VI – Propagande postcoloniale contre propagande coloniale ?
V – Propagande économique et décolonisation 1945-1962 (page 218 à 264)
46 pages et 108 photos
VI – Autres regards (page 265 à 289)
Nicolas Bancel et Ghislaine Mathy « La propagande économique » (pages 221 à 231) (10 pages – 26 images)
I = ? – Ex = ? – Prop. = ? De quelle propagande s’agit-il ? Dans la continuité de celle supposée, antérieure à 1939 ?
Commentaire : cette chronique souffre de plusieurs défauts, notamment l’insuffisance d’analyse du cadre juridique et financier d’une période qui n’avait plus rien à voir avec celle de la Troisième République fondée sur le self-suffering des colonies : la France était passée à une conception fondamentalement différente des relations « coloniales», celle de Plans financés par le FIDES, avec les trois clés de financement, subvention, prêt, et avance, la clé subvention se substituant très rapidement aux deux autres clés.
Est-ce que cette sorte de révolution aurait été possible sans le Plan Marshall ?
Traiter d’une propagande sans évaluation des vecteurs et de ses effets dans un exercice d’analyse économique suscite naturellement plus de questions que de réponses.
Les auteurs écrivent : « Il est très difficile d’établir un chiffrage précis, à la fois de la diffusion des publications semi-officielles du Ministère et de l’impact de cette iconographie de la presse. L’étude d’un corpus partiel permet d’affirmer que la propagande coloniale étatique a presque entièrement submergé l’iconographie des périodiques non spécialisés » (p,227)
Comment comprendre la logique de ce langage historique ?
A la fin de leur texte, les auteurs écrivent :
« Les images sur l’économie du continent africain qui martèlent dans les mémoires françaises son infériorité constituent une des facettes de l’idéologie du progrès. Ces images sont indissociables de ce discours sur la nationalisation de l’économie qui a débouché sur l’expérience de la planification et finit par s’imposer après les indépendances.
Il y a actuellement coexistence entre l’universalité technique du monde occidental et les particularités culturelles des autres civilisations qui ont aujourd’hui à faire valoir leurs réponses à leur propre devenir. » (p,230, 231)
Comment comprendre le sens de ces expressions écrites par deux auteurs qui, après avoir déroulé un discours historique aussi imprécis que lacunaire, osent utiliser les expressions les « images… qui martèlent dans les mémoires françaises… son infériorité… » ?
Ajouterais-je enfin qu’il m’est arrivé de m’étonner ailleurs sur les caractéristiques statistiques très hypothétiques d’un sondage effectué par le même chercheur auprès d’anciens élèves de l’Ecole Nationale de la France d’Outre-Mer, afin de nous expliquer doctement, sur la base d’un pourcentage de réponses anodin, que leur recrutement avait été motivé par leur appartenance passée à des mouvements de jeunesse, entre autres sportifs ?
Nous y reviendrons plus loin dans la quatrième partie du mouvement de réflexion , dans notre résumé à propos des sondages, qu’il s’agisse de ce dernier ou de celui de Toulouse effectué en 2005.
Elisabeth Rabut « Un acteur de la propagande coloniale : l’Agence des Colonies » (p, 232 à 236 – 12 images) : Intérêt = oui – Ex = non – Prop. = ?
Commentaire : une analyse précise et synthétique de l’Agence des Colonies, de son historique, son organisation, et ses moyens, avec en finale une interrogation :
« La propagande sous ses diverses formes paraît s’être développée en confondant progressivement objectifs et moyens : selon quelle chronologie ? Sur quels fondements ? Pour quelle image du monde colonial ? » (p, 235)
Bonne question, outre celle relative à la place chronologique de cette analyse dans l’ouvrage ?
Le lecteur trouvera plus loin, dans le quatrième mouvement de notre réflexion, une longue chronique sur la propagande coloniale, telle qu’elle a existé, et non pas comme celle décrite par Sandrine Lemaire dans les ouvrages de ce collectif.
Jean Barthelemi Debost « La publicité” (page 236 à 240 – 13 images) :
Intérêt = oui – Ex = ? – Prop. = ?
Commentaire : sommes-nous encore dans le domaine de la propagande coloniale qu’il s’agisse de la chronologie ou du fond ?
La sémiologie a-t-elle été mise à contribution ?
Retenons quelques-unes des expressions utilisées : « L’image de l’Africain des vingt-cinq années (c’est-à-dire de 1945 à 1970 ?) qui ont succédé à la Seconde guerre mondiale devient terriblement complexe…On l’a vu, la publicité chérit le stéréotype… » (p,239)
Qu’en conclure ?
Michel Pierre – « L’Afrique en bande dessinée (pages 241 à 245 – 19 images) : Intérêt = oui – Ex = oui – Prop. = ?
« Il n’est pas d’aventure coloniale sans production de mythes aux couleurs des rêves, sans jeux de miroir sur la réalité. Dans la formation de cet imaginaire, la bande dessinée ou plutôt les « illustrés » comme on disait autrefois a joué un rôle essentiel même s’il est difficilement mesurable. Mais on devine comment des séries américaines ou européennes, Tarzan, Jim la Jungle, Akim … ont façonné des croyances, encouragé ou suscité des vocations… » (p, 241)
Youssef El Ftouh et Manuel Pinto « L’Image de l’Afrique dans le cinéma » (page 246 à 249 – 6 images) : Intérêt = oui – ex = oui – prop. = ?
Deux remarques préalables, le propos couvre la période 1895-1962, et fait concurrence à une autre chronique du même livre.
« Des débuts du cinéma en 1895 à la fin de la période coloniale en 1962, l’Afrique noire et surtout le Maghreb, ont servi de toile de fond et de lieu d’action à plus de 250 films de fiction, des centaines de documentaires, de films d’actualités et de publicités, pour ne citer que la production française….
Car bon nombre de ces représentations perdurent encore tant au niveau des images que de l’imaginaire… Nous vous livrons ici à quelques notes d’un visionnage toujours en cours… » (p,246)
« Esclaves « comiques » et rayés
Les « Africains » faut-il le rappeler ne sont pas les personnages principaux de ces films…(p,247)
En comparaison avec le Maghreb, peu de fictions françaises seront réalisées en Afrique noire, une vingtaine tout au plus… (p,248)
« Civiliser c’est blanchir
En résumé, le cinéma colonial traduit de manière remarquable l’idée d’une France venant « civiliser » un continent de « sauvages » et de « barbares »….(p,249)
Commentaire : plus haut, les auteurs avaient relevé « C’est l’Indien de l’Atlas », une image qui me parait assez bien résumer cette analyse qui soulève maintes questions liées à sa représentativité et à ses effets sur le public, quant à savoir si l’Afrique et l’Africain noir figuraient bien sur ces écrans, et quant au chiffre effectivement faible des films contenant un thème africain, noir ou maghrébin.
Les spécialistes vous citeraient le nom d’un film américain tourné aux Etats-Unis dans un décor marocain.
Benjamin Stora, « Quelques images fixes d’une fin d’Empire » (pages 250 à 264 – 32 + 24 images) : Intérêt = ? – Ex = ? – Prop. = ?
VI – Autres regards (page 266 à 288)
Les contributions publiées ne manquent pas d’intérêt, mais elles sont éloignées de l’objet principal de l’ouvrage, à savoir la question de savoir s’il y avait bien une propagande coloniale en France, et si oui quels en ont été les moyens et les effets.
L’image d’introduction de la partie VI du livre, le choix d’un dessin du journal satirique l’Assiette eu Beurre (1902) est déjà tout un symbole : un soldat présente à un officier deux noirs embrochés sur une baïonnette.
Le livre « Culture coloniale » a ouvert de la même façon illustrée la « Partie I Imprégnation d’une culture » (1871-1914), page 40.
Cette caricature figue dans la contribution de l’historien Claude Liauzu intitulée « L’iconographie anticolonialiste » (page 266 à 271 – 15 images) –absent au Colloque de 1993.
Ce texte est illustré de nombreuses caricatures aussi horribles les unes que les autres, mais l’anticolonialisme n’a jamais été dans notre pays, en tout cas jusque dans les années postérieures à la deuxième guerre mondiale, très vivant.
A titre personnel, j’y verrais plutôt le désintérêt que manifestait une fois de plus l’opinion publique à l’égard des sujets coloniaux, beaucoup plus qu’une adhésion au colonialisme qu’il fallait combattre : le mot ne fut connu qu’en 1910, comme l’indique le petit livre jaune « Les mots de la colonisation » de Sophie Dulucq, Jean François Klein, Benjamin Stora, page 30 .
« L’image de l’autochtone maghrébin » de Malek Chebel (page 272 à 278 – 16 images) – absent au Colloque de 1993
Un texte au contenu intéressant mais qui pose à nouveau le problème de l’objet même de ce livre, à savoir : regards des Français ou regards des peuples colonisés ?, sauf à dire qu’il s’agit d’une analyse de type rétroactif, étant donné que ces images furent dans la plupart des cas inconnues des peuples colonisés.
« Regard : Images coloniales sur l’Afrique Noire » d’Achille Mbembe (page 280 à 289 – 10 images) – présent au Colloque de 1993
L’historien traite le sujet avec une forme de violence intellectuelle que l’on peut comprendre, en notant toutefois que son propos concerne une partie de l’échantillon d’images coloniales proposé, en acceptant les deux postulats de raisonnement suivants : 1) l’échantillon proposé serait représentatif des situations historiques visées, 2) ces images auraient marqué, par hypothèse, leurs récepteurs français.
Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés