Humeur Tique : Français, réveillez-vous ! Le trou sans fond de la « Sécu » !

    Le Monde du 23 mars a publié un article fort intéressant intitulé (page 15) :

«  Le trou de la « Sécu, urgence oubliée de la campagne »

            Cet article énumère l’ensemble des facteurs analysés par un haut fonctionnaire de la Cour des Comptes, d’après lequel, notamment en raison du vieillissement de la population, et si rien n’est fait, le déficit de la Sécurité Sociale, atteindra 19 milliards en 2020, au lieu de 9,5 milliards en 2011.

            Il faut rappeler que les déficits cumulés du passé nourrissent déjà une dette couverte par emprunt, de l’ordre de 80 milliards.

            Il est évident que cela ne peut plus continuer comme ça !

            En plus du déficit du budget de l’Etat et de nos comptes extérieurs ?

            Il est donc urgent de faire une chasse civique impitoyable aux abus de toute nature qui alourdissent encore, non seulement notre facture, mais plus grave encore, celle de nos enfants et petits-enfants !

Choix diplomatiques en cas d’alternance? Une diplomatie française d’Epictète ou non?

« Les choix diplomatiques d’un Président »

De Pascal Boniface dans La Croix du 22 février 2012, page 27 « Autrement dit »

« Que signifie l’alternance pour la politique étrangère française ? Inventons une autre diplomatie pour faire face à un monde changeant »

Le Monde du 1er mars 2012 Décryptages Débats, page 20

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Une diplomatie française d’Epictète ou non ?

Une sagesse de 2000 ans, toujours d’actualité !

            Deux textes intéressants, publiés par deux journaux, La Croix et Le Monde, mais des textes qui suscitent beaucoup de questions de la part d’un lecteur qui attache beaucoup d’importance à la politique étrangère de la France.

            Curieusement, et tout d’abord, la nette impression,

– que le contenu du premier article personnalise, je serais tenté de dire à outrance, le débat engagé sur ce thème important, une sorte de jugement politique du Président sortant, alors que le débat ouvert dépasse largement la question des personnes.

–    et que celui du deuxième situe effectivement sa réflexion dans le champ de l’alternance politique, pourquoi pas ? mais les enjeux de ce débat  paraissent dépasser largement les deux champs de réflexion ainsi fixés.

            M.Boniface propose de distinguer plusieurs problèmes. « Le premier consiste à différencier les évolutions sur lesquelles il n’y a pas de prise de celles sur lesquelles un choix peut et doit être fait »

            L’auteur parait avoir oublié d’énoncer les autres problèmes, alors que l’allusion à la célèbre phrase d’Epictète : « ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous » aurait été effectivement un bon chemin pour poser la problématique de la politique étrangère de la France.

Il ne lui apparait pas qu’une véritable  divergence de fond ait véritablement séparé la ligne qu’il qualifie l’une de « gaullo-mitterandisme », de l’autre, « mettant l’accent sur la centralité du rôle de l’Otan ».

M.Laïdi parait proposer une démarche plus réaliste, fidèle à la pensée d’Epictète, en distinguant plusieurs cercles de notre action diplomatique, l’Europe, l’Atlantique, et la Méditerranée, mais quid des autres cercles ?

A mes yeux, le sage principe d’Epictète n’a jamais véritablement inspiré notre politique étrangère, ce qui s’exprimerait clairement dans la formule « une politique étrangère adaptée à nos moyens, c’est-à-dire à ceux d’une puissance moyenne. »

Et là, devrait être la rupture, sans se payer de mots, et sans faire croire que de nos jours la France exerce une souveraineté sans limite, alors que qu’elle la partage de plus en plus, en Europe d’abord, et dans le monde.

Cessons enfin de faire l’autruche ! Nous ne sommes plus au 17°,18°, 19°  siècles, et même, au début du 20° siècle ! Richelieu, Louis XIV, Napoléon, la 3ème République dans ses débuts, tout cela c’est le passé.

Choisissons des objectifs qui soient à notre portée, en Europe ou en Méditerranée, dans l’Atlantique, et dans le vaste monde, soit des actions propres lorsque nous en avons les moyens, et elles ne seront pas nombreuses, soit des actions communes quand nous ne les avons pas, et c’est la règle générale.

Pour le reste, contentons- nous de mener des actions indirectes, servies soit  1) par le fait que nous avons encore un rôle d’intermédiaire expérimenté, de « go between » selon l’expression anglaise, car notre puissance ne gêne plus beaucoup de monde,  2) ou encore, par un prestige culturel, peut-être, miraculeusement préservé.

En politique étrangère, il ne peut y avoir véritablement de rupture, sauf en cas de crise, mais ce qui manque à notre pays c’est une rupture dans nos ambitions et nos anciens rêves de grandeur.

Jean Pierre Renaud

Humeur Tique : les corps intermédiaires ? Quelle représentativité ? Quelle légitimité ?

Un débat typiquement français ! Pourquoi ?

Deux contributions utiles au débat :

Le Monde des 18 et 19 mars 2012, page 18

« Démocratie sociale ou référendaire » par M. Noblecourt

Le Monde du 20 mars 2012, page 18

« Selon Nicolas Sarkozy, certains syndicats et associations auraient confisqué la parole des Français. Ce sont pourtant de précieux rouages de la démocratie

Diktat des « corps intermédiaires » ? »  par Mme Druelle-Korn

            Avant tout commentaire, il serait naturellement intéressant de savoir si le maître de conférences est l’auteur du titre de sa contribution, beaucoup plus accrocheur que celui de l’article Noblecourt.

M.Noblecourt pose bien le problème d’un débat qui a été engagé d’abord sur le terrain syndical, entre le syndical et le politique, avec pour origine principale le conflit des retraites, en concluant sur le constat d’après lequel syndicats de salariés et syndicats patronaux seraient d’accord pour la « constitutionnalisation du dialogue social ».

Mme Druelle-Korn fait une bonne description du monde multiforme de ces corps intermédiaires que l’on a pris l’habitude de dénommer la société civile, leur rôle, leur utilité, en concluant sur une institution, le Conseil Economique et Social, qui résumerait les fonctions des corps intermédiaires dans notre pays.

Cette dernière contribution appelle toutefois quelques questions de fond qui, semble-t-il, n’apparaissent pas dans le texte : quant à la représentativité des corps intermédiaires en question, leur légitimité, et donc leur crédibilité politique, en regard, entre autres, et à titre principal et capital, du rôle du suffrage universel.

La représentativité des corps intermédiaires ?

Mme Druelle-Kron doit savoir que les syndicats salariés souffrent d’un défaut notoire de représentativité, étant donné la faible participation des salariés à chacune des élections de leurs instances  représentatives. Quant à celle des patrons, l’entrecroisement de leurs syndicats, ne serait-ce qu’entre les deux principaux, MEDEF et CGPME, laisse tout aussi perplexe sur leur représentativité.

Au-delà de cette faible représentativité, ces corps intermédiaires manquent généralement de transparence sur leurs ressources, comme vient de le démontrer le rapport d’une commission parlementaire.

En ce qui concerne les Chambres de Commerce et d’Industrie, les observateurs savent que les scrutins mobilisent une petite minorité de leurs adhérents, moins de 20% à Paris, sauf erreur, avec des pourcentages un peu plus représentatifs en province, des taux de participation qui mettent sérieusement en doute leur légitimité au plan national.

Dans l’état actuel des choses, et des règles du jeu mises en œuvre, les corps intermédiaires en question manquent donc de légitimité, et ne sauraient en tout état de cause se substituer au suffrage universel.

L’utilité des corps intermédiaires ?

Oui, la démocratie sociale est chose utile, mais à la condition que les corps intermédiaires respectent quelques règles du jeu sur leur représentativité et leur financement, mais seul le vote obligatoire serait de nature à accréditer leur véritable fonction sociale.

Quant à l’utilité que Mme Druelle-Kron semble reconnaître au Conseil Economique et Social, il est également permis d’en douter : pourquoi ne pas lui poser la question : est-ce que cette instance a formulé un projet de réforme crédible des retraites ? Un dossier qui a été une des causes du débat sur le dialogue social en France !

Le Conseil en question a-t-il proposé une réforme du millefeuille territorial ? L’a-t-on entendu sur les grands sujets de réforme de notre pays ? Lesquels ? Alors qu’en parallèle, en complémentaire, ou en concurrence, se sont multipliés experts, conseils, ou comités ad hoc !

Dans l’état actuel des choses et des règles du jeu existantes, l’idée d’une constitutionnalisation du dialogue social parait tout à fait paradoxale, pour ne pas dire déconcertante, mais elle caractérise incontestablement l’infirmité dont souffre le dialogue social entre patrons et salariés, son incapacité à produire du consensus social, en dehors de toute intervention de l’Etat.

Le film « La Taupe » de Tomas Alfredson : un thriller ?

 A la page 24 du journal Le Monde du 18 février 2012, un encart de pub d’un tiers de page pour le film « La Taupe », avec plein d’étoiles plein les yeux, et des commentaires dithyrambiques de huit médias cités, dont Le Monde  avec la mention « Eblouissant » 3 étoiles.

            Ma première remarque aurait trait à l’adjectif éblouissant, un peu surprenant pour évoquer un monde d’espions où tout est noir et glauque, et avec le symbole d’une taupe qui précisément ne voit rien, mais après tout pourquoi pas ?

L’histoire de l’espionnage est passionnante, celle de ces « héros » anonymes, combattants de l’ombre, prêts à mourir pour la cause qu’ils défendaient. Vous avouerez que ce n’est pas si fréquent !

Et avec la problématique du double-jeu, redoutable pour les acteurs de ce grand jeu des tromperies, des intoxications croisées, des opérations d’une désinformation qui ont souvent fait la force stratégique de la Grande Bretagne.

Ce film  nous emmène effectivement au cœur du sujet, ou tout au moins s’y efforce, car l’intrigue telle qu’elle est racontée, n’est pas convaincante.

Bravo à l’acteur qui incarne le chasseur de taupe, bravo aux images en ombres et lumières, avec un bémol donc pour l’intrigue qui est très difficile à suivre dans son déroulement, même quand on a l’habitude de tenter de s’orienter dans le labyrinthe des intrigues d’espionnage : on ne sait jamais qui est qui qui, et qui fait quoi ? Et encore moins ici !

Avant,  pendant, et après la dernière guerre, le M16, dit « Le cirque » a connu un période difficile avec la présence dans ses sphères dirigeantes de « taupes » au service de la puissance soviétique, issues de l’Université de Cambridge, devenues célèbres dans l’histoire de l’espionnage international.

Cela le film l’aide à le comprendre, mais  pour le reste, je ne suis pas sûr que si l’on demandait à des élèves de classe de « première », et même de « première » année de fac, de faire un résumé de l’intrigue de ce film, après l’avoir vu bien sûr, que ce résumé nous permette de mieux en suivre l’intrigue. Peut-être y verraient-ils un film d’espionnage du « premier » degré !

 Et enfin le regret que le film n’ait pas  bénéficié d’un court prologue historique sur les enjeux de la guerre froide.    

Jean Pierre Renaud 

Politique et Culture? La culture de nos femmes et hommes politiques? Mythe ou réalité? Doumer en Indochine en 1896

Politique et Culture ?

La culture de nos femmes et hommes politiques ?

Mythe ou réalité ?

Royal en Chine, Sarkozy à Dakar, Guéant à Paris

1896, en Indochine : l’exemple de Paul Doumer, Gouverneur général de l’Indochine

            Au fil des années, et à écouter nos femmes et nos hommes politiques, je me suis posé souvent la question de savoir si les dirigeants politique actuels étaient nourris d’une vraie culture.

            Tellement l’ignorance, béante, de nos gouvernants sur la civilisation chinoise, à l’occasion du passage de la flamme olympique à Paris, en 2008, paraissait évidente.

            Avec aussi le discours de Sarkozy à Dakar, ou celui plus récent du ministre de l’Intérieur sur les civilisations.

Autre exemple, si mes souvenirs sont exacts, celui de la visite de Mme Royal, habillée de blanc, couleur de deuil dans ce pays, sur la grande muraille de Chine avant les présidentielles 2007. Il me semble qu’elle ait porté, la même couleur blanche, celle aussi du culte vaudou, lors des funérailles du poète Césaire.

A l’occasion de l’émission du 8 mars  « De la parole et des actes » consacrée au candidat Bayrou, son déroulement connut, ce que j’appellerais un moment de grâce, ou tout simplement de culture, lorsqu’il fut convié à citer de mémoire des vers d’Edmond Rostand et de Louis Aragon, ce qu’il fit d’ailleurs avec un certain brio.

La culture de Doumer :

Pour mémoire, une longue carrière d’homme politique de la Troisième République, ministre, Président des deux assemblées, Président de la République en 1931,  assassiné en 1932. Trois de ses fils furent tués  pendant la première guerre mondiale, et le quatrième, gazé, décéda quelques années après.

D’origine provinciale modeste, son cursus de vie fut exceptionnel, l’exemple même de la méritocratie républicaine.

Doumer fut Gouverneur général de l’Indochine de 1896 à 1902, et il attacha son nom à la politique des grandes infrastructures de la colonie.

Afin d’avoir les moyens de mener à bien un important programme d’équipement de l’Indochine, la colonie avait besoin d’obtenir la garantie de l’Etat français pour réaliser un emprunt de 80 millions de francs or de l’époque, mais il y avait une sérieuse épine dans le pied de Doumer pour convaincre le gouvernement français d’accorder la garantie demandée, l’insécurité qui régnait encore dans le delta du Tonkin, à peu de distance d’Hanoï.

La rébellion du Yen-Thé sous la conduite du Dé-Tham

Le Dé-Tham,  tout à la fois chef rebelle et pirate, maintenait une très grande insécurité, depuis de longues années,  dans la province du Yen-Thé, à la fourche géographique de deux voies d’accès naturelles vers la Chine.

Doumer prit le parti de convaincre le Dé-Tham d’accepter sa soumission, et pour obtenir ce résultat, il chargea le commandant Péroz de lui mener la vie dure, sur le plan de la contre-guérilla, tout en lui ouvrant la porte d’une soumission pacifique.

Et pour ajouter du poids, du crédit à cette proposition de soumission pacifique, le Gouverneur général décida de faire une grande tournée à cheval, en novembre 1896, dans cette zone du Yen-Thé, que le lieutenant-colonel Péroz raconta dans son livre « Hors des chemins battus », en 1907. (1)

« C’est ainsi qu’une course à travers nos forêts, pour dangereuse et inconfortable qu’elle fut, n’était pas pour lui déplaire, s’il y voyait un résultat tangible…Pendant quatre jours, sous une pluie fine, serrée, incessante, nous parcourûmes à grande allure tous les recoins du Yen-thé. Soixante-dix à quatre-vingt kilomètres par jour ; une fois, nous dépassâmes la centaine. Tous les soirs, nous rallions le chef- lieu (Nha-Nam). J’avais cédé au gouverneur général ma chambre à coucher…

Commandant ! Commandant ! Le jour se lève. Partons-nous ?…

On déjeunait très sommairement sous le chaume d’un auvent : des sardines, quelques conserves, du biscuit et du thé (dans sa tournée à cheval)…

A table, il présidait avec ma femme en face de lui…L’extrême sobriété du gouverneur général nous étonnait… dans la demi-obscurité, que rendaient plus épaisse les lueurs vacillantes des photophores lointains, il nous charmait par la grâce et par la variété de ses entretiens…

Parfois, de sa voix métallique, il nous récitait des passages entiers des grands auteurs, si bien que, bercés par son débit coloré et chaud et fermant les yeux, nous avions l’illusion d’une audition de quel -qu’un de nos grands diseurs professionnels. C’était aussi, pour ceux d’entre nous qui avaient conservé le culte des lettres latines, des odes d’Horace et des lambeaux de tragédies antiques que notre vie tourmentée lui mettait en mémoire. »

Jean Pierre Renaud, dans le livre « Les confessions d’un officier des troupes coloniales – Marie Etienne Péroz -1857-1910 », dans le commandant Péroz et le Dé-Tham (chapitres 13 à 18) le passage en question – editionsjpr.com

Humeur Tique : Villepin, une nouvelle page d’anthologie de la modestie politique !

« Le premier tour pourrait être privé de pensée » de Villepin, Le Monde du 16 mars 2012, page 4 : en sa cruelle absence, bien sûr !

            Au choix, un premier prix de modestie politique !

Bienheureux les pauvres électeurs enfin privés du feu de sa constante et  incroyable mitraille verbale !

Humeur Tique: quartiers difficiles et solutions de grands élus de la Seine Saint Denis? Le vide presque parfait de Lao-Tseu?

Humeur Tique : quartiers difficiles et solutions de grands élus de Seine Saint Denis ? Le vide presque parfait de Lao Tseu ?

Article « Quelles politiques publiques pour les quartiers difficiles ? » France Inter Public Sénat, le Monde des 11 et 12 mars, page 18, par Matthieu Aron, Luc Bronner et Gilles Leclerc.

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Avec une forte envie de dire à tous ces élus, et peut-être aussi aux journalistes : vous ne vous en vous tirerez pas comme ça ! Toujours la faute à l’Etat !

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            Un entretien sans doute intéressant avec deux grands élus de la Seine Saint Denis, Mme Buffet, et M.Bartolone, mais un entretien qui laisse sur sa faim.

            Pourquoi ? Ce département compte sans doute le plus grand nombre de quartiers difficiles, mais il constitue aussi une collectivité qui dispose de gros moyens, à côté d’autres collectivités puissantes que sont les communes.

            La Seine Saint Denis compte un certain nombre de grands élus, en « poste » depuis des années, Le Roux, Bartolone, Guigou, Buffet, et plus récemment, Lagarde,  et dans le passé des gens comme Pandraud, Ralite ou Voynet.

            La plupart de ces grandes collectivités ne manquaient pas de matière grise avec leurs cabinets politiques, leurs directeurs généraux et directeurs, et au surplus, ils avaient la possibilité de solliciter la matière grise des grands partis politiques qu’ils représentaient, ou représentent encore.

A lire leurs propositions dans l’article en question, on en conclut que c’est à l’Etat de tout faire : la faute à l’Etat, le manque de policiers, le  manque de moyens au Pôle Emploi, le manque de logements sociaux, etc… pourquoi pas ?

Mais pourquoi ne pas leur poser la véritable question de fond :

Avez- vous jamais proposé à l’Etat, mais d’abord aux assemblées parlementaires un véritable projet, solide, un programme pluriannuel d’objectifs à atteindre, avec l’énumération des actions proposées, leurs coûts, et notamment la mise en place d’un réseau de remise à niveau social et économique polyvalent de ces quartiers ?

A ma connaissance, non !

M.Bronner aurait été fort bien placé pour poser ce type de questions, avec dans son bagage, son excellent livre, « La loi du ghetto »

Croyez-vous que l’Etat, mais l’Etat, c’est d’abord la gauche et la droite au pouvoir,  aurait pu toujours se défausser, comme c’est le cas, depuis au moins trente ans, hors le programme massif de rénovation  urbaine qui a été engagé et en partie réalisé, si les grands élus de la Seine Saint Denis avaient réellement pris le destin de leur département en mains et fait des propositions sérieuses ?

Difficile à croire, alors que le public initié à ce dossier a raison de penser qu’il souffre d’une grande vacuité de la pensée, de la réflexion, de l’action, et pour tout dire de la politique !

Le sentiment qu’en définitive il existe dans notre pays une véritable conspiration du silence, sinon une complicité entre médias et politiques, sur les responsabilités qui ont été, et sont encore, aujourd’hui, celles du politique !

Et donc, dans nos quartiers difficiles, le vide presque parfait du sage taoïste Lao Tseu !

Humeur Tique: avenir de l’outre-mer français et niches fiscales

Humeur Tique : le dernier rapport de la Cour des Comptes, la niche fiscale Girardin, et l’avenir de l’outre-mer

La Cour des comptes propose la suppression de cette niche fiscale dont les effets ne sont pas du tout concluants, et dont le coût pour le contribuable est de 1,3 milliard euros en 2011.

Cette proposition est à la fois légitime et opportune, mais elle soulève le véritable problème de l’avenir de l’outre-mer français que, ni le gouvernement central, ni les gouvernements locaux des régions ou des départements, n’ont le courage de regarder en face.

Les dernières révoltes, à Mayotte, et à La Réunion, ne paraissent pas avoir fait beaucoup avancer les choses sur le fond, c’est-à-dire :

1-   Pourquoi ne pas remédier à une auto-suffisance alimentaire défaillante, en développant les productions locales et en supprimant les rentes sociales et économiques qui y ont prospéré ?

2-   Il faut cesser de croire que le développement économique de ces territoires doit toujours passer par le marché métropolitain, au lieu des marchés régionaux qui sont propres à chacun de ces territoires.

3-   Il faut mettre fin à certaines rentes de situation, aussi bien dans la distribution que dans la fonction publique active ou retraitée, et à ce dernier égard, les économies réalisées pourraient être affectées dans un fonds de développement économique régional.

4-   Et pourquoi ne pas le dire ? Trop d’acteurs des politiques de l’outre-mer restent beaucoup trop et plus attachés aux liens traditionnels d’assistance de la métropole qu’à ceux nouveaux, d’une autonomie réelle et responsable.

Le premier député « nègre », d’après l’historien Noiriel et la pertinence historique

Le premier député « nègre », d’après l’historien Noiriel et la pertinence historique

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« L’humiliant apprentissage du premier député « nègre », Hégésippe Legitimus »

par Gérard Noiriel, historien, dans le journal Le Monde du 24 février 2012, Décryptages Débats, page 21

Ou les limites d’une démonstration historique ?

Une tribune intéressante sur la perception qu’avaient certains journaux d’un nouveau député « nègre », intéressante parce qu’elle cite à l’appui de sa démonstration des extraits de presse de l’année 1898, alors que l’histoire coloniale de la France souffre incontestablement d’une grande carence d’analyse de la presse, à la fois dans ses tirages, ses contenus, et dans ses effets sur l’opinion, ou de façon plus ambitieuse, sur la culture.

Comment proposer en effet une analyse de « L’idée coloniale », comme cela a  été le cas, ou d’une « Culture coloniale » supposée, comme cela a été aussi le cas, en se privant d’examiner un des vecteurs principaux de l’information, de la circulation des idées, et de la culture, c’est-à-dire les journaux ?

Une représentativité historique ?

L’historien cite 5 sources de journaux, mais cet éclairage aurait mérité d’être pondéré par le tirage de ces cinq journaux au cours de la même année 1898, les contenus relatifs d’information, ainsi que par une évaluation difficile des effets supposés.

Dans le livre « Supercherie coloniale », j’ai tenté d’analyser l’importance qu’avait pu avoir la presse comme vecteur de la propagande coloniale, et il me semble avoir démontré que dans l’état actuel des recherches historiques sur un tel sujet, il n’était pas possible d’en tirer une conclusion quelconque.

Au-delà des tirages et des contenus, se pose aussi, et en effet,  la question de l’effet des tirages et contenus analysés de la presse des différentes époques coloniales considérées.

Pour revenir à la démonstration proposée, il est possible de communiquer les chiffres des tirages des cinq journaux en question, pour l’année 1910, tirés de l’Histoire générale de la presse (1972), 26 000 pour le Journal des Débats, 37 000 pour Le Figaro, 50 000 pour La Presse, et 647 000 pour Le Matin, le seul journal qui soutenait la comparaison avec d’autres grands organes de presse de Paris ou de province.

En 1910, Le Journal tirait à 810 000 et le Petit Journal à 835 000, en précisant que le tirage des 75 journaux parisiens quotidiens était alors de 4 950 000, et que ceux de province faisaient jeu égal en tirage avec ceux de la capitale.

Je n’ai pas trouvé de trace chiffrée du Journal du Dimanche.

Peut-être l’auteur de cette tribune a-t-il les chiffres des tirages de l’année 1898 ?

Il apparait donc assez clairement que ce type d’information  historique pose le problème de sa représentativité, et au-delà celui de ses effets sur l’opinion.

Un héritage ?

Mais allons plus loin dans l’analyse, notamment à propos de la phrase :

« Les représentants du peuple français sont les héritiers d’une histoire conflictuelle, laquelle marque encore leur vision du monde. »

« Héritiers » ? Sûrement ? Par quel mystère de la foi ou de « l’inconscient collectif des Français »,  clé historique qui nous est proposée depuis des années par des historiens connus, une telle « vision du monde » a-t-elle pu nous être transmise ?

L’auteur a-t-il des preuves de caractère statistique ou scientifique que la mémoire collective de la France porte effectivement des signes de racisme, ou d’ancien « colonialisme » ?

Le cas de Madagascar

J’ai proposé à maintes reprises à différentes autorités, et jusqu’à présent sans succès, d’effectuer un sondage approfondi et sérieux sur la mémoire collective coloniale des Français, et je proposerais volontiers à l’EHSSS de passer à l’acte, mais je voudrais saisir l’occasion pour proposer une réflexion sur le même sujet à propos de Madagascar..

Si le lecteur a la curiosité de lire dans le Journal Officiel de la République Française des années 1894 et 1895,  les débats qui ont précédé ou entouré la funeste expédition de Madagascar, financée à crédit par les Caisses d’Epargne de France, pour 80 millions de francs or de l’époque, hors montant de son remboursement, évidemment plus élevé (avant 1914), et marquée par l’hécatombe de plus de six mille soldats, il pourra constater que les propos d’une partie des parlementaires, de droite ou de gauche, valaient largement les propos cités par l’auteur dans le cas examiné.

Quelques exemples :

Le 22 novembre 1894, à la Chambre des Députés, M. Denêcheau, député radical de l’Aisne  « Je place notre honneur trop haut pour admettre qu’un peuple sauvage, qu’une reine à demi-barbare, qu’un ministre dont nous ne pouvons même pas prononcer le nom, puissent y porter atteinte. » (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs )

 Le 24 novembre 1894, au Sénat, M.Delbet, Gauche Démocratique de Seine et Marne : « On parle des Hovas sans les connaître, sur un ton de plaisanterie qui contraste avec la gravité des circonstances ; que nous veulent ces sauvages avec leur gouvernement grotesque et leurs noms de l’autre monde ? »

Le 23 novembre 1894, au Sénat, M. Deloncle, Gauche Démocratique des Basses Alpes : « Les noms hovas sont des noms kilométriques. » (Plutôt aimable, n’est-ce pas ?)

Les débats furent très animés, aussi bien à la Chambre des Députés qu’au Sénat, beaucoup plus qu’au cours des séances de nos assemblées qui, de nos jours, sont quasiment privées, du fait de la réforme de la Constitution, faite en 2008, du droit de refuser les aventures militaires.

En Lybie, les opérations ont miraculeusement bien tourné, mais que serait – il arrivé si l’intervention avait été un fiasco ?

Mais revenons au sujet !

Les plus chauds partisans de l’expédition de Madagascar furent deux députés de la Réunion, MM Pierre-Alype et Brunetet rappelons que l’intervention de la France à Madagascar, en 1885, fut un « fait accompli » colonial décidé, la première fois, par un  ministre de la Marine représentant du même département, M de Mahy, qui ne fut alors ministre que pendant quinze jours.

Une partie de la représentation nationale tenait donc un discours affligeant sur le peuple et la monarchie malgache, mais peut-on en conclure aujourd’hui que nous sommes les héritiers de cette « vision du monde », ainsi que le fait l’auteur de cette tribune ?

Voire ! Avec une démonstration historique plus rigoureuse et une évaluation des effets modernes d’une telle vision qui n’était pas nécessairement dominante, et qui, de toute façon, était  « datée » ?

Dans le cas de Madagascar, je crains fort que cette thèse manque singulièrement de pertinence, étant donné que la plupart des Français ignorent presque tout, sinon tout de l’histoire coloniale, de Madagascar ou d’ailleurs, et que beaucoup d’entre eux ignorent même où elle se situe sur notre globe terrestre.

Peut-être en est-il autrement pour l’histoire d’autres îles, ou pour d’autres anciennes colonies françaises, hors Algérie, qui est un cas historique, tout à fait particulier, mais cela reste donc à démontrer.

En conclusion, un doute « scientifique » à la fois sur la pertinence de la représentativité historique de l’exemple cité et sur une transmission, par héritage, dans la mémoire collective de la France.

L’exemple d’un discours « ministériel » dénué de culture générale ne suffirait heureusement pas à accréditer de telles assertions historiques.

Jean Pierre Renaud.

Humeur Tique: Honneur d’un journal et Honneur d’un journaliste? Quelle pesée médiatique?

  L’affaire DSK a fait les choux gras des médias et des citoyens de France et de Navarre, des pages et des pages, des heures et des heures !

Elle continue du reste à le faire à petit feu.

Et par comparaison, dans le Monde du 3 mars un petit encart anodin, presqu’anonyme, à la page15  « Décryptage Débats » :

« Correspondance

Une lettre du journaliste Claude Askolovitch

A la suite de la publication de l’article intitulé « La double vie au FMI » (Le Monde du 21 février) Claude Askolovitch nous envoie le courrier suivant :

« L’information selon laquelle je me serais rendu à Washington à l’été 2010 en compagnie de Ramzi Khiroun pour préparer le futur livre de campagne du futur candidat Dominique Strauss-Kahn, est fausse. Je n’ai jamais été à Washington à l’été 2010, j’étais en vacances, en Normandie, au Danemark et en Suède. Je ne me suis jamais rendu à Washington en compagnie de Ramzi Khiroun quand M.Strauss-Kahn dirigeait le FMI. Je n’ai jamais préparé « le livre de campagne du futur candidat Strauss-Kahn.

Je ne peux que regretter la publicité donnée à des faits inexacts. »

Vous le constaterez donc, un humble et modeste rectificatif pour une affaire très sensible d’informations fausses !