Humeur Tique : Françafrique modèle 2011, un avant et un après Côte d’Ivoire ?
La première page ambigüe de Libération du 12 avril 2011 : « La France sort Gbagbo »
Ou de préférence « Le regard de Plantu » en première page du Monde du 13 avril intitulée « Gbagbo se plaint de ses conditions de détention », avec l’apparition des Vergès et Dumas, « cher client » et la réponse en bulle de Gbagbo « Ah non ! Pas eux ! »
Un dictateur africain déchu, très bien ! Au tour des autres à présent ?
L’intervention de la France dans le dénouement de cette crise pose, en tout cas et une fois de plus, le problème de son rôle dans l’ancien « pré carré » africain.
En la circonstance, la France a été le bras militaire séculier de l’ONU, mais il est évident que son intervention, sous le parapluie d’une cause internationale, n’aurait pas été possible, en tout cas dans les conditions connues, si la France n’avait pas disposé d’une force militaire disponible en Côte d’Ivoire, avant même, sauf erreur, la couverture diplomatique de l’ONU.
Et chacun sait que notre pays dispose d’autres forces « prépositionnées » de notre armée « professionnelle » en Afrique ! Qu’en sera-t-il à nouveau, si dans l’un ou l’autre de ces pays, au Gabon, ou à Djibouti, le même type de crise se produit ?
A l’occasion des prochaines élections présidentielles, les différents candidats devraient faire connaître clairement aux Français les conditions éventuelles d’intervention des forces armées françaises dans ces pays, en modifiant sans doute le droit constitutionnel applicable, en cas d’intervention militaire.
Humeur Tique : Mourir à Doha ? Guerre et Paix du Président de la République ?
Il n’est pas besoin d’être un savant dans la chose constitutionnelle pour être un peu surpris, en qualité de citoyen français, par la facilité déconcertante avec laquelle un Président de la République Française a la possibilité d’engager nos forces armées à l’étranger. Tel a été le cas le plus récent de la Libye.
D’après le Monde du 9 avril dernier (page 10) :
« Les engagements successifs de la France sur deux terrains d’opérations extérieurs n’ont pas provoqué de grands débats parlementaires. Il est vrai que le président de la République, chef des armées, n’a pas besoin de l’autorisation du Parlement pour faire intervenir les forces armées à l’étranger. Le gouvernement est néanmoins tenu, aux termes de la Constitution, d’informer celui-ci « au plus tard trois jours après le début de l’intervention ». Cette information peut être suivie d’un débat mais sans vote. Ce n’est que lorsque l’intervention excède quatre mois que le gouvernement doit soumettre sa prolongation à l’autorisation du Parlement »
Il s’agit en effet de l’article 35 de la Constitution !
Et d’ajouter à la citation du journal la fin de cet article : « Il peut demander à l’Assemblée Nationale de décider en dernier ressort. Si le Parlement n’est pas en session à l’expiration du délai de quatre mois, il se prononce à l’ouverture de la session suivante. »
En résumé donc, tout pouvoir au président de la République et la guerre ou la paix peuvent se mettre en vacances !
Une découverte sans doute pour beaucoup de citoyens qui n’avaient prêté aucune attention, à tort, à une réforme faite en 2008 !
La France en guerre sans véritablement le savoir, et sans que la représentation nationale ait quasiment son mot à dire, c’est à dire donner son autorisation démocratique !
Quand est-ce que la France va enfin accéder au statut d’une véritable démocratie ?
Un exercice de pouvoir d’autant plus facile qu’avec la fameuse armée professionnelle, initiée par Chirac, dont le savoir-faire et la compétence ne sont pas en cause, le Président de la République peut prendre sa décision avec une « âme légère ».
Lorsque le général de Gaulle a fait voter la nouvelle Constitution de la Vème République, il n’en était pas de même, puisque l’armée française était constituée pour l’essentiel de conscrits issus donc de la conscription.
Les prochaines élections présidentielles devraient être l’occasion de remettre complètement à plat ce système de pouvoir « autocratique » et redonner à la représentation nationale la capacité d’engagement ou de refus d’engagement de notre armée à l’étranger.
Et pour les citoyens initiés, jamais sans doute la France ne se serait engagée dans les conquêtes coloniales de la Troisième République sans son armée coloniale « professionnelle » !
Et pour les citoyens avisés, comment ne pas être surpris que la France trouve toujours de l’argent pour soutenir ou engager des opérations militaires extérieures, alors qu’elle est, depuis plus de trente ans, dans l’incapacité de mettre le même argent dans un programme dédié au retour des « ghettos urbains » dans la République ?