EURO 2016! Foot ou foot-aise anthropologique?

Euro 2016 ! Foot ou foot-aise anthropologique ?
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« Cessons de prendre ces joueurs pour des « subalternes » 
Le titre d’une longue tribune parue dans le journal Le Monde des 5 et 6 juin, page 28
S’agit-il d’un parcours initiatique de la science anthropologique que Monsieur Amselle propose à de jeunes chercheurs en sciences sociales ?

            Pour s’en assurer, il convient donc de se reporter à ce texte crayon en mains, et d’emprunter le chemin du raisonnement proposé, celui d’une démonstration « scientifique » destinée à donner la signification ethnologique, anthropologique, ou politico-idéologique de l’algarade récente Benzema-Deschamps, en précisant que son sujet est le football, l’Euro 2016, la composition de l’équipe de France.

            Première remarque relative au titre : est-ce que l’auteur de ce texte ne joue pas avec le qualificatif d’une école historique postcoloniale qui eut son heure de gloire aux Indes, en brandissant le mot savant de « subalternes », une appellation «  réservée »,  à quel public?

            Pour comprendre le sens du mot, je propose aux lecteurs de consulter la chronique que j’ai consacrée au livre « Leçons indiennes » de Sanjay Subrahmanyam, de lire tout simplement sa leçon 13, et de prendre connaissance de sa définition du qualificatif choisi de « subaltern » à la page 95.

            Deuxième remarque : à lire le sous-titre ci-après, l’auteur fonde son raisonnement sur le postulat gratuit d’un état supposé de l’opinion, étant donné qu’il ne cite aucun sondage ou enquête accréditant son discours, ce qui ne l’empêche pas d’écrire :

          « Même s’ils sont millionnaires et starisés ; les footballeurs d’origine immigrée continuent de faire l’objet d’un « traitement de « défaveur » par l’opinion »

Pour seule preuve donc ce type d’assertion « scientifique » ?

            Troisième remarque : l’auteur esquisse ensuite une pirouette intellectuelle du type, en écrivant : « Il ne saurait être question pour un chercheur en sciences sociales de prendre parti », tout en prenant parti tout au long de son discours.

            Quatrième remarque ; l’auteur donne son interprétation de cette « polémique » sur l’affaire Benzema, en adossant son raisonnement tout à la fois au savant que fut Marcel Mauss et au passé colonial de la France :

           « – c’est qu’elle est une sorte de mille-feuilles ou de « phénomène social total » », selon l’expression de Marcel Mauss, mettant en branle toutes les strates sociales, raciales, et idéologiques de la société française. Elle renvoie celle-ci à un passé colonial que les uns et les autres se refusent à oublier pour aller de l‘avant, et qui pèse de tout son poids chaque fois que surgit un scandale opposant un ressortissant ou un descendant originaire d’une ancienne colonie française à un Français citoyen de la métropole de l’ex-empire colonial »

           Seule difficulté et de taille, l’auteur semble faire partie, peut-être à son corps défendant, de cette cohorte de chercheurs au tempérament auto-flagellant ou victimaire, qui invoque à tout propos une mémoire coloniale ou postcoloniale qu’ils n’ont jamais eu le courage de mesurer, et qu’il ne suffit pas d’habiller son discours de la référence savante à Marcel Mauss pour convaincre le lecteur.

               De Marcel Mauss à Benzema, quel raccourci anthropologique vertigineux !

             Il s’agirait donc de « la postcolonialité dans l’univers du football », du rôle des médias dans cette diffusion, le tout, à l’avenant avec l’évocation à nouveau des joueurs « subalternes », à ne pas confondre avec les « indigènes de la République », etc, etc…

            L’auteur conclut de façon péremptoire :

          « Le piège identitaire des racismes réciproques s’est ainsi refermé sur l’Euro 2016. A travers l’affaire Benzema, la France montre qu’elle est l’objet d’une fracture raciale, fracture qui révèle l’existence d’un passé colonial en attente de liquidation. Quelles qu’en soient les raisons qui peuvent être invoquées à l’appui de la sélection ou du rejet de tel ou tel joueur, c’est ce paradigme postcolonial qui fait désormais office d’étalon des valeurs d’une société revendiquant pourtant, de façon paradoxale, la République comme seul et unique principe d’organisation. »

             Que de grands mots pour soutenir un discours sans preuve, un discours qui, sous prétexte de ne pas fracturer notre société contribue innocemment à le faire avec ce type de raisonnement idéologique.

            Rappelons que l’auteur prône la non-discrimination, mais refuse tout recensement ethnique, seul moyen statistique approprié afin de savoir s’il y a discrimination, effectivement discrimination, compte tenu des grandeurs démographiques en jeu, en même temps que de savoir qui est qui, ou qui est quoi dans notre pays ! (Voir sa thèse dans le petit livre « Au cœur de l’ethnie »)

         « Piège identitaire » ?  « Paradigme postcolonial » ? Diable! dans quel univers sommes-nous ?

            Ne pourrait-on pas rétorquer à ce type de discours politique qu’il est particulièrement difficile pour un ethnologue et anthropologue de vouloir tout à la fois se mettre à la place du sujet observé et ausculté, tout en conservant la distance scientifique nécessaire, d’échapper en quelque sorte à cette nouvelle maladie d’ethnocentrisme inversé, mâtiné d’autoflagellation nationale ?

         Foot ou foot-aise anthropologique ?

          Les lecteurs les plus curieux pourront se reporter au petit texte que j’ai publié sur ce blog intitulé « Un anthropologue chez les Dowayos »

    Jean Pierre Renaud

Mali, un échantillon de « situation coloniale » « parallèle » : avec Hampâté Bâ

Echantillon de « situation coloniale » d’une Afrique « parallèle »

Au Mali (ancien Soudan français) des années 1920-1930

« Oui, mon commandant » par Hampâté Bâ, pages336 et suivantes (Actes Sud)

Eclairage : l’AOF comptait 118 cercles administrés par des commandants de cercle, que certains dénommèrent les « dieux de la brousse, une sorte de préfets coloniaux.

Rappelons que l’AOF constituait un territoire immense de 4,689 millions de kilomètres carrés et était alors peuplée de moins de quinze millions d’habitants.

          » Un commandant de cercle décide de faire une tournée en pleine saison des pluies, alors que la route longeait un terrain argileux encaissé entre deux rivières

« O, imbécillité drue !

            «  Il appela le chef de canton : il faut me faire damer cette route par tes villageois pour la durcir et la tenir au sec. Je ne veux pas que ma voiture s’enfonce !

  • Oui, mon commandant » dit le chef de canton qui ne pouvait dire autre chose… Jadis, toutes les routes de l’Afrique, sur des milliers de kilomètres, ont ainsi été damées à main d’homme

      Et voilà les villageois, hommes, femmes et enfants, qui se mettent à taper dans le sol humide et bourbeux. Ils tapent, ils tapent à tour de bras, au rythme d’un chant qu’ils ont composé pour la circonstance. Et tout en tapant, ils chantent et ils rient. J’ai entendu leur chant. En voici quelques passages :

            Imbécillité, ô imbécillité drue !

            Elle nous ordonne de dépouiller,

           De dépouiller la peau d’un moustique

           Pour en faire un tapis, un tapis pour le roi

           Ma-coumandan veut que sa voiture passe

           Il ressemble à l’homme qui vent faire sa prière

          Sur une peau de moustique

          Etendue sur le sol

          Ma-coumandan ne sait pas

           Que l’eau avale tout

         Elle avalera même ma-coumandan

         Tapons ! Tapons docilement

         Tapons fort dans la boue

         Dans la boue détrempée

         Ma-coumandan nous croit idiots

         Mais c’est lui qui est imbécile

        Pour tenter de faire une route sèche

        Dans la boue humide

     Le commandant, accompagné de son interprète et de son commis, vint visiter le chantier. Les frappeurs chantèrent et chantèrent de plus belle. Le commandant, tout réjoui, se tourna vers l’interprète : « Mais ils ont l’air très contents ! » s’exclamait-il. Il y avait des secrets que ni les interprètes, ni les commis, ni les gardes, ne pouvaient trahir. »Oui mon commandant ! », répondit l’interprète… »

Commentaire :        à mes yeux, un bon échantillon des relations coloniales de l’époque, c’est-à-dire une « situation coloniale », mais rassurez-vous, tous les commandants ne furent pas des « imbéciles », aux yeux mêmes d’Hampâté Bâ et à lire ses récits.

Jean Pierre Renaud         

La peste du XXIème siècle, le prurit d’une « com » à tout prix ! Avec l’ancien Président du Conseil Contsitutionnel

Avec l’ancien Président du Conseil Constitutionnel, « ils n’en mourraient pas tous, mais tous étaient frappés » !
Ecrivait La Fontaine dans « Les animaux malades de la peste » ! Que de fables nouvelles ne trousserait il pas de nos jours, tant les sujets de dérision sont innombrables !
La peste du XXIème siècle, le prurit d’une « com » à tout prix !

            Le prurit de la « com » qui démange tous ces personnages publics !

            Lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, Monsieur Debré nous avait habitué à plus de discrétion, à l’occasion de la Conférence clandestine du FLNC en Corse.  Ce fut motus et bouche cousue quant à son rôle !

            Il est vrai qu’à l’occasion de ses hautes fonctions juridictionnelles, l’homme rongeait son frein, en faisant de temps en temps des apparitions publiques à la télé, la plus éclatante, étant celle où, sur Canal Plus, il faisait la promotion d’un roman policier en compagnie d’un autre romancier, repris de justice, récemment réincarcéré.

            Pourquoi ce propos ? Parce que, tout au long des derniers mois, et au pas cadencé,  le sieur Debré s’est répandu sur tous les plateaux de radio, de télévision, dans tous les journaux, pour vanter son nouveau livre. Vous ne pouviez « zapper », comme on dit, sans qu’à chaque fois, vous ayez droit à sa « binette », à ses fausses confidences, et à ses sentences.

            Mon Dieu que cet homme a dû souffrir pendant de longues années, endurer le martyre avec son prurit de com, empêché de dire leur vérité à tous les personnages publics qu’il avait pu fréquenter.

            Le fils Debré est-il digne de l’«amer Michel » ? Est-il le vrai porteur du costume gaulliste dont il s’est affublé ? Rien n’est moins sûr !

             Dans le Ruy Blas de Victor Hugo, le laquais Ruy Blas s’adressait ainsi à son maître Don Salluste :

            « J’ai l’habit du laquais et vous en avez l’âme ».

           Beau sujet d’interrogation et d’interprétation dans le cas de l’ancien président, aussi bien par rapport au gaullisme que par rapport à la com !

Jean Pierre Renaud

En apéritif de lecture, les « situations coloniales » d’après Sophie Dulucq

En apéritif de ma future lecture critique du livre « Ecrire l’histoire de l’Afrique à l’époque coloniale » de Sophie Dulucq : les « Situations coloniales ».

Comment lire et comprendre la définition de l’expression « Situation coloniale » dans le petit lexique « Les mots de la Colonisation », page 106 ?
Une toile d’araignée pleine de trous, ou encore un archipel, des archipels, beaucoup plus qu’un système ?

            Les lecteurs de ce blog ont la possibilité de lire le petit texte critique de ce lexique que j’ai publié sur le blog Etudes Coloniales, le 9 mars 2008

            Après avoir rappelé la signification de cette expression rédigée par le sociologue  Georges Balandier, l’auteure écrit :

            « Le concept englobant de situation coloniale amène à penser la colonisation comme un système complexe, influant sur tous les aspects de la vie des sociétés soumises et des sociétés dominantes. Dans cette perspective, l’idée de proposer un « bilan » en positif ou négatif de la colonisation est tout simplement vaine : comme dans tout système, aucun élément n’est isolable et neutralisable, toute action ressurgit par un autre bout et avec des effets indirects, impossibles à réduire à des oppositions manichéennes. » (p,106)

            Comme on le voit, le propos est à la fois prudent « …amène à penser… », « Dans cette perspective », mais en même temps péremptoire, « Le concept englobant de situation coloniale… », étant donné qu’il n’est pas démontré qu’une situation coloniale fut un concept englobant, qui fait entrer dans un système, pas plus que le concept de système lui-même décrit plus loin par l’auteure, dans l’analyse historique des situations coloniales.

            Puisqu’il s’agit de définition, du sens des mots, je me suis cru obligé de revenir à mes études économiques, à mon dictionnaire, et à mes connaissances historiques, afin de mesurer la pertinence de cette analyse.

            « Le concept englobant de situation coloniale amène à penser la colonisation comme un système complexe » : est-ce le cas ? Ou très précisément non, étant donné la grande diversité des situations coloniales et de leur évolution chronologique ?

            Est-il possible d’assimiler et de mettre sur le même plan  les trois concepts de situation coloniale, de colonisation, de système, compte tenu notamment de leur diversité, pour ne pas dire, de leur dispersion ? Rien n’est moins sûr en effet.

            Une situation coloniale ne saurait être enfermée dans un système, encore moins dans le cas de l’A.O.F qui parait être la référence principale de ce type de définition.

            Il existe une grande variété de définitions du système, en tant que concept général :

            Le Petit Robert en propose beaucoup, dont il ressort quelques caractéristiques communes, la notion d’ensemble d’éléments intellectuels ou matériels, de doctrine, de cohérence entre les éléments de cet ensemble, de logique de fonctionnement, avec la poursuite d’un objectif, en mettant en œuvre des méthodes ou des pratiques partagées, dans un cadre institutionnel, économique ou social, culturel, également partagé …

          Je me référerai plus volontiers aux définitions du manuel d’« Economie Politique » du professeur Barre, notamment pour la raison essentielle que la plupart des critiques du colonialisme, imprégnés de culture marxiste ou  influencés par elle, ont axé leur critique sur son contenu d’exploitation économique, dans sa définition largement périmée de Lénine :

        « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme »

         Autre définition qui mérite réflexion, celle d’un historien qui ne s’est pas contenté de faire de l’historiographie, Henri Brunschwig qui écrivait tout bonnement dans le livre « Noirs et Blancs dans l’Afrique noire française » :

       «  Elle n’eut en réalité de système colonial que sur le papier » (p,209)

       A ne rien vous cacher, je ne suis pas loin de partager ce propos pour les raisons que je vais énoncer.

Dans le livre « ECONOMIE POLITIQUE », Sous-Titre II L’organisation de l’activité économique nationale, Chapitre premier, page 167

 « La morphologie de l’activité économique

Systèmes et types d’organisation

La définition suivante est proposée :

« Section I – La notion de système économique

Selon la définition de Sombart, reprise en France par F.Perroux, un système se caractérise par trois séries d’éléments :

  •     l’esprit, c’est-à-dire les mobiles prédominants de l‘activité économique ;
  • –    la forme, c’est-à-dire l’ensemble des éléments sociaux, juridiques et institutionnels qui définissent le cadre de l’activité économique et les relations entre sujets économiques (régime de la propriété ; statut du travail ; rôle de l’Etat) ;
  • –      la substance, c’est-à-dire la technique, l’ensemble des procédés matériels par lesquels on obtient et on transforme les biens.

       Le même ouvrage classe ensuite les systèmes dans cinq catégories : le système d’économie fermée, le système d’économie artisanale, le système d’économie capitaliste, le système d’économie collectiviste, le système d’économie corporatiste.

      On voit immédiatement qu’il parait difficile d’enfermer la très grande variété des situations coloniales, sur le plan géographique et chronologique, de nature plus qu’hybrides, d’un état plus proche du magma informe que du cristal de roche, ne serait-ce que déjà dans la  définition sophistiquée des systèmes, tels que décrits.

       Beaucoup de chercheurs marqués par le marxisme, et par son discours idéologico-écomico-politique, ont tenté de démontrer que la colonisation s’était caractérisée par le pillage des ressources des territoires colonisés, ce qui fut effectivement le cas dans un certain nombre de cas identifiés, tels que l’ancien Congo Belge, ou la Malaisie, mais le système colonial français, pour autant qu’il ait existé, n’avait rien à voir en Afrique noire avec le système du grand capitalisme privé, une des formes du système,  qui s’est épanoui au Congo Belge, en Afrique du Sud, ou en Malaisie, avec la déclinaison pâle que fut la courte période des concessions forestières en Afrique Equatoriale française.

       Sur le plan proprement économique, Jacques Marseille a démontré que le système économique colonial français n’apportait pas la preuve qu’il fonctionna au détriment des colonies. Jacques Lefeuvre a fait le même type de démonstration pour l’Algérie, alors que tous deux avaient, au départ, une vision marxiste du sujet. Mme Huillery, dans une thèse récente, a tenté, sans succès, de démontrer que Jacques Marseille s’était trompé dans ses analyses (voir ma lecture critique sur ce blog)

          Dans quel type de « système » fonctionnait donc le monde colonial, pour autant qu’il soit possible d’en tirer les caractéristiques communes, ce qui est loin d’être démontré, c’est-à-dire avec une cohésion assurée ?

            Un « système complexe », certes, mais avec des contenus et des définitions très différentes, selon la nature des structures qui le composaient, leur importance relative, leur logique de fonctionnement, s’il y en eut une, etc…

            Un système ou des toiles d’araignée pleines de trous?

         Plutôt que système complexe, j’écrirais  système imparfait, incomplet, partiel, à plusieurs étages, avec de gros trous dans une toile d’araignée à la fois mobile, fragile, imparfaite, incapable, comme il est écrit, d’influer « sur tous les aspects de la vie des sociétés soumises et des sociétés dominantes », car il s’agit tout simplement d’une vue de l’esprit.         

         Dans le cas de la colonisation française, et précisément en AOF, il existait bien :

        – un système global, une structure étatique à la fois centralisée et en réalité décentralisée, avec un nombre réduit de circonscriptions administratives, de l’ordre d’une centaine pour un territoire immense,

       – une monnaie commune, quand il s’agissait des relations extérieures, car il existait plein de trous dans la toile, et pendant longtemps, dans toutes les zones coloniales proches des anglaises, sans compter la faible pénétration du franc  dans l’hinterland le plus éloigné,

         – un périmètre de douane protectrice, mais uniquement pour les produits d’importation et d’exportation, c’est-à-dire ceux des zones côtières, avec les « araignées » économiques qui avaient réussi à tisser leur toile au-delà de leur « pôle de développement », compte tenu notamment ou de l’absence de ports ou de voies de communication, ou de leur fragilité. Le réseau du commerce syro-libanais constituerait un bon exemple de toile d’araignée dans le commerce de proximité.

          Dans le cas du fleuve Sénégal, la navigabilité saisonnière du fleuve, ainsi que l’absence de pistes, ont longtemps bloqué tout développement vers l’ancien Soudan, aujourd’hui Mali, tout autant qu’ailleurs, l’absence de fleuves pouvant servir d’axes de communication entre la côte et l’intérieur. (voir à ce sujet le livre de Jacques Richard- Molard sur l’AOF)

       – un ordre public commun, ordonné autour du Code de l’Indigénat jusqu’en 1945,  mais qui, dans la plupart des cas, n’aurait jamais pu être assuré sans le truchement conciliant ou coopératif des sociétés indigènes, compte tenu de la faiblesse de la toile d’araignée des moyens de police, et du tout petit nombre de commandants de cercle ou de subdivision. (voir à ce sujet les livres de l’ancien gouverneur Robert Delavignette)

            Quoi de commun y avait-il précisément entre les systèmes, ou morceaux de système, tels qu’ils existaient et fonctionnaient, selon des chronologies différentes, entre ceux du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, ou de la Mauritanie, pour ne pas parler d’autres exemples tels que l’Indochine, Madagascar, ou l’Algérie ?

            Les éléments de souveraineté décrits plus haut se superposaient dans des territoires coloniaux, dont la population, jusqu’à à la fin de la période coloniale était encore composée, pour plus de 80%, par des paysans illettrés, de religions, de cultures, et de langues très différentes. (voir à ce sujet les ouvrages de Labouret)

            Il existait bien des structures administratives communes, de type centralisé, ce que l’on pourrait appeler les superstructures de type marxiste, mais avec quel impact sur le cœur de toutes ces civilisations en voie d’acculturation à partir des côtes, avec quelle emprise sur la plupart des peuples colonisés, leurs structures religieuses, sociales et culturelles, pendant une période qui s’est située entre 60 à 80 années ?

            En ce qui concerne le Sénégal, est-ce que l’administration coloniale n’a pas partagé le pouvoir avec la grande confrérie des Mourides qui avait déjà tissé une très belle toile d’araignée? Qui exerçait réellement le pouvoir ?

            Est-ce que le catholique Senghor aurait pu être élu sans la « bénédiction » mouride ?

         Le système colonial était plein de trous, et il n’avait rien à voir avec le système totalitaire que fut l’ancienne URSS (1917-1989).

            Dans les années 1950, au Togo,, certaines populations du nord vivaient comme par le passé, ne connaissant du « système » que le recensement et la taxe de capitation, alors que le Togo, compte tenu de son statut international, était l’objet d’attentions coloniales plus qu’aucune autre colonie.

            Sur les côtes, dans les nouvelles cités, au cœur des toiles d’araignée, la colonisation avait en partie fait son lit, mais ailleurs ?

            Au Togo, comment le système pouvait-il échapper à la géographie des lieux et des ethnies ? Au nord du massif de l’Atakora, on entrait dans un monde différent de celui du sud, et les populations de ce massif se trouvaient dans une situation protégée, ressemblant fort à toutes celles qui sur la planète, partageaient la même géographie. (voir l’histoire de l’ethnie Tamberma et de ses forteresses)

            Des ethnologues, anthropologues, ou historiens se sont d’ailleurs fait une spécialité en mettant en valeur l’existence et l’originalité de ces ethnies montagnardes qui refusaient l’allégeance, pour ne pas dire la soumission aux pouvoirs des plaines. Les lettres de Gallieni sur la pacification du Haut Tonkin permettent d’en prendre la mesure dans un contexte de contestation permanente du pouvoir de la Cour d’Annam, c’est-à-dire des mandarins des plaines.

            Sanjay Subrahmanyam, dans sa leçon numéro 10, (Leçons indiennes), sous le titre : « Les Civilisations souffrent-elles du mal des montagnes » (page 165), ouvre des perspectives de réflexion tout à fait intéressantes sur le sujet.

            Avant la création ex nihilo de ports et de pistes, le nord de l’ancienne AOF, faisait partie d’un monde orienté vers le Niger, le Sahara, et se trouvait pris dans la toile d’araignée d’un Islam conquérant.

            Au Togo, certains historiens modernes ont à juste titre épilogué  sur la Question Nord Sud et sur une politique coloniale qui en aurait structuré l’histoire, mais pouvait-il en être différemment ? Le Sud ne s’arrêtait-il pas à Blitta, au sud de Sokodé, terminus d’une voie de chemin de fer modeste qui devait atteindre le nord ?

            Parallèlement, la localisation des ethnies, dont certains nous disent aujourd’hui qu’elles ont été créées de toute pièce par les colonisateurs, souvent à cheval sur les frontières artificielles que les puissances coloniales avaient effectivement tracées de toute pièce, n’ont pas été un facteur d’unité dans des territoires géographiquement aussi étroits que le Bénin et le Togo : géographiquement, les deux Etats constituent à l’évidence des entités assez artificielles.

            Force est bien de reconnaître que le concept de système appliqué à une situation coloniale mérite donc d’être à chaque fois défini et daté, et qu’il n’est pas pertinent de le décrire de façon « fictive », comme l’auteure parait le proposer, sauf à laisser croire qu’une structure, une superstructure suffirait à caractériser un système, c’est-à-dire l’image d’une toile d’araignée que j’ai choisie pour tenter de décrire, et qui pourrait faire concurrence à celle d’archipel.

            La remarque que fait l’auteure sur l’impossibilité qu’il y aurait à proposer un bilan positif ou négatif de la colonisation manque de pertinence historique, sauf à dire que dans tous les cas, le « système colonial » aurait été, comme par hasard tout négatif, donc en concordance, pourquoi ne pas le dire, avec les lectures idéologiques les plus sectaires, alors qu’il existait de gros, gros trous dans la toile d’araignée.

            Il ne s’agit pas d’inverser l’ordre des facteurs pour décréter que ce type de lecture serait de nature manichéenne.

            Je conseillerais simplement la lecture de la véritable encyclopédie de l’Unesco consacrée à l’histoire de l’Afrique pour s’en convaincre sans parti pris, en reconnaissant qu’en termes d’héritage de la colonisation, il n’était pas impossible de proposer une analyse critique pertinente.

            Dans le cas de l’AOF, les chercheurs les moins sectaires reconnaissent que la langue française a au moins donné l’occasion, aux centaines de peuples qui la composaient, avec leurs dialectes différents, de permettre à leurs nouveaux lettrés de pouvoir communiquer plus facilement entre eux.

         Autre question relative aux effets de ce système que décrit l’auteure sur les « sociétés dominantes » ?

        Je crains fort que ce type de discours ne s’inscrive dans une propagande qui laisse accroire que la France fut imprégnée d’une culture coloniale et impériale, ce qui n’est pas démontré, et que de nos jours, une mémoire dite coloniale imprègnerait la mentalité des Français, sans qu’aucune démonstration statistique n’ait pas plus été faite.

          Quand les chercheurs du collectif Blanchard and Co, quand Madame Coquery-Vidrovitch, quand Monsieur Stora, auront-ils le courage de faire procéder à une enquête pertinente sur le sujet ?

         Le livre « Culture coloniale » La France conquise par son Empire » (1871-1931), publié par le collectif Blanchard intitule la première partie de son analyse « Imprégnation d’une culture » (1871-1914) (page 41 à 105).

        Je recommande à tous les chercheurs intéressés par ce type d’histoire de lire l’excellent livre d’Eugen Weber », intitulé « La fin des terroirs », afin de se rendre compte que la France des années 1871-1914 n’était pas très différente de certaines parties d’un empire que le pays avait l’ambition de coloniser.

            Les démonstrations qui sont proposées par ailleurs dans le même ouvrage, avec la même logique « idéologique », ne sont pas plus pertinentes, compte tenu de leur carence complète d’évaluation des vecteurs analysés et de leurs effets sur l’opinion des Français, notamment de la presse.

          En Afrique noire, le système colonial français présentait les apparences d’un système, mais en « parallèle » d’une Afrique à la fois « ambigüe » et « parallèle », pour reprendre l’adjectif que l’historien  Pierre Vermeren applique à l’Algérie, lorsqu’il décrit sa situation « coloniale ».

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

Annonce de publication

      En début d’année, j’avais annoncé la publication du texte de lecture critique du livre « Ecrire l’histoire de l’Afrique à l’époque coloniale » de Sophie Dulucq.

         Compte tenu du nombre de pages que j’ai rédigées sur le sujet, cette publication sera reportée après le 15 septembre 2016.

       J’ai toutefois repris la lecture d’un texte que l’intéressée avait publié en 2008 sous le titre « Situations coloniales » dans le petit livre « Les mots de la colonisation » et en ai tiré quelques réflexions que je publierai ce mois-ci.

           En fin d’année, je me propose de publier également ma lecture critique du livre « La fin des terroirs » d’Eugen Weber, un ouvrage fort intéressant sur l’état de la France au XIXème siècle, et au début du XXème siècle.

          Eugen Weber y propose une analyse sociologique très stimulante de cette France, qui en de nombreux lieux, ressemblait, à s’y méprendre, aux colonies que la France de la Troisième République avait l’ambition de « civiliser ».

           Où étaient donc les « Indigènes de la République » ?

          Jean Pierre Renaud

L’Europe est une maison de passe Ou comment peut-on être européen ?

            Cela fait des années que la grande majorité de notre personnel politique et médiatique dénonce la montée de ce qu’ils appellent les populismes, mais sans avoir jamais apporté une réponse politique aux inquiétudes des citoyens européens.

           En 2002, Jospin et Chirac, les deux représentants d’une gauche socialiste et d’une droite supposée gaulliste, ont accepté l’entrée des pays de l’ancienne Europe de l’Est communiste, des pays qui n’étaient pas prêts à intégrer le système politique, social, et économique européen.

         Cette entrée prématurée a provoqué des déséquilibres dans de nombreux domaines, notamment sur le plan social, et en entraine aujourd’hui, plus de quatorze ans après, dans la gestion politique de l’Union.

        L’Union européenne a été menée au rythme du libéralisme Barroso de type anglo-saxon, sur la base des bienfaits supposés de l’ouverture des marchés, quel qu’en soit le prix, et alors que la mondialisation des échanges constituait un facteur important de déstabilisation des sociétés européennes.

       L’Europe n’a donc pas joué son rôle de régulation, de protection.

        En parallèle, l’Union s’est dotée d’institutions qui fonctionnent comme des usines à gaz, des superbureaucraties que les citoyens ne connaissent pas, n’élisent pas, ne contrôlent pas.

       Qui commande dans ce magma institutionnel ?

      Tout le monde sait depuis de très nombreuses années que l’Union doit changer, qu’il faut enfin acter le fait qu’elle fonctionne à plusieurs vitesses, mais avez-vous entendu un Bayrou, un Sarkozy, ou un Hollande, mettre sur la table un projet précis de refonte des institutions européennes ? Non, trois fois non !

         Le séisme des migrants ou des réfugiés, car comment les dénommer ? sans que l’Union ait été capable d’anticiper, ébranle sérieusement  ses institutions, compte tenu d’une ouverture incontrôlée et incontrôlable de ses frontières, et sans qu’elle soit en mesure d’adopter une politique commune, des flux migratoires qui font le jeu des populismes dénoncés par la grande majorité de la classe politique.

        La menace du Brexit constitue un deuxième facteur d’instabilité de l’Union, alors que la meilleure réponse qui aurait pu être apportée aurait été celle d’une refonte des institutions européennes, dont la réalité est déjà celle d’une Europe à géométrie variable, avec la constitution d’une zone euro charpentée sur le plan politique.

       Comment est-il possible d’être encore européen dans ce méli-mélo que personne ne comprend et ne défend ?

      A cela, la situation de la France ajoute sa dose de confusion, avec ses hésitations actuelles sur ses destinées collectives, des hésitations que les grandes inconnues de l’Europe ne font qu’accentuer.

     Une France dont la nature, l’organisation, et l’élection des corps intermédiaires, Parlement, collectivités, syndicats est complètement à revoir, afin qu’ils soient représentatifs des Français, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

     L’exemple le plus flagrant de cette situation est celui du Conseil Economique Social Environnemental dont les Français ne connaissent pas mieux l’existence que ses fonctions.

       Avez-vous eu connaissance du rôle qu’il a pu jouer dans les négociations économiques et sociales ? Récemment encore avec le vote de la loi Travail ?  Non !

      Quand l’élite politico-médiatique qui nous gouverne encore, aura-t-elle le courage de supprimer ce refuge  des sinécures ?

Jean Pierre Renaud

« Leçons indiennes » Itinéraires d’un historien » Sanjay Subrahmanyam- Troisième partie et fin

« Leçons indiennes »

« Itinéraires d’un historien »

« Delhi .Lisbonne. Paris. Los Angeles »

Sanjay Subrahmanyam

&

Troisième partie et fin
Mélanges
         Racisme, islam, hindouisme…

       Leçons, 5 « Orgueil et préjugés de V.S.Naipaul », 12 « Le roman, l’islam et les versets sataniques », 16 « Le 11 septembre, l’islam et les Etats Unis », 20 «  Un miroir indien pour Israël »

          Quelques mots sur Naipaul qui n’est pas en odeur de sainteté chez l’auteur, le titre de la leçon 5 suffirait à l’exprimer, et une seule citation :

               « Sur un autre bord, à distance, le protestantisme attire, mais une bonne part de ce protestantisme ne s’accommode guère du métissage culturel, c’est plutôt un  système du tout ou rien. En outre, les Indiens vivant hors de l’Inde – c’est bien connu- sont facilement racistes quand il s’agit des autres peuples de couleur : la rhétorique anti noire qui imprègne les écrits de Naipaul (y compris le premier chapitre de ce livre) n’est une fois encore, que le symptôme d’un plus large malaise qui s’étend de l’Afrique au New Jersey. » (p,88)

           En reprenant un titre connu de Jane Austen, l’auteur a choisi un titre tout à fait révélateur de son jugement  sur Naipaul.

           Quelques mots également sur les autres sujets sensibles qui sont traités dans les autres leçons, le grave différend qui continue à opposer en Inde la majorité des citoyens de religion musulmane et de religion hindoue- inutile de rappeler la tragédie qui a suivi l’indépendance de l’Inde, considérée souvent comme un succès britannique -, le jugement sans appel de l’auteur sur la signification du 11 septembre ;

           « Au fond, contrairement à ce qui a été affirmé au lendemain du 11 septembre, le choc majeur auquel on a alors assisté n’était pas entre tradition et modernité ou entre religion et sécularisme. Les Etats Unis ont bien plutôt été attaqués comme puissance chrétienne, et, malheureusement, ils ont endossé ce rôle avec toujours plus d’empressement. » (p,266)

    Leçon 19 «  Un Parisien ambigu »

        Le lecteur  ne m’aurait sans doute pas pardonné de ne pas évoquer le contenu de cette leçon, un contenu effectivement ambigu, pour reprendre le qualificatif du titre, mais aussi dans un autre sens.

          « La capitale m’attirait. Je voudrais évoquer ici le souvenir de cette attraction pour Paris – une attraction très ambiguë. La manière quelque peu singulière dont je découvris la ville vaut d’être contée. » (p,298)

               La description que fait l’auteur de Paris et de la vie parisienne est déroutante et pose la question de l’objectivité dont peut faire preuve l’observateur lorsqu’il débarque dans une capitale qu’il ne connaissait pas, même lorsque cet observateur, tel l’auteur, parait muni de tous les sacrements susceptibles de lui éviter de commettre le péché très partagé du fameux ethnocentrisme.

                   Il y a dans cette leçon un parfum du « Comment peut-on être Persan ? »  de Montesquieu, mais il parait difficile d’entériner telle ou telle observation, quand il s’attache à souligner l’importance dans la vie parisienne du fait divers, des exploits de grands criminels, ou quand il écrit :

             « Paris est aujourd’hui massivement une ville d’immigration «  (p,300), ou

             « En 1988, comme c’est toujours le cas aujourd’hui, Paris était en grande partie une ville de Maghrébins et pour les Maghrébins. «  (p,301)

         Mieux fondé parait être son jugement sur la contradiction qui habite le parisien entre une soi-disant solidarité collective et son individualisme forcené :

         « Ceux qui applaudissent les bandits branchés et les rois de l’évasion expriment, de manière troublante, l’esprit d’une cité dans laquelle chacun semble ne vivre que pour soi-même, à l’abri de cette justification typiquement française : Moi, monsieur, je paie mes impôts …

       Mes derniers exemples sur la tension entre discours de solidarité collective et réalité d’individualisme débridé devraient paraître plus légers, mais ils n’en reposent pas moins sur l’amère vérité de l’expérience. ». (p,311)

          Et pour finir sur une note tout à fait parisienne, les chiens des parisiens :

       « Mais c’est dans leur relations avec les chiens que les Parisiens se révèlent sous leur vrai jour » (p,312),  dont la possession s’est « démocratisée » depuis vingt ans, avec une vraie référence historique tout à fait justifiée, celle de l’arrivée des « chiraclettes » (p,314)

     La leçon 21 « A travers trois continents »

       Cette dernière leçon a un contenu très varié compte tenu de l’expérience internationale de cet historien.

         A la question :  « Dans quelle mesure avez-vous été – comme d’autres jeunes intellectuels indiens – influencé par les idées maoïstes ou par le marxisme soviétique, ou encore par le discours critique surgi en mai 1968 ? »

     Longue réponse de l’auteur, dont j’ai retenu les propos ci-après :

         « Personne ne peut écrire une histoire qui soit totalement dénuée d’implication politique. En tout cas je cherche à établir une distinction entre mes écrits plus «populaires » et ceux scientifiques, réservant les sujets explicitement politiques  pour les premiers. Il arrive néanmoins que cette frontière se brouille. » (p,332)

          A la question : « Dans votre carrière universitaire, on observe un déplacement. Après vous être centré sur des phénomènes historiques de nature résolument économique, vous avez évolué vers une approche de plus en plus politique et culturelle. Avez-vous changé votre manière de faire de l’histoire ? »

        Longue réponse de l’auteur dont j’ai extrait les propos ci-après :

        « Pourtant, je crois pouvoir dire que je me suis déplacé sur plus de terrains et que j’ai brassé des matériaux plus diversifiés que la moyenne de mes contemporains. L’autre grande difficulté a été de réguler cet éclectisme par un certain degré de cohérence intellectuelle, de manière à ne pas combiner artificiellement des méthodes et des perspectives qui, en réalité, sont radicalement hétérogènes et à ne pas dire un jour le contraire de ce qu’’on a dit la veille » (p,336)

        A la question : « Comment situer Explorations in Connected History ? Quels sont les avantages de la méthode que vous y adoptez ? Comment le local s’insère-t-il dans un plus large espace. Les « histoires connectées » sont-elles un moyen d’envisager la globalisation ? »

      Un petit extrait :

       « C’est juste une manière de dire qu’il vaut peut-être mieux appréhender l’histoire du Portugal dans son propre contexte qu’en comparant le Portugal à la Grande Bretagne et en voyant le dernier au miroir du premier. Si l’on fait ce genre de comparaison, le Portugal devient un cas de régime bourgeois qui a échoué, ou un exemple du retard de l’industrialisation et du développement capitaliste. Un exercice stérile. » (p,338)

      A la question : «  Fukuyama, qui avait parlé de la « fin de l’histoire », s’est mis à écrire sur le « retour de l’histoire » après le 11 septembre. Cette obsession de l’histoire est-elle un trait occidental ? »

     Un petit extrait :

    « Le plus inquiétant, me semble-t-il, est « l’ auto-orientalisation » de certains intellectuels indiens dans le cadre des études postcoloniales : ils insistent sur le fait que l’ « histoire » est une vision  purement occidentale et qu’eux-mêmes devraient vivre en dehors de l’histoire. » (p,342)

     A la question : «  Quel écho rencontre en Inde la reconfiguration des rapports de l’Occident avec le monde musulman ?

      Un extrait :

      «  Le problème en l’occurrence, c’est que beaucoup de mouvements politiques de droite, en Inde, partagent la peur et la haine de l’islam avec une partie des médias et des conservateurs occidentaux. Cet état de fait remonte au mouvement nationaliste indien et à la théorie des deux nations, au nom de laquelle des idéologues comme V.D. Savarkar ont soutenu que les hindous et les musulmans ne pourront jamais coexister dans le même espace politique. » (p342)

        Question raccourcie : « …Pensez-vous que l’historien peut encore intervenir dans la formation d’une mémoire historique collective ? »

         Un extrait :

       « Mais je sais avec certitude que l’histoire n’est pas ce qu’en disent tant de théoriciens postcolonjaux qui la dépeignent comme une stratégie néfaste, oppressive, hégémonique inventée par l’Occident » (p,345)

      A la question : «  Quels sont, selon vous, les avantages et les désavantages d’être « de l’intérieur » quand on fait l’histoire d’un pays donné, ou pour utiliser le vocabulaire de l’anthropologie, d’être un participant-observateur qui maitrise les codes culturels ? Est-il préférable d’être de « l’extérieur » ?  

        Un extrait :

        « … il n’y a pas pour autant de différence évidente entre une approche « de l’intérieur » ou « de l’extérieur ». En ce sens, nous sommes bien loin de la situation en anthropologie.. » (p,345)

      A la question : « Comment voyez-vous ce que d’aucuns appellent la nouvelle « hégémonie » des intellectuels indiens, en particulier pour ce qui concerne le monde universitaire occidental ?

        Un extrait :

        « … J’admets volontiers que, dans l’ éveil des Etudes subalternes, il y a eu une onde de choc et un effet de réseau, si bien que les universités américaines ont rivalisé entre elles pour recruter des spécialistes qui enseignent l’histoire postcoloniale et l’histoire sur le mode « subalterne ».(p,350)

       Ma propre question : il est peut-être dommage qu’une des leçons n’ait pas porté sur le système des castes en Inde, un système qui aurait peut-être éclairé d’une certaine façon une des faces persistantes de l’histoire indienne, reliée incontestablement au discours que les intellectuels indiens tiennent sur le « subaltern ».

         Une observation : est-ce qu’on ne peut pas comparer cette discrétion, pour ne pas dire cette impasse historique, à celle que semblent commettre certains chercheurs africains sur une des faces cachées de leur histoire, c’est-à-dire l’esclavage interne ?

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

Chronique N° 8 de la France « d’en bas »- La loi Travail? Pourquoi la France se cabre?


            Le gouvernement s’est enlisé dans sa réforme du Code du Travail, et les raisons de cette situation sont évidemment très nombreuses :

            Proposons en quelques-unes :

           Un mot seulement sur l’instabilité du monde actuel, des effets d’une mondialisation mal régulée, notamment par une Union européenne privée de colonne vertébrale, des facteurs qui ne contribuent pas à faciliter les évolutions politiques, économiques et sociales pourtant nécessaires.

        Hollande a été élu sur un programme de la « demande » sociale, alors que la situation de la France imposait une politique de « l’offre », c’est-à-dire le choix de l’entreprise, la baisse de sa fiscalité, donc les investissements, les exportations, et en définitive les vrais emplois.

      La France paie aujourd’hui ce mauvais diagnostic, en dépit du virage à quatre-vingt-dix degrés qu’Hollande a pris depuis deux ans, c’est-à-dire une politique tournée vers l’entreprise.

      Résultat des courses et pour employer un terme savant de la stratégie militaire, le gouvernement actuel se bat à « front renversé », une configuration de combat désespérée, avec dans son dos et pour adversaire, une grande partie de son ancien camp politique.

         Une carence de pédagogie, car les Français n’ont pas vraiment compris les enjeux de cette réforme, de toute façon trop tardive dans le calendrier politique, pour faire comprendre qu’en facilitant la mobilité du travail, c’est-à-dire qu’on le veuille ou non, une précarité sociale déjà très présente, il est possible de diminuer sensiblement l’effectif des chômeurs, en redonnant de la souplesse aux entreprises.

             En contrepartie, Il est nécessaire d’inventer des solutions nouvelles afin de sécuriser les salariés en adossant leur parcours du travail ou du non-travail à une structure stable de protection économique et sociale.

           Cette carence de pédagogie est incontestablement une, sinon la seule,  des raisons principales pour laquelle la France se cabre devant l’obstacle, liée évidemment à l’insuffisance du projet quant à cette dimension de protection sociale nécessaire, dans l’intérêt même de l’évolution économique tout aussi nécessaire.

         Un mot seulement enfin sur le rôle pervers de certains syndicats dont la représentativité mérite d’être sérieusement discutée, sinon contestée, qui voient d’un très mauvais œil la perte de pouvoir que cette réforme leur causerait, à partir du moment, où la base sociale, au niveau de l’entreprise,  leur échapperait, alors que leur organisation centralisée leur donne encore les moyens de subsister.

Jean Pierre Renaud

« Leçons indiennes » Sanjay Subrahmanyam – Lecture critique – Deuxième partie

« Leçons indiennes »

« Itinéraires d’un historien »

« Delhi .Lisbonne. Paris. Los Angeles »

Sanjay Subrahmanyam

Lecture critique

&

Deuxième partie
Occident et Empire

            L’OCCIDENT – Leçon 2 « Retour vers le futur : pourquoi l’Occident domine le monde ? »

(pages 31 à 41)

             L’auteur a dans sa ligne de mire deux intellectuels Morris et Pomeranz.

           Le concept historique d’Occident est depuis longtemps un sujet de controverse, et l’auteur écrit :

           «  Les questions que pose Morris expose lui-même explicitement sont : 1) pourquoi « l’Occident » domine-t-il actuellement le monde ? 2) Combien de temps cette domination est-elle censée durer ? » (p,33)

         Un espace ou une idéologie ?

          Morris : « Il entend donc traiter de l’Occident et de l’Orient comme appellations géographiques, sans jugement de valeur – du moins à l’en croire » (p,35)

         Pomeranz : « Pomeranz ne se préoccupe non pas de l’Occident mais de l’Europe occidentale et même d’une région qu’il définit assez précisément »

        Morris « Comme contretype de ce matériau occidental, Morris a décidé de choisir un autre lieu. Son choix s’est tourné vers la Chine, (bien qu’on croie comprendre qu’il ne lit ni le chinois ni le japonais. » (p,36)

       « C’est la cueillette des cerises transposée à l’histoire, pour ne pas dire plus. » (p,37)

         « La mentalité binaire qui caractérise l’ouvrage tout entier. Mais depuis quand les historiens sont-ils effrayés par la complexité ? »

         Les appréciations de l’auteur sont violentes :

           « …une sorte de charabia …, pseudo-science naïve,… Il comporte un étalage d’érudition dont la fonction s’apparente aux poignées de confettis jetés en l’air pour distraire le spectateur pendant l’avancée du défilé… Peut- être est-ce vraiment une blague que nous joue un professeur érudit de grand talent qui a décidé de se métamorphoser, l’espace d’un instant, en un croisement de Nostradamus et de Bécassine. » (p,40)

         Fin de leçon : le lecteur partage le doute du professeur sur la nature et la définition relative de ce qu’est l’Occident, mais était-ce le seul but de la leçon ?

         UN EMPIRE ?

         Un autre sujet tout aussi sensible et polémique, celui de la signification historique du concept  d’empire, abordé par la Leçon 8 « Qu’est-ce qu’un Empire ? », un sujet très à la mode.

       En France, certaines écoles historiques n’ont-t-elles pas tendance à considérer que l’empire est avant tout un concept colonialiste ?

        En 1866, quoi de commun entre l’Empire du Brésil et l’Empire Ottoman ?

         L’auteur consacre sa réflexion au livre de John Darwin « Après Tamerlan » consacré à « l’histoire globale de l’empire depuis 1405 ». Il n’est pas interdit de se demander ce que l’auteur entend exactement par « empire ». John Darwin n’affronte pas cette question directement. Mais on peut y réfléchir en posant deux questions corollaires. En premier lieu, qu’est-ce qui n’est pas empire (et par conséquent exclu de cet ouvrage ) ? En second lieu, quels sont les autres termes qui vont de pair avec « empire », dans un de ces couples d’oppositions complémentaires dont les historiens et les spécialistes de sciences sociales raffolent, comme « empire » opposé à « Etat nation ? » (p,136)

      Le livre : «  Il met en avant trois vastes thèmes : l’évolution de la connexion globale vers la globalisation ; le rôle de l’Europe et des empires européens dans ces transformations de longue durée ; la « résilience » – peut-être faudrait-il dire le pouvoir résiduel – des Etats non-européens et des autres acteurs dans le processus.

       Ces thèmes sont à leur tour liés avec ce que John Darwin choisit d’appeler – « les quatre postulats de base » qui émergent rapidement dans l’ouvrage et sont les suivants :

  1.     la mutation historique produite par et à travers les empires après 1400 fut conjoncturelle et réversible, non pas linéaire, cumulative, et téléologique ;
  2.      dans ces six siècles, l’Europe doit constamment être replacée dans le plus vaste ensemble de l’Eurasie, afin d’échapper au piège de l’exception européenne ;
  3.       l’idée d’ « Europe » en elle-même doit être soumise à une constante interrogation pour distinguer ses diverses acceptions, comme « espace géographique, communauté socio-politique et programme culturel » ;
  4.       l’empire est une réalité largement répandue et pas uniquement une réalité européenne ; en fait, c’est « le mode par défaut d’organisation politique au long du plus clair de l’histoire », plutôt que «  le péché originel des peuples européens ». (p,136)

       « En quoi les trois premiers de ces quatre points sont-ils réellement des « postulats » – non des hypothèses ou des spéculations ? Ce n’est pas immédiatement évident. Toutefois, pris globalement, ils permettent de situer assez précisément John Darwin dans un  champ historiographique en tension : il n’est ni de ceux qui affichent une version triomphaliste de la mission universelle d’ l’Europe, ni le fervent partisan d’un certain style d’études postcoloniales. Ses interprétations ne se prêtent pas au politiquement correct. Pour autant, il ne succombe pas au radicalisme inverse du politiquement incorrect. Ce livre est en bref, une tentative de judicieux équilibre, ce qui peut évidemment susciter des ennemis de tous bords. » (p,137)

         Il est noté que l’histoire globale n’est pas nouvelle, voir Hérodote.

       « Reprenant au départ l’idée de « trois grandes zones de civilisation », à savoir la Chine, le monde islamique et l’Europe… (page 140

    … Rappelons que, dans « Une grande divergence » (2000 ; traduction française de 2010), Kenneth Pomeranz, spécialiste de la Chine, établit d’abord la quasi-équivalence, au XVIIIème siècle, entre les niveaux de développement socio-économique de l’Angleterre, berceau du décollage industriel européen, et ceux de la vallée du delta du Yangzi…Sa thèse n’a pas été sans provoquer de vives discussions…(p, 141)

      « … Nombre d’assertions et d’hypothèses stimulantes feront sans doute de ce livre, dans la prochaine décennie, un point de départ et de référence  pour des essais et des réflexions sur l’histoire globale… N’en demeurent pas moins quelques troublants problèmes conceptuels.

      Prenons, pour commencer, le terme « empire ». Nous l’avons vu, John Darwin ne se soucie guère de le définir, le considérant peut-être comme une notion qui relève du sens commun ou dont il suffirait de rechercher la définition dans l’Oxford English Dictionnary…

     De toute « évidence, les empires doivent être distingués d’autres formes politiques qui existent dans l’espace, comme les cités-Etats, les royaumes d’une pièce, ou les républiques ou les Etats-nations – dont certains ont en fait une assez courte histoire, même s’ils projettent encore leur ombre sur les débats actuels

      Au premier abord, c’est une question d’échelle, mais les choses ne sont pas si simples……

      Le raisonnement doit être explicité. L’empire implique une complexité politique, une diversité culturelle – le plus souvent, ethnique et linguistique – parmi les populations sujettes. La forme typique que prend cette complexité politique est une palette de dispositifs politiques et administratifs hétérogènes au travers de l’espace, s’accompagnant de phénomènes de souveraineté superposée. L’empire ottoman aux XVIème et XVIIème siècles en est un excellent exemple.…

       L’empire ici en vient à signifier diversité, tolérance et droit à la différence, à l’inverse de l’Etat-nation avec son penchant intrinsèque de l’homogénéité dans les domaines linguistique, religieux et autres… » (p,144,145)

       « Le problème, c’est que les empires peuvent être radicalement différents les uns des autres. Nous pouvons provisoirement en esquisser une vague classification pour la période postérieure à 1 400, même si c’est un peu à la manière de Borges :

  1.       Les empires qui pensent qu’ils sont des empires… Cette catégorie, la plus évidente, inclut les Ottomans, les Habsbourg, les Moghols, etc   …
  2.      Les Etats qui prétendent être des empires, bien qu’il y ait de bonnes raisons de douter du bien-fondé de leurs prétentions. Les danois au XVIIème siècle en sont un bon exemple, quelque peu obscur, mais sans doute peut-on aussi classer dans cette catégorie le Brésil du XIXème siècle.
  3.       Les empires qui nient être des empires. La Compagnie anglaise des Indes orientales vient immédiatement à l’esprit, comme la Compagnie hollandaise des Indes orientales, en certaines de ses incarnations. Si l’on accepte la classification de John Darwin, c’est là que devraient se retrouver les Etats Unis.
  4.       Le cas sur lesquels on n’arrive pas à trancher. Ainsi de l’Iran safaride ou de la Chine des Ming par opposition à la Chine des Qing. Autant de pouvoirs dont les traits impériaux semblent faiblement constitués.
  5.    Les empires continentaux d’un seul bloc, opposés aux empires avec des possessions séparées par de larges étendues d’eau.
  6.     Les empires constitués de petits territoires dispersés sur un vaste espace, comme l’empire portugais du XVI ème siècle.

       On voit maintenant la difficulté qu’il y a à manipuler la catégorie « empire » et la nécessité d’arriver à un accord qui prenne en compte cette difficulté plutôt que d’en nier l’existence. Il est vrai qu’«empire » est plus facile à manipuler que, par exemple, « globalisation », ou « modernité », en ceci qu’elle est beaucoup plus une abstraction et qu’à certains égards, elle est conjointement relativiste et universaliste. Ce qui complique un peu plus le problème, c’est qu’au XVème ou au XVIème siècle, l’entité qui était expressément opposée à l’empire était le royaume autonome (qui pouvait avoir ou ne pas avoir une base ethnique) alors qu’au XXème siècle, c’était l’Etat –nation (dont les citoyens avaient tous une  nationalité « commune ». (p,147)

          Je me suis beaucoup étendu sur les citations de l’auteur, ses raisonnements, ses définitions, sa classification, ses réflexions stimulantes, mais à dire la vérité, j’éprouve une certaine déception à ne pas y avoir trouvé de réponse au classement qui pourrait être proposé pour les empires coloniaux des 19 et 20ème siècles, sauf à dire qu’implicitement ils rentrent dans telle ou telle catégorie proposée, alors qu’il d’agit d’un sujet qui parait être encore un objet de vives controverses dans certains milieux de chercheurs.

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

Chronique N°7 de la France d’en bas- Etat d’urgence ? Etat d’urgence?

   « Etat d’urgence » contre les attentats terroristes ! « Etat de guerre » contre Daech !

           Après le Mali, la Centrafrique, le Sahel, le Moyen Orient ! ! Hollande s’érige en justicier international des conflits.

           Et pendant ce temps-là, que voit-on ? Depuis des semaines et des semaines, sans discontinuer, avec Nuit Debout et les manifs contre la loi Travail, les forces de l’ordre sont en permanence mises à contribution, mais dans quel but ? Maintien de l’ordre public ou lutte contre les menaces terroristes ?

            Depuis des semaines et des semaines, ces graves désordres nourrissent l’actualité des médias. Le 18 mai 2016, à titre d’exemple, en première page de La Croix : « Mais que peut faire la police ? », en deuxième et troisième pages, « Les policiers face aux nouveau défis du maintien de l’ordre », « Depuis les attentats, la fatigue s’accumule ».

          Je corrigerais volontiers le titre de la première page en écrivant « Mais que doit faire la police ? ».

          Et pendant ce temps-là, les commandos des ultragauches s’entrainent   place de la République, sur un magnifique terrain, pour une autre guerre intérieure ?

        Oui ou non, la France est-elle en « état d’urgence » ?

         Comment le croire puisque les médias, tout comme le gouvernement, font comme si ce n’était pas le cas ?

       Au journal du soir du13 mai, sur France 2, et à Rennes, ville de graves désordres, le ministre de l’Intérieur expliquait gravement qu’il fallait tout à la fois faire preuve d’autorité, et respecter la liberté de manifester, c’est-à-dire de déployer, sans discontinuer, nos forces de police contre des bandes de casseurs au lieu de se mobiliser pour maintenir la paix civile dans  notre pays.

        Que de contradictions et de circonvolutions, pour ne pas dire d’innocence vraie ou fausse ! Hollande va en Nigéria proposer son aide militaire, Le Drian, va porter bonne parole et feu dans les pays où la France a cru devoir s’engager, Ayrault, va plaider à Tel Aviv et à Ramallah, pour une nouvelle étape de pacification de ces territoires, alors qu’ils ne sont pas foutus d’entretenir ou de préserver la paix civile en France, à Rennes, ou Nantes.

       Ces jours-ci, Valls passe trois jours en Israël et Palestine.

         On croit rêver ! Mais non, c’est la réalité d’une France politique complètement zinzin !

Jean Pierre Renaud