Question difficile pour un interlocuteur toujours attentif à son destin, mais disposant d’une approche insuffisante de l’actualité et des acteurs de sa vie politique d’aujourd’hui, mais je vais tenter d’y répondre.
Pourquoi votre vie nationale est régulièrement ponctuée par des coups d’Etat, dont le dernier, celui de l’actuel « président » d’une transition qui dure et dont on ne connaît pas encore le débouché ? « L’immature » !
La première raison est liée, à mes yeux, au manque de sens de l’intérêt général de toute une partie de votre personnel politique, à sa morale élastique, plus soucieuse de fric, de places, que de servir son pays, sans doute aussi gangrenée par de la corruption. Notre personnel politique a démontré, lui aussi, qu’il n’était pas indemne de corruption, d’avidité de fric, et de pouvoir, mais la richesse du pays et l’important réseau de contre-pouvoirs en place, atténue cet handicap, qui me parait, chez vous, majeur.
Morale élastique d’une partie de votre haute fonction publique, dont la judiciaire, si je ne m’abuse, a vite trouvé des accommodements constitutionnels, pour légitimer, chemin faisant, les entorses successives à la loi fondamentale
Deuxième raison, des institutions qui ne favorisent pas le sain exercice du pouvoir, démocratiquement contrôlé, et sur ce point, je n’ai pas de solution, sauf à renvoyer sur le discours d’Obama qui a dit des choses très sensées à ce sujet.
Troisième raison, le rôle inacceptable de votre armée, interférant en permanence dans le fonctionnement des pouvoirs publics. Et comment ne pas avoir été surpris d’avoir vu vos généraux disposant des plus grands pouvoirs à la tête des armées, se défiler, pour avoir peut-être éprouvé une peur physique, en n’ayant pas le courage de remettre le pays sur la bonne voie, au lieu de laisser faire de jeunes officiers, aussi incapables que le « président » actuel d’avoir une vision nationale de l’intérêt général du pays ? En résumé, le pouvoir remis à des porteurs de kalachnikov !
Quatrième raison, l’interférence permanente de vos églises dans le fonctionnement des pouvoirs publics : leur intervention n’a pas été de nature à faire avancer une véritable solution de réforme. Et j’ai vu récemment, sur une de nos chaînes, un documentaire sur Madagascar où l’on voyait le « président » en compagnie du père Pedro qui se félicitait, sauf erreur de ma part, de la visite du « président » dans son institution : enfin « un président » qui s’intéresse aux pauvres !.
Et c’est là une cinquième raison des malheurs actuels, la présence de plus en plus importante de pauvres qui, au fur et à mesure des années, se sont agglutinés dans votre capitale ingérable, et que votre personnel politique ne se prive pas de manipuler. Cette masse de prolétaires est à la merci de n’importe quel efficace et rémunérateur agitateur. Donc pas de solution en profondeur avant la mise en œuvre d’un très gros programme de développement, de meilleure répartition des richesses, car les inégalités sont beaucoup trop importantes et criantes, et sur une longue durée, de cinq à quinze ans.
Tout cela fait beaucoup, mais la priorité me semble être celle de faire revenir l’intérêt général et la morale publique au sein de vos institutions, et peut-être faut-il les changer, mais je n’en sais rien.
Pour conclure, vous ne pouvez imaginer les déceptions que cause la nouvelle crise à tous ceux qui aiment la grande île et qui sont persuadés qu’elle peut avoir un grand avenir, à la condition d’y faire revenir à la fois le bon sens et la vertu.
Et que la force soit enfin au service du droit !