« Coloniser, c’est Storaniser ! » Acte II

« Coloniser, c’est Macroniser ! »Acte I

« Coloniser, c’est Storaniser ! » Acte II

« Coloniser, c’est Customiser ! », à la sauce d’une agit-prop professionnelle !

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« Le Parisien du 17 février 2017, page 4 :

La chronique : « Mais quelle mouche  a piqué Macron ?

Polémique –  En qualifiant la colonisation de « crime contre l’humanité »… » et en défendant la Manif pour tous… »

En bas de page : avec la photo de M.Stora à gauche, l’interview de l’historien de l’Algérie, sous le titre :

« En matière de colonisation, la France a bâti un faux modèle républicain »

          Après les « crânes » des « résistants »  algériens, en 1854,  à rapatrier en Algérie, les « mémoires dangereuses »,  « les crimes contre l’humanité » !

           M.Stora a-t-il la prétention de prendre pour postulat de son discours le « modèle » algérien ? Lequel serait représentatif de l’histoire de la colonisation française ?

            M.Stora vient ici au secours du candidat Macron ? En aurait-il tant besoin ?

      « C’est un problème d’autant plus insoluble – (déposer plaintecontre les crimeset faire poursuivre) –  qu’en France, dès que l’on prononce les mots « crimes contre l’humanité », le débat est clos ou se politise. Il est quasiment interdit d’évoquer tout acte de violence commis par la France pendant la colonisation »

          Les historiens connaissent sans doute, et à ce sujet, les récits de Loti, Maran, Vigné d’Octon, Augagneur, Gide, Roubaud, Londres …, pour citer quelques auteursde la Troisième République, ou plus récemment, et par exemple, ceux de M.M Boiteau et Tronchon sur Madagascar, ou de Mme Branche sur la torture…

          « La France a bâti un faux modèle républicain » : la France a-t-elle voulu mettre en œuvre ailleurs qu’en Algérie, après 1945, et contre l’opposition permanente de la minorité agissante des Français d’Algérie, le « modèle républicain », avec la complicité des partis de gauche ou de droite ?

           De quelle République parlons-nous ? Celle de la République laxiste de Mitterrand et de Chirac qui ont laissé faire pour que la République soit tellement absente de nos quartiers sensibles ?

         A la fin de son interview, M.Stora repart sur son terrain de prédilection, celui des populations d’origine immigrée :

        « Comment expliquer à ces catégories de la population qui descendent de l’histoire de la colonisation que, soixante ans après, on ne peut toujours pas tenir en France des critiques contre ce système ? La colonisation est devenue un marqueur identitaire comme l’esclavage pour les Noirs. C’est une question historique aux conséquences politiques très vivaces. »

         Fermé le ban !

        Dieu soit loué ! En dépit de sa faible fréquentation, – pourquoi ? – la Cité de l’Histoire de l’Immigration contribue sûrement à combler ce gouffre d’ignorance.

          « On ne peut toujours pas tenir en France des critiques contre ce système »  : alors qu’à longueur d’année des historiens, des chercheurs, des intellectuels, dénoncent les méfaits de la France coloniale, le plus souvent sans connaître grand-chose de son histoire ?

        « Comment expliquer à ces catégories de population … ? Des catégories que M .Stora se garde bien de vouloir faire compter, car il n’a  jamais jusqu’à présent fait mesurer le champ d’un de ses thèmes préférés, celui de la mémoire coloniale, alors qu’il surfe en permanence sur le sujet ?

           Comment expliquer aux Français que cette absence supposée de critique puisse justifier que « la colonisation est devenue un marqueur identitaire… », alors que les « experts » ne savent même pas, ou ne veulent pas le mesurer, et que les Français constatent de plus en plus, compte tenu des flux de l’immigration passée « régulière » ou « irrégulière », que c’est l’Islam qui est peut-être devenu le « marqueur identitaire » ?

           Comme je l’ai déjà écrit, il est tout de même très étrange que ces catégories de population marquées du fer rouge de la colonisation, soient venues, et viennent encore nombreuses se placer sous le joug d’un  système colonial qui existerait toujours en France, pour appeler un chat un chat, notamment de la terre qui a vu naître M.Stora, au cours de la décennie noire des années 1990 2000.

           Pourquoi agit-prop professionnelle ? Parce que ces intellectuels tiennent un discours idéologique qui semble ignorer les grands progrès qui ont été réalisés dans l’histoire quantitative, et ici, dans la mesure statistique de ces fameuses « mémoires » collectives, ce qui n’était pas le cas avant 1939-1945.

       Ils ne font que se cantonner dans le discours des idées, et c’est évidemment plus confortable !

Jean Pierre Renaud

« Algérie 1954-2014 L’anniversaire amer » Le Monde du 31 octobre 2014

« Algérie 1954-2014

L’anniversaire amer »

Le Monde du 31 octobre 2014

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Petit exercice de critique historique des pages du journal sur la guerre d’Algérie avec une invitation à passer à la phase 2, c’est à dire :

Mesurer les mémoires dans « la guerre des mémoires- la France face à son passé colonial » de Benjamin Stora,  et son nouveau concept de « transfert de mémoire » (voir l’éditorial).

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Avant-propos

            Pour avoir servi la France, et peut-être l’Algérie, pendant la guerre d’Algérie, au cours des années 1959 et 1960, dans la vallée de la Soummam, et continué à y lire ce journal, quand il m’était possible de me le procurer, j’aimerais donner mon opinion sur une partie des textes qui ont eu l’ambition de donner une image fidèle de cette guerre, pendant et après l’indépendance de l’Algérie.

            Je me propose donc de passer au crible trois des documents publiés par Le Monde, en premier, la sorte d’éditorial du supplément, signé Christophe Ayad, intitulé «  Sortir du déni et du mensonge », qu’il convient de lire ainsi, sauf erreur, « déni » de la France, et « mensonge » de l’Algérie.

            En deuxième, l’éditorial lui-même du journal, intitulé « De la mémoire à l’histoire ».

            En troisième, l’analyse de l’enquête IFOP, intitulée « Les passions s’apaisent sur la guerre d’Algérie » par Thomas Wieder.

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           En premier : « Sortir du déni (France) et du mensonge (Algérie) »

 Cette analyse n’est pas très convaincante.

            Les premiers paragraphes décrivant les débuts de cette guerre sont à la fois réducteurs, et inexacts : « Pour venir à bout de cette tactique mise en place par le FLN, l’armée française a mis au point et expérimenté la guerre contre-insurrectionnelle… L’armée américaine n’a rien inventé en Afghanistan ou en Irak. »

            Comme si Mao Tsé Toung n’avait pas mis en œuvre ce type de guerre en Chine, et comme si les guerres contre-insurrectionnelles, anglaise de Malaisie, puis française d’Indochine n’avaient pas non plus existé !

            Et rien sur la guerre fratricide entre le MNA et le FLN, avec ses plus de 20 000 victimes, pour ne pas citer l’autre guerre civile entre algériens pro et antifrançais, et pas plus sur la présence en Algérie de plus d’un million de pieds noirs.

        « Poids de l’histoire », l’auteur écrit :

            « La constante des guerres contre-insurrectionnelles, c’est qu’en cas de succès militaire, elles débouchent sur des désastres politiques. … «  Voire ! Lesquels ?

            L’auteur poursuit : « L’autre malédiction des guerres contre-insurrectionnelles est qu’elles inoculent leur venin à ceux qu’elles sont censées combattre. » et le tour est joué !

            L’armée française a inoculé son venin à l’armée du FLN, celle qui est « restée stationnée en Tunisie et au Maroc sans combattre » (et les batailles des frontières ?), celle qui a pris le pouvoir, et est donc responsable de ce qui s’est passé en Algérie jusqu’à nos jours.

          L’auteur ajoute : « De son homologue française sous la colonisation, l’armée algérienne a hérité du même mépris pour les civils, d’un goût prononcé pour les affaires politiques et d’un penchant certain pour la manipulation. Elle se conduit, à bien des égards, en force d’occupation de sa propre société. ».

            « Même mépris pour les civils » n’est-ce pas par trop caricatural, et même faux ? Et évidemment, par la voie de son armée, la France est à nouveau responsable ! C’est toujours la faute des Français ! Plus de cinquante ans après !

:           L’auteur évoque alors l’opération Serval au Mali et une nouvelle coopération militaire franco-algérienne « en catimini » :

            « Le poids de l’Histoire est sans doute trop fort. En France, l’oubli et l’ignorance ne sont qu’une autre forme du déni passé ; et en Algérie, la mémoire de la guerre est instrumentalisée et usée jusqu’à la corde… Ce n’est qu’en sortant du déni français et du mensonge algérien que l’on pourra justifier, auprès des opinions publiques des deux pays, une lutte contre le terrorisme pour une fois justifié et susceptible de remporter l’adhésion. »

            Un discours qui se situe hors de l’histoire réelle de notre pays, car les citoyens français ont eu beaucoup plus d’occasions d’être informés sur la guerre d’Algérie, que n’a l’air de le croire l’auteur de ce papier, y compris sur les aspects les plus noirs de la pacification, en particulier, par les soins du journal Le Monde.

         Comme de nombreux lecteurs de ce journal pendant la guerre d’Algérie, soldats appelés ou non, il m’est arrivé souvent de penser que le journal proposait trop souvent une information partisane, avec toujours la France en négatif.

        A la limite, il n’était pas interdit de penser que le « terroriste «  avait toujours raison, alors qu’il s’agissait au moins autant d’une guerre civile que d’une guerre franco-algérienne.

        En deuxième, le contenu de l’éditorial du 31 octobre 2014,

         Un contenu que je relierais volontiers à celui du sondage IFOP analysé plus loin sur la mémoire et l’histoire de cette guerre, et sur la grande ambiguïté que certains historiens entretiennent entre mémoire et histoire.

        Je cite :

     « Aujourd’hui encore, comment ne pas voir dans le refoulement de ce drame l’origine de ce que l’historien Benjamin Stora a appelé « le transfert de mémoire » : l’importation, en « métropole » d’une mémoire coloniale où se mêlent la peur du « petit blanc », son angoisse identitaire face à l’Islam, son racisme antimaghrébin et les  crispations identitaires antagonistes qui en résultent » :

     Rien de moins !

        Une nouvelle école mémorielle ou historique ? Après la guerre des mémoires, entre qui et qui, et avec quelle démonstration statistique ? Une nouvelle extension de la psychanalyse coloniale et postcoloniale grâce à un « transfert » jamais mesuré, et sans doute mesurable !

      Des historiennes et historiens se sont fait une spécialité d’une lecture de notre histoire coloniale à partir de concepts aussi étranges qu’une « mémoire collective », ici coloniale ou postcoloniale (voir Stora), jamais mesurée par voie d’enquêtes et de sondages, ou mieux encore d’un « inconscient collectif » toujours colonial ou post colonial ( voir Coquery-Vidrovitch et ), jamais non plus mesuré.

      J’ai déjà eu maintes occasions de dénoncer le discours idéologique et non « scientifique » de ces chercheurs, sans preuves.

        L’éditorial fait donc appel à un nouveau concept adopté par M.Stora « le transfert de mémoire ».

      Comme je l’ai demandé à maintes reprises sur ce blog, que ces grands lettrés aient le courage en effet de démontrer, statistiquement parlant, que les concepts d’explication avancés pour mieux connaitre la mémoire des citoyens, ont effectivement une réalité mesurée.

     Le 12 mars 2009, le journal Le Monde s’était prêté à ce même type d’explication, une affirmation sans fondement statistique, en s’associant à la Ville de Paris pour célébrer le slogan « Décolonisons les imaginaires », la vraie « propagande », celle-là !

    En troisième lieu, et enfin, Eurêka ! L’heureuse surprise d’une première mesure statistique de quelques-uns des aspects de la mémoire algérienne des Français, le journal propose à la page 9 les résultats d’une enquête d’opinion, intitulée :

« Les passions s’apaisent sur la guerre d’Algérie

Soixante ans après le début du conflit, l’IFOP a sondé les Français pour « Le Monde » et la Fondation Jean Jaurès »

Avec dans la marge :

« Rares sont ceux qui reprennent un vocabulaire de l’époque ou des qualificatifs symptomatiques d’une mémoire blessée »

      Cette enquête répond enfin, et  en partie, à cette demande de démonstration statistique.

            Sous le titre ambigu « Le poids de la mémoire pied-noire », le journal publie un graphique récapitulant le pourcentage de réponses à la question pour l’ensemble des français, et pour les sympathisants PS, UMP, FN :

        « Pour vous, personnellement, la guerre d’Algérie, c’est :

       L’arrivée des pieds noirs en France  (59% pour l’ensemble des Français), une guerre de libération pour un peuple colonisé (54% pour l’ensemble des Français),  le retour du général de Gaulle au pouvoir (41% pour l’ensemble des Français), une défaite pour la France (38% pour l’ensemble des Français), l’abandon des harkis (38% pour l’ensemble des Français).

        L’auteur de l’article fait état d’autres données statistiques qui ne figurent pas dans ces graphiques :

       « Acceptation globale. Autre preuve de ce regard distancé que portent aujourd’hui les Français sur ce conflit : l’acceptation de son dénouement par une assez forte majorité d’entre eux. Soixante-huit pour cent des personnes interrogées estiment ainsi que l’indépendance «  a été plutôt une bonne choses pour l’Algérie », tandis que 65% estiment qu’elle a été « plutôt une bonne chose pour la France ».

        L’auteur poursuit :

      « Frustration

       Restent un malaise et une frustration. Le malaise porte sur l’attitude de la France depuis la fin de la guerre d’Algérie…

     Et l’auteur note à cet égard une différence d’appréciation selon la couleur politique de gauche ou de droite,

     « Seule la question des harkis fait consensus, c’est-à-dire des Algériens favorables à l’Algérie française, fait consensus : à droite comme à gauche, plus de deux personnes interrogées sur trois estiment que « la France s’est plutôt mal comportée » à leur égard. 

            Quant à la frustration, elle porte sur la place accordée à la guerre d’Algérie dans l’espace public. De ce point de vue, les Français font une distinction  entre les médias et l’école. Dans les médias, cette place est jugée suffisante par 43% des personnes interrogées, mais insuffisante par 37% d’entre elles. A l’école, en revanche, 54% des personnes interrogées estiment qu’on n’en parle pas assez. Cette curiosité doit être vue comme une opportunité : combler cet appétit pour l’histoire est sans doute le meilleur remède aux plaies de la mémoire »

            Enfin une initiative positive ! Mais avec le souhait que Le Monde s’associe à nouveau à la Fondation Jean Jaurès pour passer à une autre étape de vérité, la mesure des mémoires dans la guerre des mémoires de M.Stora, du nouveau concept de « transfert de mémoire », et pourquoi pas ?

         Celle d’une soi-disant mémoire coloniale, algérienne et non algérienne, qui imprégnerait, encore, et au choix, la « mémoire collective » ou « l’inconscient collectif » des Français.

Jean Pierre Renaud