Le film « Pina », sur la grande chorégraphe Pina Bausch !

Encore dans les salles ou en DVD

Un documentaire de Wilm Wenders « en trois dimensions » tourné en hommage à la grande chorégraphe Pina Bausch, récemment disparue.

Ce film montre parfaitement une chorégraphie qui lui appartenait en propre, c’est-à-dire dérangeante d’une certaine chorégraphie trop facilement académique.

Sa chorégraphie a bousculé beaucoup des conventions de la danse.

On est loin du ballet blanc des tutus, des entrechats, des pointes et des sauts de ballerines habillées tout de blanc qui ont effectivement caractérisé cette forme de ballet, si bien représentée dans les peintures de Degas

Sa danse à elle est, en effet, arrimée à la vie quotidienne, à la ville industrielle de Wuppertal, à ses usines  gigantesques, mais tout autant à la terre que le corps épouse, à l’eau qui lui coule dessus, à l’arbre qu’il étreint, aussi bien qu’aux gens de tous les jours.

Une chorégraphie qui déroule toutes les formes de la beauté des vies ordinaires, souvent faites de tristesse et de désespoir, et toujours très strictement servie par des danseurs et des danseuses qui expriment, dans la totale liberté de leurs corps, les rêves ou les désespoirs de Pina Bausch.

Des files de danseurs qui se suivent à la queue leu leu sur la crête d’une ancienne mine abandonnée et régénérée,  comme habités par je ne sais quelle douleur, méditation, prière, ou tristesse, ces allées et venues de danseurs et de danseuses entre les chaises, avec, et sur les chaises du café Muller…

C’est à partir de l’interview et de la danse d’au moins trois danseurs ou danseuses que le cinéaste fait revivre la danse de Pina Bausch, ses scènes dansées, au café, dans le décor d’une usine géante, en pleine nature, ou dans une ancienne mine reconfigurée par la verdure…

Le public parisien avait pu faire connaissance et apprécier les œuvres de la chorégraphe au Théâtre de la Ville, dans les années 80.

Une occasion pour les néophytes de faire aussi connaissance

1) avec la danse de Pina Bausch,

2)  avec le cinéma en trois dimensions !

Avec ma «  concubine préférée »

Le film « La femme de l’année » avec Katharine Hepburn et Spencer Tracy

Une comédie pétillante de George Stevens, produite par Joseph L.Mankiewicz (1942)

Salles d’art et d’essai ou DVD

A Paris, entre autres, les salles Mac Mahon, Lincoln, et Saint Lazare Pasquier

Un vieux film produit il y a presque soixante ans, mais qui n’a quasiment pris aucune ride, dans son thème, ses dialogues, et ses magnifiques acteurs !   Un film drôle, spirituel, traitant de la cause féminine et de la difficulté des femmes à sortir des 3 K allemands, Kinder, Küche, et Kirche, même lorsqu’on jouit des talents exceptionnels de la grande journaliste Hepburn.

            Je comparerais volontiers cette œuvre aux grandes comédies de Molière, L’Ecole des Femmes par exemple, venues d’un autre temps, mais toujours aussi vraies et vivantes.

 Car le film nous raconte avec beaucoup de brio et d’esprit, ce qui ne gâte rien, les amours mouvementées de deux journalistesl’une, Hepburn, grande journaliste internationale, célèbre dans son métier, électrique et complètement « accro », l’autre Tracy, journaliste chroniqueur des sports, très loin des turbulences de la vie nationale et internationale, un gros brin pépère sur les bords.

Comme l’indique le titre « La femme de l’année »,  il s’agit d’une récompense décernée par les  mouvements féministes américains  à celles qui se sont illustrées dans la défense de la cause des femmes, comme ce fut le cas de la célèbre journaliste.

Le problème est que, par amour, la brillante journaliste se croit obligée de rejoindre piteusement, au petit matin, au retour d’un voyage, le domicile conjugal pour tenter de regagner l’amour de son mari, en préparant un petit déjeuner plein de gags , étant donné qu’elle n’a jamais abordé ce domaine privilégié de la compétence féminine « ancillaire ».

 Il serait dommage de ne pas voir une œuvre aussi jubilatoire, un vrai régal spirituel et aussi un ardent témoignage en faveur de la liberté des femmes. Avec une actrice merveilleuse de fraicheur, de talent, et d’émotion.

Cela nous change vraiment de beaucoup d’autres petits films à l’eau de rose !  

Jean Pierre Renaud

Le film « Coup d’éclat » avec Catherine Frot

Le film « Coup d’éclat » avec Catherine Frot

et « cas d’école » pour de bonnes écoles de police !

            Le journal Libération du 27 avril 2011 a fait une critique positive de ce film, intitulée

« Certains l’aiment Frot »,

Sans-papiers La comédienne transcende « Coup d’éclat »

 et pour une fois je partagerais cet avis, mais pour des raisons un peu différentes, que celles autant politiques et sociales qu’artistiques du journal.

C’est l’histoire d’une capitaine de police, Catherine Frot dont le « métier » est de traquer les immigrés clandestins et les sans-papiers dans une cité des bords de la Méditerranée. La mort d’une prostituée liée à un réseau mafieux, la découverte qu’elle a un enfant, la recherche de ce dernier, la détournent de sa mission de police.

Un film au rythme haletant, servi par une policière têtue, humaine en diable, et en professionnelle telle qu’on l’imagine, mais avec un scénario qui se perd un peu dans le dédale d’une proximité mafieuse obscure.

Remarquable exercice de cinéma de Catherine Frot ! Film intéressant en tant qu’il fait toucher du doigt les difficultés et les limites du travail d’une police qui est tout de même au service de la République Française !

C’est la raison pour laquelle ce film pourrait être retenu dans  les bonnes écoles de police dans le cadre d’exercices déontologiques sur le métier de policier.

Admirateur de Catherine Frot, j’avais proposé, dans le passé, à quelques producteurs de cinéma, un synopsis de film sur le thème de la corruption à la mairie de Paris, avec une Catherine Frot incarnant un personnage de femme fonctionnaire et détective administratif, qui s’était mise dans la tête la folle idée de mettre à jour la corruption du système chiraquien.

Un de ses derniers films, sinon le dernier avec Dussolier, « le crime est notre affaire » est un petit régal.

Jean Pierre Renaud

Le film « Essential Killing » de Jerzy Skolimowski

Avant de donner quelques impressions sur ce film, de faire part de mes réactions de cinéphile amateur de films de dépaysement, je voudrais dire que je suis toujours surpris par l’écriture des quelques critiques de cinéma dont j’ai l’habitude de lire les textes, des textes le plus souvent fort bien écrits, léchés, toujours sophistiqués, dans lesquels j’ai quelquefois la plus grande peine à loger mes propres impressions , ma lecture personnelle du film.

            J’ai sans doute le tort de ne pas faire partie du petit cénacle de cinéphiles professionnels.

            J’ai donc été voir ce film dans une salle d’art et d’essai, un film auréolé des critiques les plus élogieuses, de la part du cénacle en question, mais ma vision n’a pas du tout été celle des professionnels.

            Pour parler de ce film, un critique a proposé l’adjectif « radical », et je serais tenté de dire que ma critique sera tout aussi radicale.

L’histoire d’un taliban qui ne dit pas son nom, poursuivi et arrêté, après avoir tué plusieurs soldats américains dans un très beau désert de cinéma à canyons profonds et brûlés de soleil, qui ne dit pas non plus son nom, – assez différent des paysages d’’Afghanistan dont les images passent en boucle, au fil des années, sur toutes les chaînes de télévision, –transféré en secret dans un pays du nord qui ne dit pas non plus son nom. A nouveau en fuite, à nouveau poursuivi, dans une forêt profonde, enneigée, peuplée d’arbres magnifiques, courant, courant, pourchassé, toujours pourchassé, sans boire, ni manger, des jours et des nuits qu’on ne compte plus…

Un ballet d’hélicoptères avec ce fameux bruit toujours entêtant des pales que connaissent les familiers d’Apocalypse Now (ou ceux des djebels de Kabylie),  un flot continu de très belles images de paysages et de forêts enneigés, et du héros, caméra sur l’épaule, de très belles images, mais jusqu’à plus soif ! Le héros a d’ailleurs soif !

Il est difficile de croire à cette histoire ténue et d’adhérer à une esthétique qui écrase, un pur exercice d’esthétique, les deux « one man show » du réalisateur et d’un acteur qui a d’ailleurs, plus que parfaitement, fait son métier.

Avant de terminer, je serais tenté de dire : est-ce qu’il ne s’agit pas d’un exercice subliminal de cinéma à la gloire des talibans ? Une chasse à l’homme, avec un héros magnifique et magnifié dans sa fuite, un nouveau martyre, lequel dans ses quelques moments d’hallucination, voit passer en rêve le texte de quelques sourates du Coran.

Mais si vous allez voir ce film, vous n’êtes naturellement pas obligé d’adhérer à ces propos, et trouverez peut-être qu’au moins deux moments de ce film sont extraordinaires : la scène au cours de laquelle le fuyard, mort de faim et de soif, se jette sur une femme qui donne le sein à son bébé, au bord d’un chemin, pour s’allaiter lui-même à son sein, et celle de sa fuite sur un beau cheval blanc ; gravement blessé par une tronçonneuse au cours d’une lutte avec un bûcheron, il pisse un sang rouge qui inonde l’encolure blanche de son beau cheval blanc. Dans une anthologie kitsch du cinéma?

Jean Pierre Renaud

Le film « Winter’s Bone » de Debra Granik

 Si vous avez envie de vous désintoxiquer des spots et sunlights d’Hollywood, ou de découvrir l’ouest américain autrement qu’avec des westerns, découvrir une certaine Amérique profonde, dans les monts Ozarks du Missouri, en bref, vous dépayser, allez voir ce film, un film dur, un film noir chez les blancs, un vrai film des ténèbres.

            Dans un univers humain pervers, l’histoire d’une jeune fille de dix- sept ans qui se retrouve seule pour élever son petit frère et sa petite sœur, avec une mère invalide, et un père en fuite, dealer en « met », comme il est dit dans le film.

            Le problème est qu’il a mis sa maison sous caution, et qu’elle a toutes les chances d’être vendue, à moins que l’on n’arrive à mettre la main sur le fuyard , mort ou vif. Et c’est effectivement mort qu’il sera retrouvé, au cours d’une scène d’apocalypse.

            Ce film nous plonge dans un enfer américain, des trafics de met, des règlements de comptes, entre des personnages et des familles aux mines le plus souvent patibulaires, avec toutefois le grand rayon de soleil de cette jeune fille qui fait face à toute cette violence pour sauver sa petite famille.

            N’allez pas croire toutefois que les images infernales de ce film puissent être représentatives d’un ensemble géographique et humain, qui pourrait être ici celui de la vie dans les monts Ozarks !

            Bien au contraire, si vous lisez le livre étonnant de Sue Hubbell« Une année à la campagne », un chant de découverte de la nature, et d’émerveillement, précisément dans les mêmes monts Ozarks.

            Jean Pierre Renaud

Un film finlandais: « Very Cold Trip », un film too « very cold » indeed!

Very Cold Trip: un film finlandais

de Dome Karukoski

Very, very, too very cold trip indeed!

            Les lecteurs du blog ont l’occasion de lire, de temps en temps, un écho sur un film vu, généralement un film choisi pour son dépaysement géographique et culturel.

            Je suis donc parti à la découverte cinématographique de la Finlande exotique, théoriquement bien disposé intellectuellement par la lecture des livres pleins d’humour d’Arto Paasilinna,  notamment « Le lièvre de Vatanen », mais j’avouerai tout de suite que l’humour de ce film, s’il en contient quelque brin, ce dont je ne suis pas sûr, risque peu de mettre en danger le lièvre de Vatanen.

Very Cold Trip donc, un film plus que glacial, de la nuit polaire et de la neige plein les yeux, avec toutefois de beaux scintillements des lumières des cités, avec des explosions continuelles de farces et attrapes, ou d’invraisemblances.

Pour une fois, pas du tout d’accord avec la critique cinématographique souvent juste du Canard qui classait le film dans la catégorie des films qu’on peut voir, et concluait même «  Mission comique impossible : accomplie ! »

 Pour moi, mission annulée ! Ce film n’a pas de quoi, vraiment, de quoi vous prendre, même aux tripes !

Une histoire à dormir debout ou assis dans un fauteuil de cinéma, à condition qu’il soit confortable !

Jean Pierre Renaud

BAYROU ET GEORGE VI: SUITE ET FIN

En dépit du tam-tam qui précédait la présentation du film en salle, un très bon film qui nous change des bluettes de la plupart des films du cinéma français.

A retenir quelques « enseignements » :

1 – Sur les origines du centrisme : on explique dans le film que le bégaiement peut trouver son origine dans une éducation familiale qui contrarie l’usage de la main gauche chez les gauchers de naissance, pour les contraindre à utiliser leur main droite.

D’où certainement cette hésitation « fondamentale » du chef des centristes, de certains de ses amis, entre la droite et la gauche !

2 – Et pour les Français, toujours de plus en plus rares sans doute, à vouloir comprendre les différences d’approche coloniale entre la France et la Grande Bretagne, pendant la période coloniale des années 1880-1960, le contenu du serment de George VI, lors de son couronnement, est intéressant, parce qu’il manifeste l’engagement du roi à respecter les « coutumes » des colonies de l’Empire britannique.

La République Française avait, elle, la folle ambition d’assimiler ses sujets d’outre- mer.

Cinquante ans plus tard, et s’agissant cette fois des populations d’origine immigrée en général, vivant dans les deux métropoles, le Premier Ministre anglais vient, après la chancelière, de déclarer l’échec du multiculturalisme dans son pays (le Monde du 8 février 2011) :

« Multiculturalisme : le constat d’échec de David Cameron. Après Angela Merkel en Allemagne, le premier ministre britannique a reconnu les limites du modèle multiculturel  pour lutter contre les extrémismes. »

Récemment, le Président de la République Française, a constaté, de son côté, l’échec de la politique d’intégration, alors qu’elle a obtenu des résultats partiels, et que cet échec est largement dû à l’incapacité démontrée, pendant au moins trente ans, de la gauche et de la droite à faire entrer les quartiers sensibles dans la République.

Mais pour revenir au vrai sujet, celui du cinéma, signalons le titre- jugement du Canard Enchaîné (2/02/11) :

«  Le discours d’un roi

(Reçu sceptre sur sceptre)

On ne peut donc être plus royaliste !

Oran, le souvenir de l’Algérie Française: « Un balcon sur la mer », le film de Nicole Garcia

J’hésitais à aller voir ce film dédié à une certaine nostalgie de l’Algérie Française, bien éloignée des souvenirs que beaucoup de soldats appelés du contingent ont conservé du bled ou du djebel où ils ont servi, qui ne ressemblent pas du tout à ceux qui hantent encore beaucoup de Français ou Françaises d’Algérie, qui y sont nés, ou leurs descendants.

L’intrigue est simple, celle de la rencontre, en Provence, entre deux adultes, déjà mûrs, dont la famille avait été rapatriée en 1962 : l’homme éprouve un choc émotif, en étant convaincu qu’il vient de retrouver la petite fille qu’il avait aimée à Oran.

Donc une belle histoire d’amour d’enfance algérienne avec une intrigue qui se déroule sur un arrière-plan d’affaires immobilières malheureusement confus.

L’histoire en elle-même est intéressante, étant donné qu’elle nous donne l’image émouvante de ces Français et Françaises d’Algérie, attachés à leur terre de naissance, vivant dans leurs souvenirs toujours vivants.

Mais en ce qui me concerne, et lors de mon séjour de vingt et un mois dans le djebel, et alors que j’ai été un grand lecteur de Camus, j’ai eu le sentiment d’être beaucoup plus proche du décor de La Peste que de celui des Noces, à Tipaza, semblable aux quelques aperçus d’images du film.

Et pour illustrer cette appréciation, je me permettrais de rappeler, tout d’abord, un extrait d’Albert Camus, dans La Peste, une des vignettes que j’avais choisies pour introduire le récit de mes propres souvenirs dans un des djebels de la Soummam :

« Le soleil de la peste éteignait toutes les couleurs et faisait fuir toute joie. »

« C’est une idée qui peut faire rire, mais la seule façon de lutter contre la peste, c’est l’honnêteté. »

Pourquoi ne pas citer un autre extrait du même auteur, les premières phrases de « Noces à Tipaza », qui éclairent une autre face de l’âme, celle du film, la nostalgie de cette Algérie française ?

« Au printemps, Tipaza est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l’odeur des absinthes, la mer cuirassée d’argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons dans les amas de pierre. »

Mais pour dire la vérité, les descriptions d’Oran faites, dans un autre contexte, par le même auteur, ne sont pas toujours des plus romantiques, et c’est le moins qu’on puisse dire…

Jean Pierre Renaud

Deux cadeaux pour les fêtes de fin d’année, le film « Narcisse noir » et l’humour de Loti, « orientaliste » français.

Deux cadeaux pour les fêtes de fin d’année : dans le « noir », le film « Le Narcisse Noir » de Michael Powel, avec la belle Deborah Kerr, dans l’Himalaya, et dans le « blanc », l’humour d’un « orientaliste » français, Pierre Loti : « Petit âne blanc et vieille « cookesse » anglaise en Egypte ».

Le film « Le Narcisse noir » de Michael Powel et la belle Deborah Kerr, bonne sœur dans l’Himalaya (1947)

            Un film magique dans tous les sens du terme !

C’est l’histoire d’un groupe de cinq sœurs d’une congrégation anglicane implantée dans les Indes, encore anglaises, qui confie à l’une d’entre elles, Deborah Kerr,  la responsabilité d’installer un nouveau couvent dans une forteresse plantée sur des falaises vertigineuses d’un contrefort de  l’Himalaya. Un riche maharadja a décidé de la confier aux bonnes sœurs, à charge pour elles, de créer une école et un dispensaire au profit de ses sujets.

Installation étrange dans un  ancien harem qui a conservé quelques gravures licencieuses, vie dans une forteresse inaccessible et agitée en permanence par des vents puissants et bruyants, cohabitation éprouvante avec un monde indien mystérieux, plein de religiosité et de croyances incompréhensibles, des nonnes dont la vocation vacille au contact de leur nouvelle vie, et de cet anglais, sans doute le résident de l’époque, qui vient régulièrement les défier par sa sensualité, son animalité, tout en les aidant à s’installer..

Une ambiance entêtante entretenue par le parfum obsédant du fameux « Narcisse noir », « un parfum obsédant qui affole les sœurs d’un couvent britannique », dixit le Canard Enchaîné.

La mission des cinq sœurs se conclut par un échec, avec un épisode digne d’Hitchcock, dont Powel fut, à un moment donné, le collaborateur.

Un film intéressant à un tout autre titre, celui de l’histoire coloniale des Indes anglaises en particulier, et de l’histoire coloniale en général.

Le film fait bien ressortir la sorte d’incommunicabilité coloniale qui existait entre deux mondes de croyances et de raisonnements différents, l’univers indien et l’univers britannique. Il montre également toute l’ambigüité de ces missions religieuses dont l’ambition était de porter la bonne nouvelle dans des milieux qui n’étaient pas toujours à même de l’accueillir.

Ce film nous plonge dans les Indes coloniales, magnifiques personnages et magnifiques paysages ! Laissez-vous porter par la magie de ce film en technicolor, sans vous poser trop de questions pour savoir si ces images ont été filmées en studio ou non, tellement on se croirait sur un des contreforts de l’Himalaya.

Jean Pierre Renaud

A noter le commentaire élogieux du Canard Enchaîné, lequel n’a souvent pas mauvais goût dans le domaine du cinéma :

« Ce drame sensuel kitsch et somptueux… est un bijou qui scintille d’extravagance, d’humour et de puissance sensuelle. »

Vietnam, Indochine, « L’Empire du Milieu du Sud » Jacques Perrin

Un nouveau film de Jacques Perrin

 «  L’Empire du Milieu du Sud »

Ombres chinoises, françaises, ou américaines?

       Nous nous faisions une joie, ma « première concubine préférée » et moi, d’aller voir la nouvelle œuvre cinématographique de Jacques Perrin, une grande joie, car au moins deux de ses films avaient réjoui à la fois notre regard et notre « intellect », « Le peuple migrateur » et « Océans », et d’autant plus, que nous semblions partager, avant spectacle, la même attirance pour ce peuple  de la péninsule indochinoise, son histoire tourmentée, sa grande culture, et ses paysages.

            Nous avions beaucoup regretté l’absence de mots, de désignation des superbes volatiles du « peuple migrateur » si superbement filmés, mais à l’occasion de son nouveau film, le réalisateur a pris sa revanche, sans avoir peur des mots, une avalanche de mots.

Il n’est pas sûr du tout que sa nouvelle cinématographie y ait vraiment gagné.

            Gare aux mots exprimés, et au moins autant, gare aux mots cachés !

            Un flux incessant de mots, et d’images, c’est vrai, souvent d’images très belles, mais noyées dans un déluge verbal qui submerge tout, une vague de mots digne d’un cyclone des mers de Chine.

            Est-ce une fiction, un documentaire géographique, un film à ambition historique ? Difficile à dire, car la seule image intellectuelle qui domine dans ce film est celle de la grandeur de l’ancienne civilisation de l’Empire d’Annam, aux prises séculaires avec des envahisseurs, chinois ou « barbares », les Français puis les Américains. Alors, me direz-vous ? Ce n’est déjà pas si mal !

            Sur ce constat, aucune objection, mais l’histoire des relations entre les « barbares » et les vietnamiens est plutôt caricaturale, avec une grande pauvreté de repères historiques rigoureux, une sorte de magma ou de méli-mélo historique, avec la guerre, toujours la guerre, et l’émergence du véritable héros de la tragédie indochinoise, le grand Hô Chi Minh, pourquoi pas ? Mais il aurait fallu peut être dire aussi qu’à partir de la guerre froide, c’est-à-dire 1949, la donne avait complètement changé.

            Des Blancs montrés en figuration ! Des ombres ! Aucun n’a été dénommé à ma connaissance, à l’exception de l’amiral Thierry d’Argenlieu, et sauf erreur, je n’ai entendu, ni les noms de de Gaulle, ni ceux de Leclerc, ou de de Lattre, lesquels initièrent la dernière phase des combats entre les « barbares » et les sujets de l’Empire du Milieu du Sud.

            Dans le flot des images et des mots, les ombres chinoises m’ont particulièrement séduit, peut-être parce qu’elles exprimaient cette fois le silence et la beauté des gens, peut-être aussi, parce qu’à mes yeux, ce film ressemble à un théâtre d’ombres chinoises, pour ne pas revenir sur l’ombre des mots.

            Et pourquoi vous cacher que cette fois, j’aurais préféré plus de silence et moins d’ombres historiques !

            Jean Pierre Renaud

Avec un premier petit codicille de ma « première concubine préférée » :

            « Un film aux commentaires pédants où la grandiloquence le dispute à la misère des mots.

            Un film qui déroule le drame de la population vietnamienne meurtrie par la colonisation française, la guerre, la scission du nord et du sud, les violences des combats contre les américains avec un enrobage d’images dignes d’un show hollywodien.

Un film à ne pas voir si l’on aime le Vietnam et ses habitants et si on a un minimum de pudeur à l’égard de ce peuple. »

Précisons que pour avoir aimé ce pays au cours d’un voyage de découverte touristique, ma « première concubine préférée » ne s’est jamais plongée dans l’histoire de ce pays.

            Et un deuxième petit codicille qui éclaire incontestablement le premier, étant donné qu’il est tiré du Canard Enchaîné (un extrait), dans la rubrique :

 Les films qu’on peut voir cette semaine (journal du 29 novembre):

            « Etrange film que cette lente méditation… Mais ce documentaire d’allure poétique peut vous perdre dans ses méandres, dignes du Mékong, car le commentaire tisse des textes littéraires, vietnamiens et occidentaux, sans citer ses sources. On ne sait pas qui parle, ni exactement ce qu’on voit, ni de quand ça date. C’est solennel et assez frustrant. »

            Donc effectivement, d’autres ombres, celles des voix !