. Le danger est de transformer l’histoire en histoire des victimes. »

Evoquons successivement les deux sujets de l’esclavage et de la colonisation.

Les esclavages, au pluriel

M.Hollande a été inaugurer un musée sur l’esclavage en Guadeloupe. Très bien ! Mais qu’il le veuille ou non, ou le souhaite-il peut-être, cette commémoration faite à coup de grosses trompettes, pourrait laisser croire aux ignorants, que la France a joué un rôle majeur dans la traite des esclaves des Caraïbes et des côtes américaines, en faisant l’impasse sur les traites de marque anglo-saxonne beaucoup plus importantes.

Une France toujours au premier rang pour commémorer les destinées tragiques de toutes les victimes, la seule à l’assumer, dans le cas des Caraïbes ?

L’histoire ferait ainsi l’impasse sur tous les autres flux de la traite négrière, ceux dirigés vers les pays de l’est arabe et musulman, et en premier lieu sur ceux qui ont nourri ce trafic humain, c’est-à-dire ceux d’origine africaine elle-même ?

Il n’est pas besoin d’avoir beaucoup lu de récits sur l’état du continent africain, notamment dans ses territoires de l’ouest pour savoir que beaucoup de ses émirs, Almamy, et rois, avaient l’habitude de procéder souvent à des razzias d’esclaves destinés à alimenter leurs armées, leur cour, ou la traite négrière elle-même.

Pourquoi ne pas rappeler qu’à la fin du dix-neuvième siècle, et pour la seule Afrique de l’Ouest, devenue « provisoirement » française, les Almamy Samory et Ahmadou, ainsi que le roi Béhanzin d’Abomey, étaient des esclavagistes, ce dernier, à quelques encablures du fameux port de Ouidah, commémoré de nos jours comme un des hauts lieux de mémoire de l’esclavage ?

Pourquoi ne pas rappeler aussi qu’une fois les conquêtes faites, la France a supprimé l’esclavage qui sévissait dans ses nouvelles colonies, dans des conditions qui n’ont pas toujours été satisfaisantes, compte tenu de toutes les difficultés d’application de ces mesures, liées à la fois à la culture des sociétés africaines et à leur pauvreté ?

Qui, en France, de nos jours sait par exemple, que c’est Gallieni qui a supprimé en 1896 l’esclavage à Madagascar ?

Alors, oui, il est nécessaire de rappeler la mémoire de cette traite abominable, mais en ne laissant pas dans l’ombre, les responsabilités des différents « partenaires », au risque de laisser croire, peut-être à juste titre, que derrière ce débat se cache l’épineuse et insoluble question des réparations financières, doublée d’une sempiternelle demande d’assistance que justifierait ce passé.

Lors de son passage en Guadeloupe, le Président a tenu des propos fort imprudents en ce qui concerne un vieux contentieux avec Haïti, qu’il a d’ailleurs aussitôt démenti en faisant une escale dans cette île.

Rappelons le compte rendu qu’en a fait le journal Le Monde, le 12 mai 2015, dans l’article intitulé : « Hollande aux Antilles, c’est Noël en mai »

Le 14 mai, le même journal titrait en première page « Haïti – Hollande reconnait la « dette morale » de la France », mais le compte-rendu du même journal notait « Des propos du chef de l’Etat avaient laissé espérer aux Haïtiens des réparations financières »

« Des manifestants affichaient une pancarte indiquant leurs exigences : « Argent oui, morale non »,

Le journal intitulait d’ailleurs une partie de sa chronique :

« Gaffe d’envergure »

Le journal Ouest France du 12 mai 2015, proposait sa lecture de l’escale du Président à Cuba (page 2) :

« Sauf qu’en réalité, personne n’a attendu le conquistador Hollande, escorté par sept ministres et une escouade de dirigeants d’entreprises (Accor, GDG Suez…), François Hollande est donc plutôt en mission de rattrapage. Il n’empêche, sa prétention à damer le pion aux Occidentaux agace : « Cuba c’est un très petit marché. Un pays de 11,5 millions d’habitants, la moitié de l’Ohio » minorait, hier, à Paris, Stefen Selig, le sous- secrétaire d’Etat américain au commerce. »

Colonisation et repentance

Il s’agit très largement d’un débat « pourri » pour tout un ensemble de raisons, avec au moins quatre principales :

Première raison principale : l’histoire de l’Algérie, avec la ou les mémoires de la guerre d’Algérie !

A lire ou à écouter certains historiens, intellectuels, ou politiques, l’histoire de la colonisation se résumerait à celle de l’Algérie, et encore plus à celle de la guerre d’Algérie.

Un historien de l’Algérie, aujourd’hui très bien en cour, développe ce type de discours ambigu.

Une nouvelle propagande qui pourrait laisser croire que dans cette guerre, tout était noir du côté français, et tout était blanc du côté rebelle, que les « saloperies », pour ne pas dire les crimes de guerre, n’ont été commises que dans un camp, ce qui est évidemment faux.

Pour avoir servi la France en Algérie, comme officier du contingent dans les SAS, je regrette depuis longtemps que les Accords d’Evian qui ont scellé l’indépendance de l’Algérie aient stipulé que toutes les exactions commises pendant ce conflit seraient amnistiées.

A la vérité, des crimes de guerre ont été commis dans les deux camps et si ladite repentance devait se manifester elle devrait l’être par tous ceux qui, au service de la France, ou au service du FLN, en ont été les auteurs.

Beaucoup de ceux qui ont servi la France en Algérie n’ont pas commis de crime de guerre, le seul crime dont il serait possible de les accuser est celui d’avoir servi la France.

En serait-il de même dans l’autre camp avec les attentats et l’assassinat en particulier des membres du MNA, les vendettas de clans, ou enfin l’assassinat de nos harkis ?

Deuxième raison principale, et en dépit de ceux ou celles qui racontent, le plus souvent « d’en haut » (autre façon d’exprimer l’ethnocentrisme blanc), avec un parti pris idéologique ou politique, et au dire des « témoins » dits d’« en bas », la colonisation n’a pas non plus été, ou tout noire, ou tout blanche, mais mélangée, mixte, avec des ombres mais aussi des lumières.

Je ne citerai à ce sujet que le seul témoignage d’Hampâté Bâ, ce grand lettré d’une Afrique occidentale, anciennement française :

« Une entreprise de colonisation n’est jamais une entreprise philanthropique, sinon en paroles… Mais, comme il est dit dans le conte Kaïdara, toute chose a nécessairement une face diurne et une face nocturne. Rien, en ce bas monde, n’est jamais mauvais de A jusqu’à Z et la colonisation eut aussi des aspects positifs, qui ne nous étaient peut-être pas destinés à l’origine mais dont nous avons hérité et qu’il nous appartient d’utiliser au mieux. Parmi eux, je citerai surtout l’héritage de la langue du colonisateur en tant qu’instrument précieux de communication entre ethnies qui ne parlaient pas la même langue et moyen d’ouverture sur le monde extérieur – à condition de ne pas laisser mourir les langues locales, qui sont le véhicule de notre culture et de notre identité. » (« Amkoullel, l’enfant peul » Babel, page 492).

En ce qui concerne l’analyse récente des problématiques de citoyenneté par Frederick Cooper, un historien « d’en haut », parce qu’appartenant au monde occidental, tend à démontrer qu’en 1945, les « évolués », politiques ou syndicalistes du monde africain aspiraient à la citoyenneté française, en dépit de tous les « méfaits » de la colonisation.

Il est notoire qu’avant, mais tardivement, surtout après les indépendances, les intellectuels des nouveaux Etats d’Afrique noire se sont efforcés, avec plus ou moins de succès, d’écrire ou de réécrire leur roman national, à l’exemple de ce que la France a su faire pour son propre roman national, mais avec beaucoup plus de difficulté dans les contrées où la source principale des histoires ou de l’histoire reposait sur les épaules des griots, c’est-à-dire des traditions orales.

Troisième raison principale, une ignorance béante de l’histoire coloniale aussi bien de la part des citoyens de la plupart des anciens pays colonisés, de leurs descendants en France, que des Français eux-mêmes !

C’est la raison pour laquelle il est possible de nos jours de dire ou d’écrire n’importe quoi, et cette ignorance fait le lit d’une nouvelle propagande postcoloniale qui est d’autant plus efficace qu’elle nourrit le cahier de doléances permamentes de certains partis politiques de métropole ou d’outre-mer.

Un ou plusieurs courants de chercheurs, plus ou moins pertinents, avec l’appui d’intellectuels ou de politiques, surfent de nos jours sur la mauvaise conscience, un humanitarisme sympathique qui est venu fort opportunément se substituer au marxisme, des adeptes affichés ou clandestins de la fameuse repentance nationale.

Ils feraient bien d’aller porter la bonne parole dans le monde anglo-saxon, russe, ou chinois…

Quatrième raison principale : des enjeux électoraux ou financiers trop souvent cachés, aussi bien dans nos outre-mer actuels que dans certaines banlieues françaises.

A lire les journaux ou à regarder la télévision, le dernier voyage du Président Hollande a été un modèle de propagande électorale, déjà pour 2017, mais ses prédécesseurs ne faisaient pas mal non plus dans le genre.

Les électeurs auraient sans doute été intéressés par un reportage circonstancié et fouillé sur les paradis fiscaux et mondains de certains outre-mer français, entre autres ceux des îles Saint Martin et Saint Barthélemy, « Saint Barth » pour les intimes !

Ajoutons qu’à l’arrière-plan de beaucoup de revendications « hallucinées », se profilent souvent des questions de gros sous, et en ce qui concerne certains acteurs des outre-mer français anciens, une demande d’assistance permanente qui trouverait sa justification dans les péchés coloniaux de la France.

Jean Pierre Renaud

Humeur Tique au fil des jours, esclavage, laïcité, Grande Bretagne

Humeur Tique au fil des jours

Mémoires et histoires de l’esclavage ? En récompense de sa tournée « triomphale » dans les Caraïbes, un « Noël en mai » pour le journal Le Monde, notre Président mérite incontestablement la Palme d’Or de toute l’histoire de l’esclavage, en concurrence avec celle de Cannes, pour avoir fait assumer par la France tout le poids de l’histoire et des mémoires de l’esclavage des Amériques, d’Afrique, ou d’Asie.

Les Antilles françaises auraient mérité mieux : pourquoi ne pas avoir décidé de les doter d’un commissariat au plan et au développement afin de les aider à s’assumer dans le contexte économique de l’Amérique centrale ?

Laïcité et islamophobie ? Pourquoi s’étonner de constater qu’une laïcité de plus en plus militante se met à défendre une laïcité des institutions publiques chèrement acquise au début du 20ème siècle, gage de notre paix civile ?

Pourquoi ce nouveau militantisme se verrait accusé à tort, et à tout bout de champ, d’islamophobie, alors que depuis une dizaine d’années une fraction de musulmans, citoyens français ou non, encourage, comme cela n’a jamais été le cas auparavant, au choix , le respect du Ramadan, la viande hallal, ou le port de tenues ou de voiles qui tendent à afficher et à affirmer la position religieuse des jeunes filles et des femmes musulmanes.

Tout cela après une lutte séculaire en faveur de l’égalité des deux sexes féminin et masculin ?

La Grande Bretagne de Cameron ? En Europe ou en dehors ?

Pourquoi s’accrocher aux basques de la Grande Bretagne qui continument, avant son entrée dans l’Union européenne et après, milite pour que cette union ne forme qu’un marché libéral de plus en plus vaste ?

La véritable question posée est celle de savoir s’il existe dans l’Union européenne des pays qui entendent donner un destin à notre vieille Europe et qui auront le courage d’aller de l’avant vers une véritable union politique, avec un Président élu par les citoyens, une politique économique et étrangère commune, et naturellement une défense commune.

Si avec ce qui s’est passé en Ukraine, et qui continue de se passer, les Européens n’ont pas encore compris quel sort leur était promis, alors oui, il faudra bien parler d’une décadence de l’Europe !

Jean Pierre Renaud

Gallieni et Lyautey, ces inconnus. Gallieni à Madagascar: les problèmes politiques

Gallieni et Lyautey, ces inconnus !

Eclats de vie coloniale

Morceaux choisis

16

Gallieni à Madagascar : les problèmes politiques

         Les pages qui viennent d’être consacrées aux « œuvres » de Gallieni seraient sans doute incomplètes, s’il n’était fait mention, en finale, des problèmes politiques que le Gouverneur général rencontra pour les mener à bonne fin : l’abolition de l’esclavage, l’action des églises et des missions, les caractéristiques de la nouvelle société coloniale, les colons et le groupe de pression de la Réunion.

            L’abolition de l’esclavage

 Il convient de rappeler que l’esclavage constituait une des caractéristiques du fonctionnement de la plupart des sociétés africaines, sinon de leur totalité, à l’époque des conquêtes de la Troisième République.

            C’était aussi le cas à Madagascar et la décision d’abolition qui fut prise avant l’arrivée du général à Tananarive créa des difficultés inévitables dans l’ensemble du corps social et économique de l’île, identiques à celles que causa la même mesure dans les autres sociétés d’Afrique concernées.

            Dans le livre que nous avons déjà cité, le colonel Charbonnel donnait sa version de cette abolition décidée par M.Laroche, qui était alors le Résident Général de France à Madagascar, et que Gallieni venait remplacer :

        « M.Laroche s’était flatté de rester Résident Général, Gallieni succédant simplement au général Voyron. Quand il comprit qu’il fallait y renoncer, il prit par dépit, à la veille de la remise de ses pouvoirs, une mesure d’une extrême gravité, l’abolition de l’esclavage. »

Il est évident que cette mesure devait être prise un jour ou l’autre, même si elle devait être la source de beaucoup de difficultés dans l’ensemble de la société malgache, mais elle n’avait pas été préparée.

        Le colonel dépeignait  l’esclavage alors existant de façon peut être trop idyllique :

      «  A Madagascar, il était fort doux. Tout esclave était libre de travailler à son compte où et comme il l’entendait, avec la seule obligation de verser à son maître un impôt mensuel de cinq francs. Moyennant trois cents francs, il pouvait acheter sa liberté…. En contrepartie, le maître était tenu de soigner et de nourrir l’esclave tombé malade ou devenu vieux et surtout, ce à quoi les malgaches tenaient essentiellement, le maître avait l’obligation d’assurer, à la mort de son esclave, le transport de son corps au tombeau familial… Avoir des esclaves était un placement à 10% de l’an… »

        Donc un rapport d’argent qui était tout de même confortable !

     « La brusque suppression de l’esclavage fut d’abord bien accueillie par les libérés valides. Très vite les maîtres déclarèrent que, leurs recettes taries, ils ne pouvaient plus remplir leurs obligations. Les milieux qui nous étaient hostiles, notamment ceux touchant à la Cour, répandirent le bruit que les Français condamnaient les vieux esclaves à mourir de faim et à être inhumés n’importe où, comme des chiens. En quelques semaines, le nombre des rebelles doubla. » (C/p,45)

       Gallieni institua le système des corvées afin de trouver la main d’œuvre nécessaire aussi bien au secteur public qu’au secteur privé, mais Gallieni prit ensuite des mesures pour mettre fin au détournement du nouveau système mis en place.

     Le problème de la main d’œuvre fut un problème récurrent tout au long de la période coloniale, et les formules de travail contraint que l’administration coloniale mit en œuvre, notamment, le SMOTIG,  n’étaient pas très éloignées de l’ancien servage.

La puissance des églises et des missions

    Les missions étrangères, majoritairement protestantes et de mouvance  anglaise, occupaient une place importante dans la société des plateaux, notamment grâce aux nombreuses écoles confessionnelles qu’elles avaient déjà construites avant la conquête française.

      Gallieni évoqua le sujet dans de nombreuses lettres.

     Dans une lettre du 26 décembre 1903, au secrétaire général de l’Union Coloniale, il écrivait :

     « … Mais, je veux répondre simplement et brièvement encore à quelques-uns des griefs, présentés par votre correspondant anonyme qui, ou je me trompe fort, doit porter une robe de missionnaire catholique ou une redingote de pasteur, la première plutôt.

    Le contrat avec les Frères a été dénoncé en vertu des instructions très précises du ministre qui m’a prescrit, à moi comme à tous les autres  gouverneurs, de laïciser toutes nos écoles. Le moment était d’ailleurs venu où cette mesure pouvait être prise sans inconvénient, avec avantage même. Pendant les premières années de mon séjour à Madagascar j’ai réagi, et vous savez avec quelle vigueur, contre l’influence anglaise, en ne cessant de seconder par tous les moyens possibles la mission  catholique : subventions, dons d’argent et de terrains, conseils aux Malgaches, etc. Mais il n’est jamais entré dans mon idée de soutenir en quoi que ce soit l’œuvre religieuse de cette mission, et c’était cependant au développement de cette œuvre qu’était surtout employé le concours financier que je donnais aux Jésuites. Mais depuis, la situation a changé. La mission protestante française s’est solidement installée dans l’île….Vous voyez donc l’avantage de la suppression du contrat avec les Frères. Nous avons supprimé, du même coup, la subvention  aux écoles protestantes. Toutes ces écoles sont désormais soumises à la règle générale… »(GM/p,137)

     Dans une lettre du 1er juin 1904, Gallieni écrivait :

     « …je me suis toujours efforcé de me placer au-dessus des querelles religieuses. Mais j’ai vu bientôt que je faisais fausse route. Mais je n’ai jamais perdu de vue le programme que je m’étais tracé : faire de notre colonie une terre vraiment française et pouvant être utilisée dans l’intérêt de notre commerce, de notre industrie, de nos compatriotes. A l’origine, au moment de l’insurrection et pour réagir contre les tendances trop protestantes de mon prédécesseur, ce qui avait été mal interprété par nos Hovas, j’ai favorisé les missions catholiques françaises en leur accordant faveurs de toutes sortes, terrains, argent, main d’œuvre gratuite, etc. Mon tiroir est plein de lettres de remerciements et de gratitude.

Mais, j’ai vu bientôt que je faisais fausse route. Jésuites, frères et Sœurs me considéraient comme l’homme prédestiné, devant assurer dans l’île la ruine du protestantisme et la prééminence du catholicisme. Nous ne parlions pas le même langage. Je parlais de l’influence française, de l’organisation de la vie économique dans un sens français. On me répondait religion et catholicisme…

     D’où ces querelles religieuses qui ont absorbé tout mon temps pendant mon premier séjour et qui ont été si funestes à la paix intérieure de l’île, engendrant entre les villages, entre les familles, des haines qui se continueraient aujourd’hui, si je n’étais intervenu avec notre enseignement officiel. Nous n’étions plus les maîtres d’accomplir la tâche d’organisation et d’apaisement, que nous avions entreprises après la période d’anarchie que vous connaissez. Prêtres et pasteurs mettaient aux mains les populations de nos villages de l’Imerina et du Betsiléo. » (GLM/p, 153)

     Comment ne pas noter que les relations entre les églises et les autorités civiles de Madagascar ont toujours été « affectées » par le pouvoir et l’influence que ces églises exercent sur la vie de la grande île ?

     Les convulsions politiques actuelles sont encore marquées par ce facteur religieux capital.

Les colons

         Un sujet très sensible et sur lequel Gallieni nourrissait beaucoup trop d’illusions.

      S’il est vrai que la faible population de Madagascar pouvait laisser croire qu’il était possible d’y favoriser une colonisation européenne proprement dite, la réalité des faits fut très différente, en particulier sur le plan agricole, car le climat et les conditions sanitaires de vie sur la côte orientale,  la plus favorable aux cultures d’exportation, étaient alors rédhibitoires.

Gallieni prit tout un ensemble de mesures pour encourager des colons français à venir dans l’île, ou pour inciter d’anciens soldats à s’y enraciner, en instituant une politique de petites ou grandes concessions, mais le succès ne fut pas au rendez-vous.

      Lorsque Gallieni tenta de réorganiser le marché du travail, bouleversé par la suppression de l’esclavage, en instituant un régime de prestation, ce dernier fut souvent détourné par des colons peu scrupuleux :

      Dans une lettre du 12 janvier 1900,

    «  Comme je l’explique dans mes instructions, la prestation indigène n’était pour moi qu’un moyen transitoire entre la mesure de l’abolition de l’esclavage et la liberté du travail complète. Pour favoriser nos colons, j’ai même pensé que l’on pouvait aller plus loin, et j’ai créé tourte une série d’avantages pour les indigènes qui s’employaient au service de nos colons. Mais les abus ont été grands. Un certain  nombre de nos colons, les moins intéressants d’ailleurs, se sont mis aussitôt à souscrire des engagements avec les indigènes, ceux-ci se faisant ainsi exempter des prestations à fournir à l’Etat et remettant en échange une somme donnée à leurs employeurs qui, bien entendu, ne leur faisaient faire aucun travail… Ces individus ne faisaient rien et, n’ayant aucune ressource apportée avec eux, se bornaient à vivre de cette espèce de rente, qui leur était faite par les engagés indigènes » (GM/67)

    Dans une lettre du 13 septembre 1903, Gallieni écrivait :

    « … Et cependant nous sommes de plus en plus infestés par des aventuriers de tous pays qui débarquent dans nos ports, mettant notre police sur les dents, entrent en prison ou à l’hôpital et finalement, leurs consuls refusant énergiquement de se charger d’eux, se font rapatrier à nos frais. » (GM/p,118)

     Le colonel Lyautey commentait de la même façon la piètre qualité des colons qui arrivaient dans l’île.

    Le 3 juillet, à Fort Dauphin, Lyautey réunissait les membres de la Chambre consultative, composée uniquement de Français :

    « Sauf … deux officiers démissionnaires fixés ici dans une grande concession, tous les autres membres sont des créoles besogneux. » (LSM/p128)

     Fort Dauphin, le 30 décembre 1901 :

    « … Les redoutables, ceux dont vous dites qu’ils nous obligent à « concilier les intérêts inconciliables », ce sont les petits colons, les besogneux, ceux qui marchandent sou par sou la rémunération de leur main d’œuvre, qui font flèche de tout bois au détriment de l’indigène. C’est ceux-là dont il ne faut à aucun prix dans nos « possessions ». (LSM/p,214) 

      Les créoles de la Réunion, un groupe de pression aussi actif que celui des églises.

     Nous avons déjà évoqué cette question, à l’occasion des réflexions que le colonel Lyautey faisait à ce sujet, mais un extrait d’une des lettres de Gallieni, du 26 décembre 1903, adressée à M.Chailley, suffira à décrire les difficultés qu’il rencontrait pour gouverner la colonie face au groupe de pression réunionnais :

     « Quoiqu’il en soit et bien que mon maintien ici pendant une période aussi longue prouve que nous avons fait de grands progrès en France au point de vue colonial, je crois que j’aurais mieux fait de suivre mon premier mouvement. C’est bien difficile de conserver si longtemps le même poste sans mécontenter un grand nombre de personnes : fonctionnaires inaptes ou paresseux, qu’il a fallu révoquer ou auxquels il a été impossible de donner l’avancement exagéré qu’ils réclamaient ; hommes d’affaires avides et besogneux, toujours prêts à la critique, au chantage même, si on ne veut leur livrer en pâture les ressources de la colonie ou les aider à tromper les naïfs ; colons inexpérimentés ou ignorants, qui ont dissipé leurs capitaux et font retomber leurs erreurs sur l’administration ; politiciens, recrutés surtout parmi les créoles, qui voudraient introduire à Madagascar mœurs, élections, quémandage, accaparement de tous les emplois, qui font la ruine de notre voisine et qui, ici, auraient pour effet de mettre à l’écart les colons sérieux et d’opprimer les indigènes qui peuvent, à peu près seuls, assurer la prospérité future de notre colonie ; enfin missionnaires catholiques ou protestants, toujours jaloux des avantages faits aux voisins et qui voudraient vivre exclusivement de subventions employées cependant pour un autre but que l’intérêt de la colonie, ou qui désireraient pouvoir, sans être dérangés, arracher aux indigènes des dons pour la construction d’églises ou de temples, etc… » (G/M p,126)

     Commentaire : rien à ajouter, sauf le regret, qu’à ma connaissance, et sauf erreur, les historiens ne se soient pas suffisamment intéressés à l’impérialisme secondaire de l’île de la Réunion, dont certains effets durent encore de nos jours.

Jean Pierre Renaud