Valeurs de la politique ? L’honneur, l’amour propre, la parole publique ? La gouvernance de la France ?

L’honneur et l’amour propre d’un ancien Président ?

            Comme si de rien n’était, cet ancien et récent Président se met à nouveau en scène dans les médias ! Comme s’il n’était pas le vrai responsable de la déconfiture du Parti Socialiste, « son » parti, de la défaite des gens qui l’ont soutenu, de l’état de crise de notre pays !

            Nul n’est besoin de revenir sur l’honneur et l’amour propre dont ont fait preuve les ministres UMP qui ont retourné leur veste pour rallier le camp Macron.

La parole publique ?

         Que peut bien valoir la parole publique d’un Bayrou qui jette aux orties des collègues qui auraient trop aimé l’argent public, alors que son petit parti, devenu subitement « gros », n’aurait jamais pu subsister, sans le secours d’expédients financiers ?           

        Que celui qui jette la première pierre soit sans péché … Outre le fait que personne ne sait en France ce que l’homme politique en question a bien pu proposer de concret sur l’Europe, ou en ce jour d’anniversaire du martyre du père Hamel (vade retro satanam !), ce qu’il a proposé d’utile pour  ramener la paix civile dans notre pays !

Parole publique, gouvernance de la France ou gesticulation médiatique?

            A prendre connaissance des contradictions, des allers et retours de la parole publique de la gouvernance Macron, de ses zigzag, il n’est pas interdit de s’interroger : par quel miracle de coups médiatiques ou de tweets, de recrutement sur les réseaux sociaux, la politique de réforme pourra bien trouver un appui politique au-delà des 20% d’électeurs qui ont élu le nouveau président ?

            A noter que Macron, comme tous ses prédécesseurs, est saisi du même prurit de politique internationale ! Il reçoit à tour de bras (je touche le bras et le dos), successivement Poutine, Trump, ou Netanyahou (Bibi pour les  intimes)…

            Je n’aurai pas la cruauté de penser que la Présidence actuelle souffre d’une sorte d’enfantillage politique, du complexe du petit ou du grand chef, et d’une trop grande propension à la téléréalité : un jour, sous-marinier ou boxeur, un autre jour pilote ou ami des vedettes de la chanson…

Jean Pierre Renaud

L’Islam de France ?

Le 7 novembre 2012, j’ai commencé à publier une lecture critique du livre de John R. Bowen sur l’Islam de France, « L’islam à la française ». 

          Ma conclusion était qu’il était très difficile de savoir qui était qui ou quoi, ou qui faisait qui ou quoi, chez les musulmans de France, tant sur le plan de la doctrine, des institutions religieuses, de la compatibilité avec les institutions françaises, ou du rôle de l’islam étranger : en résumé, une impression de très grand désordre.

     Depuis, il y a eu Daech et les attentats, qui ont accéléré la prise de conscience en France d’une présence musulmane beaucoup plus importante que la majorité de nos compatriotes ne le pensait.

      Le débat est donc toujours ouvert sur ce sujet sensible.

      Dans Le Figaro des 8 et 9 juin derniers, deux tribunes très intéressantes, page 16 :

      La première de l’historien Pierre Vermeren, intitulée « La priorité des Frères musulmans : l’Europe », laquelle met en lumière l’action et l’influence que cherche à exercer Erdogan en Europe par l’intermédiaire de cette organisation religieuse et politique.

      Il est superflu, je pense, de rappeler que, depuis de longues années,  par le biais du recrutement des imams et le financement des lieux de culte, l’islam de France est sous l’influence de pays étrangers, d’Afrique du Nord ou du Moyen Orient.

     Il vaut mieux avoir les yeux ouverts.

      La deuxième de Hakim El Karoui intitulée « Pour un Islam français sans ingérence étrangère », la seule solution pertinente, et à tous points de vue, c’est effectivement là tout le problème.

       Jean Pierre Renaud

Une France Ambigüe ! La France des « Coups médiatiques « ?

Une France Ambiguë !

La France des « Coups médiatiques » ?

Eté 2017

            Avec l’affaire Fillon, le pouvoir judiciaire a fait déraper la machine institutionnelle, sapé les partis politiques, permis à la start-up Macron de détenir toutes les clés du pouvoir, après le grand déballage, faute de combattants, c’est-à-dire de candidats et d’électeurs.

            Nous verrons la suite qui, espérons le sera positive, mais rien n’est moins sûr !

            Nouveau gourou ou président d’une France qui avait enfin compris qu’elle avait grand besoin d’être réformée ?

            Le paradoxe de la situation actuelle, – mais dans notre pays, on n’en est pas à un paradoxe près -, est que le nouveau président est le  pur produit d’un système qui n’a jamais eu le courage de réformer et de se réformer.

            Exemple d’un autre paradoxe, le Président a besoin pour réussir du soutien de l’armée des cadres politiques, des militants, qui faisaient fonctionner les anciens partis, un pari donc difficile.

             Après la com quotidienne et lassante de son prédécesseur, les « coups médiatiques » ?

               Il en faudra plus pour gagner la confiance de notre peuple, et sans doute celles des militants de tous les anciens partis politiques qui  constituaient leur « capital humain » bénévole et dévoué.

              Jean Pierre Renaud

                Post Scriptum: comment ne pas souligner, comme le faisait remarquer un unième expert politico-médiatique, cireur de godasses à ses heures, sur une des chaines de télé, que le nouveau Président bénéficiait d’un exceptionnel alignement des planètes ?

               Après les voix de Jeanne, celles des astrologues ? Gare à l’alchimie ! Du plomb en or pour résorber la dette de la France, ou pour assurer le budget de l’armée française ?

           Jean Pierre Renaud

Actualités du blog: premier semestre 2017

Les statistiques produites par le site permettent de bien identifier les flux de lecture importants, mais mal les autres.

            Le flux de lecture le plus important a bénéficié à ma chronique de comparaison critique entre les deux empires coloniaux anglais et français des 19 ème- 20ème siècles, dont la publication a commencé le 21 janvier 2014.

        Cette chronique continue de susciter de l’intérêt de la part des lecteurs : près de 3 000 pages ont été lues au cours du seul premier semestre 2017.

         Quelques autres flux de lecture ont attiré mon attention : ils concernent deux articles et l’analyse détaillée d’une thèse d’histoire économique coloniale :

  1. Le 4 mai 2016, j’ai publié ma lecture critique du livre « Le sermon sur la chute de Rome » de Jérôme Ferrari, prix Goncourt, ainsi que de son article dans le journal La Croix sur la « repentance » (4/05/2016).

Il s’agissait évidemment toujours de l’Algérie, avec des histoires entrecroisées évoquant le grand Saint Augustin, le rappel de saloperies « coloniales » familiales, mais avant tout, celle d’une histoire familiale corse souvent grivoise.

J’ai donc cru de mon devoir de suggérer à ce journal d’en recommander l’achat aux bibliothèques de nos églises, tout en proposant que ce livre reçoive un Prix d’Histoire Corse.

  1. Le 20 janvier 2016, j’ai publié ma « Lettre aux Psy, docteurs en histoire coloniale, postcoloniale, ou en journalisme » (20/01/2016), lettre dans laquelle je dénonçais l’usage « immodéré » que faisaient beaucoup d’entre eux de  « l’inconscient collectif », du « ça » colonial ou postcolonial, au choix : l’usage de ces concepts imposés comme clés de démonstration historique, mais en réalité idéologique, est d’autant plus facile que personne n’a le courage de les mesurer, pour autant que la chose soit possible.
  2. Le 27 septembre 2014, j’ai commencé à publier mon analyse critique de la thèse d’histoire économique postcoloniale de Mme Huillery, selon laquelle l’Afrique Occidentale Française aurait été une bonne affaire pour la France.

                J’ai démontré qu’en dépit d’un important travail d’utilisation d’outils    statistiques et économétriques de corrélations très sophistiquées, cette thèse souffrait d’un manque de pertinence scientifique, en raison de plusieurs biais, de type anachronique, statistique, technique, et pourquoi ne pas le dire ? Idéologique.

                Triste constat, étant donné les carences quantitatives dont souffrent la plupart des travaux d’histoire postcoloniale, notamment ceux du collectif Blanchard and Co

               Est-ce que par ailleurs, ce type de thèse ne pose pas le problème de la transparence et de la scientificité des thèses, un sujet que j’ai évoqué à plusieurs reprises sur le blog : absence de publication des avis, du ou des rapports des membres du jury, du procès-verbal de délibération, et rôle du directeur de thèse ?

             Tout est secret ?

             Jean Pierre Renaud

Le Figaro du 4 juillet 2017 « Edouard Philippe », l’homme qui lit » Décryptage, Honneur ou trahison ?

Le Figaro du 4 juillet 2017

« Edouard Philippe », l’homme qui lit »

Page12, une pleine page par Etienne de Montety

Sur la même page en petit encadré, une pub pour le livre que vient de publier Edouard Philippe   « … A paraître le 5 juillet

Notre décryptage !

Un mot qu’adorent de nos jours les médias

Honneur ou trahison ?

La confusion des genres !

Curieux mélange des genres de la gent de lettres, mais de quelles lettres s’agit-il ?

        A qui ces  « lettres » sont-elles destinées ?

         Le jour de son discours inaugural à l’Assemblée Nationale !

        Qu’est-ce que Le Figaro cherche là à démontrer ? Une nouvelle et discrète allégeance au nouveau pouvoir ?

       A expliquer que le nouveau Premier Ministre n’est pas uniquement un boxeur ?

      A récompenser un éditeur ?

       En tout cas, un tel étalage étonne, et si je me fends aujourd’hui de ces quelques lignes, c’est pour manifester mon opposition à l’usage politique que fait Monsieur Philippe de l’exemple d’Hélie de Saint Marc :

         « Il salue la figure lumineuse de Hélie de Saint Marc, et à propos de qui il note : « Je mets au défi quiconque, et notamment tous ceux que la figure du général de Gaulle inspire ou qui, à droite ou à gauche, sont admiratifs de l’esprit de la Résistance, de ne pas être secoués par la logique imparable et le sens de l’honneur d’un bon nombre de putschistes d’Alger »

      Trop, c’est trop, après les mots de Macron, candidat à Alger !

    Trop, c’est trop, de la part d’un homme politique qui vient de trahir son camp ! Honneur, honneur, honneur ? Où es-tu donc ?

Jean Pierre Renaud

ECHOS de Madagascar et de France

ECHOS de Madagascar

            A lire, au fil des années, au moins la première page de « Madagascar Tribune », le lecteur se pose une simple question : comment telle ou telle élite de la Grande Ile trouve le temps de toujours agiter des contestations, sans jamais avancer de propositions constructives ?

            Au moins, une chose est sûre, si la première page de ce quotidien est représentative  de la vie politique malgache, que de temps perdu en disputes continues et inutiles, alors que le pays est riche en ressources de toute nature !

ECHOS de France

            Dieu soit loué ! A écouter les milieux médiatiques, la France baigne dans une nouvelle « huile essentielle », brevetée « macronique ».

           Les Français les plus prudents attendront d’être sûrs des bénéfices attendus de cette nouvelle huile essentielle du marché.

           Jean Pierre Renaud

Stora, les « raisins verts », mon blog et les marabouts ?

A nouveau, ma surprise de lire le 5 juin dernier le commentaire d’un lecteur ou d’une lectrice, faisant sa pub pour inciter des lecteurs à consulter un marabout : le commentaire portait sur la troisième chronique que j’ai publiée, le 3 avril 2017, sur la guerre d’Algérie,  dont l’intitulé est :

« Qu’est-ce qui fait courir Monsieur Stora ? »

Je concluais ce texte par des citations des prophètes de la bible qui évoquent le rôle des « raisins verts » dans la vie des pécheurs.

Question : y-a-t-il un rapport quelconque entre les marabouts, les « raisins verts » et Stora ?

Je n’ai évidemment pas publié ce commentaire.

Jean Pierre Renaud

Actualité des législatives 2017 – Deux métaphores et un paradoxe !

 Une métaphore de marketing de marché électoral : une marque de lessive ?

            C’est la première fois dans notre pays qu’un nouveau produit politique est lancé sur le marché électoral avec succès, comme une bonne marque de lessive.

         Une métaphore de biodiversité volatile : la grande lessive ?

Après avoir fait son nid dans le nid du saint des saints socialistes de l’Elysée, le coucou fait aujourd’hui son nid dans celui des partis politiques reconnus par notre Constitution, une façon comme une autre de faire la grande lessive.

Le paradoxe congru du projet de moralisation de la vie politique : avec quel acteur ? Bayrou, le bienheureux.

    Un choix qui convient tout à fait à la situation politique actuelle.

         Il n’y a pas de meilleur artificier de la scène politique qu’un des grands héritiers des petits partis de gauche ou de droite, qui traditionnellement ont toujours été les « supplétifs » des grands partis, pour le meilleur ou pour le pire (les expédients).

        Victoire, ou amère victoire ?

        En deçà ou au-delà de cette moralisation, le vrai sujet est celui d’une vraie séparation des pouvoirs à réaliser entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire.

      Poudre aux yeux que les propos qui tentent de prétendre le contraire, quand l’on connait l’articulation  des deux pouvoirs, la « servilité » longtemps expérimentée des corps de l’Etat, avec une Police judiciaire sous les ordres de…etc.

Jean Pierre Renaud

« Le choc des décolonisations » Pierre Vermeren – Synthèse critique

« Le choc des décolonisations »

« De la guerre d’Algérie aux printemps arabes »

Pierre Vermeren

Synthèse critique

            J’ai lu ce livre avec beaucoup d’intérêt, un livre vivant, riche d’ouvertures historiques, d’appréciations souvent convaincantes, quelquefois aussi d’éclairages de vérités dérangeantes.

        L’intitulé des trois parties parait justifié, sauf à dire qu’il manque peut-être une partie consacrée à la France coloniale de métropole, ses animateurs, ses outils de propagande, ses effets sur l’opinion publique, notamment à travers une presse qui n’a jamais fait l’objet, sauf erreur, d’une évaluation de l’écho qu’elle donnait aux affaires dites « coloniales ».

       Mes lecteurs savent qu’il s’agit de la critique fondamentale que j’ai formulée, avec démonstration à l’appui, à l’encontre du travail d’un collectif de chercheurs qui ont prétendu que la France avait « baigné » dans une culture coloniale, puis impériale.

         La France coloniale a toujours eu les yeux plus gros que le ventre, et la France postcoloniale au moins autant, à voir le nombre de ses interventions internationales tous azimuts.

        Les analyses de la troisième partie militent en ce sens. Je ne citerai qu’une phrase de la conclusion à ce sujet : « L’empire colonial a été une affaire d’élites. » (p322)

          L’auteur intitule sa première partie « Le fiasco des décolonisations » et je partage ce jugement, mais pouvait-il en être autrement de l’avis de ceux qui ont la chance d’avoir une petite culture historique sur l’histoire coloniale elle-même, sur les situations coloniales des années 1960, de la situation internationale elle-même avec la guerre froide, la propagande de l’URSS, de celle des Etats-Unis en faveur du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et du tiers-mondisme ?

          Pouvait-il en être autrement compte tenu du cours des choses en Afrique du Nord ou en Afrique noire, les deux cas de l’Indochine et de l’Algérie étant tout à fait particuliers ?

           Le risque de « balkanisation », alors dénoncé par Senghor, montrait bien que l’intéressé connaissait bien le sujet, une sorte de balkanisation ethnique et culturelle encore très prégnante, avec le constat que le découpage géographique et administratif effectué une soixantaine d’années auparavant entre les différentes colonies n’était pas de nature à donner naissance à ce qu’on appelait alors, et qu’on appelle encore de nos jours, des Etats-nations.

        De l’avis des bons connaisseurs de ces territoires, la décolonisation était inscrite dans l’histoire de ces pays, mais le processus de décolonisation ne pouvait qu’être difficile pour tout un ensemble de facteurs internes liés aux croyances de ces territoires, à leurs cultures, leurs mœurs, leurs coutumes, le nombre de leurs langues et de leurs peuples, pour ne pas dire ethnies, de leur manière d’être gouvernés avec l’importance du patriarcat que souligne l’auteur (p,147,148).

        Ajoutons à cette difficulté celle d’une recherche de modes de coopération avec un  islam très divers dans toutes les régions, au moins dans celles où cette religion bénéficiait d’une certaine cohésion religieuse.

        Dans son livre « La France en terre d’islam », le même historien décrit la situation de l’Algérie coloniale, en notant que le peuple algérien continuait à vivre dans une sorte de monde très largement musulman, parallèle à celui de l’Algérie française : « Une contre-société coupée de l’Algérie française ». (p,218)

      Dans les années 1959-1960, j’ai fait l’expérience concrète du parallélisme ainsi décrit en Petite Kabylie, plus d’un siècle après la conquête.

          Ce n’est pas tout à fait par hasard que la colonisation française, faute de pouvoir faire autrement, en tout cas en Afrique, faisait en sorte de respecter des statuts personnels très variés, avec le cas tout à fait particulier d’un l’islam qui y avait gagné beaucoup d’adeptes jusqu’à la décolonisation, un islam encore modéré.

         Les caractéristiques du statut personnel des musulmans rendaient difficiles sa compatibilité avec le statut personnel des français et des françaises, notamment après la grande loi sur la laïcité de 1905 ?

         Ce n’est pas par hasard, que de nos jours, notre pays rencontre des difficultés pour que l’islam de France joue le jeu de nos institutions fondée sur la laïcité et l’égalité entre les deux sexes ?

         La deuxième partie intitulée « Les anciens colonisés sous l’empire de leurs élites » (p,105 à 223) fait appel au terme d’élites, mais il aurait souvent été difficile de définir les élites auxquelles on avait à faire : les nouveaux citoyens, anciens ou nouveaux acculturés, les élites traditionnelles encore influentes dans leur ethnie d’origine ou leurs villages, les élites récemment formées dans nos universités, souvent formatées par le marxisme ? Des élites qui en tout état de cause étaient peu nombreuses et qui ne partageaient pas un consensus « national ».

          Pour citer deux exemples d’élites africaines du milieu « parisien » formatées par un marxisme international encore en vogue, à Paris et à Antananarivo : le premier celui des assemblées générales successives de la Maison de la France d’Outre-Mer qui accueillit beaucoup des jeunes élites de l’outre- mer dans les années 1950, au cours desquelles on pouvait entendre des discours interminables, jusqu’à point d’heure, sur la révolution prolétarienne, le marxisme international, l’anticolonialisme, l’exploitation des peuples d’Afrique, de jeunes élites qui arrivées au pouvoir s’adonnèrent rapidement aux dérives qui sont bien décrites dans l’ouvrage.

        Le deuxième, à Antananarivo, celui de l’amiral rouge Ratsiraka, lequel coule encore des jours paisibles en France, sorti de Navale, lancé dans une révolution populaire sur le modèle chinois, un mouvement sans lendemain « qui chante ». La grande île paye encore de nos jours les fruits de cette démagogie marxiste.

      Presque tous ces territoires ne disposaient donc pas des facteurs d’agrégation nationale suffisants pour que la décolonisation ne tourne pas au fiasco.

      La troisième partie intitulée « La France, les Français et leurs anciennes colonies « (p,223 à 321)

     Je ne suis pas sûr que beaucoup de Français soient capables encore de donner la liste de ces anciennes colonies, tout autant que les Français des années des indépendances aient été capables de faire mieux, et c’est toute l’ambiguïté qui pèse sur ce débat des histoires coloniales et postcoloniales.

     Il me semble que l’historien Ageron a montré dans une de ses études les limites de cette « culture métropolitaine », après la deuxième guerre mondiale.

     C’est la raison pour laquelle je pense qu’il aurait été intéressant de faire un bref rappel de la connaissance des mondes coloniaux qu’avaient les Français avant 1939 et entre 1945 et 1960, avec les premiers sondages que l’historien Ageron a cité dans une de ses études.

          Les analyses de l’’auteur font une large part au Maghreb, à l’Algérie, au Maroc qu’il connait bien, peut-être trop, sauf à dire, et c’est toute la question, que les années qui ont succédé aux indépendances, à celle de l’Algérie, a donné un  rôle central aux intellectuels sortis de la matrice algérienne, car c’est clairement ce qui en ressort.

         Avant la publication de cette  critique, les lecteurs ont pu consulter le texte que j’ai consacré à l’historien engagé politiquement Stora à travers l’ensemble des citations et prises de position qui ont  jalonné la période examinée, une sorte de fil « rouge » de lecture et d’interprétation de cette période qui a vu cet intellectuel occuper de multiples espaces médiatiques pour tenter de convaincre ses lecteurs et auditeurs que l’histoire de l’Algérie, et la guerre d’Algérie, constituent l’alpha et l’oméga de notre histoire coloniale et postcoloniale.

          Je ne crois pas que la propagande coloniale n’ait jamais disposé, dans le cadre historique qui fut le sien, d’un tel acteur et animateur.

         Les chapitres XIV « Les élites postcoloniales en métropole : entre revanche sociale, utopie et corruption » (p,239à256) et XVIII et le chapitre XVII « Mirages médiatiques » (p,289 à 303) ouvrent des perspectives fort intéressantes sur la composition et le rôle de ces élites et sur les manipulations de l’information, pour ne pas dire la propagande.

Révélations, analyses pertinentes ou éclairages intéressants :

     Le rôle des médias : cette question sensible est évoquée à de multiples reprises, et comme je l’ai dit, il est dommage que l’auteur n’en ait rien dit dans son ouvrage sur la période coloniale elle-même.

      Le livre donne quelques exemples de leurs manipulations qu’elles procèdent de l’Etat, des groupes de pression métropolitains ou africains, la guerre du Biafra ou le génocide du Cambodge, et son propos est plus précis sur la période récente :

     « Si la décolonisation crée une coupure entre la métropole et l’ancien monde colonial, les médias conditionnent et assurent le maintien de leurs rapports. Dans les années 1960 et 1970, coopérants et fonctionnaires européens font encore circuler connaissances et informations. Mais ce canal se tarit dans les années 1980. Le relai est ensuite pris par les entreprises, industrielles, financières ou de tourisme qui ne sont toutefois pas des médiateurs culturels : leur communication d’entreprise est déséquilibrée, car leur objectif n’est pas d’informer mais de communiquer. La médiation est aussi assurée par l’immigration postcoloniale qui s’intensifie dans les années 1980 avec le regroupement familial. Mais ce phénomène concerne surtout la société d’accueil, et peu sur celle d’origine. Les médias, la presse en particulier, jouent donc un grand rôle d’interface et d’interconnaissance des sociétés. Un petit groupe d’experts et de journalistes, informant le grand nombre, circule de part et d’autre. » (p,289)

        Au fil des pages, l’auteur constate que la presse est « aux mains des grands industriels » (p,291),  que les pays dépendants, souvent des dictatures, contrôlent et verrouillent les circuits d’information, comme on le voit bien dans les exemples fournis, le silence complet de l’Algérie sur la deuxième guerre civile des années 1990-2000, le contrôle qu’exerçait Ben Ali, ou de façon plus subtile, celui du Maroc, avec la collaboration de quelques journalistes de métropole patentés :

        « Faut-il ajouter que l’affaire Coleman leaks, un Wikileaks à la marocaine qui éclate au cours de l’automne 2014, tardivement dévoilée par la presse française avec une prudence homéopathique, révèle que de grands journalistes en charge des affaires internationales et du Maroc, ont  bénéficié de solides rémunérations marocaines en échange d’articles endossant la position du royaume sur le Sahara. » (p302)

      Le néocolonialisme – L’auteur en décrit maints aspects, la Françafrique, l’hypocrisie de la Conférence de La Baule, avec Mitterrand en 1990, le rôle tout à fait étrange du ministère de la Coopération chargé de distribuer des allocations à certains chefs d’Etat africains. (p,162)

      La deuxième guerre civile algérienne des années 1990, décrite notamment à la page 168, et à l’occasion d’autres analyses, nous donne quelques informations sur cette guerre dont les méthodes et les victimes font encore l’objet d’un black-out complet de la part de l’Algérie.

        Il serait évidemment très intéressant que les intellectuels sortis de la matrice algérienne mettent leur talent  au service de l’histoire postcoloniale de l’Algérie, comme ils ont su le faire pour la seule guerre d’Algérie qui a duré moins de 10 ans, de 1954 à 1962.

     En ce qui concerne notre pays, il aurait été intéressant de connaître le nombre d’Algériens et d’Algériennes qui sont venus se réfugier chez nous, car le même sujet fait l’objet du même black-out.

     L’auteur fait un sort particulier au Sénégal, un cas particulier : « L’exception sénégalaise, un allié modéré dans la guerre froide » (p,75), et au fil des pages, l’auteur revient sur cette situation particulière.

        Il convient de noter que le contexte de la guerre froide a beaucoup  pesé sur la décolonisation, et a été un des facteurs internationaux de ce choc, mais j’ajouterais que la situation coloniale du Sénégal n’a jamais été comparable à celles des autres colonies, pour au moins trois raisons, géographique en bordure de mer, historique avec une présence ancienne de la France sur ses côtes, religieuse et culturelle, évoquée d’ailleurs à la page 147, avec l’existence d’un islam modéré couvert par la grande confrérie mouride.

      Islam et choc des décolonisations

      Il s’agit d’un thème d’analyse et de réflexion qui court au fil des pages, notamment dans le chapitre XII (p,214,215,216,217), et c’est un sujet sensible que l’auteur connait bien, notamment en ce qui concerne l’islam du Maghreb.

      Le lecteur a la possibilité de mieux comprendre la fausse interprétation que nos gouvernements firent des « printemps arabes », notamment grâce à la manipulation des médias :

       « Les Français n’ont appris qu’en 2011 que la Tunisie de Ben Ali était une dictature policière, humiliant et pillant sa population… Amitié avec la France et ses dirigeants oblige. » (p297)

     J’ai évoqué ce sujet sur mon blog.

     On se souvient de l’épisode qui mit en cause Mme Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur.

     L’immigration

     L’auteur consacre le chapitre XVIII (p,305) à la question « immigration » et propose tout un ensemble d’éclairages et de données chiffrées sur les flux de l’immigration et leur évolution.

     L’historien note : « La guerre d’Algérie et l’intensification paradoxale de l’immigration impériale » (p,308), un mouvement effectivement très paradoxal, compte tenu des raisons qui avaient incité de Gaulle à larguer l’Algérie, alors que l’immigration d’origine algérienne a effectivement augmenté au cours des années qui ont suivi la guerre d’Algérie, et jusqu’à nos jours.

     Cette situation mériterait incontestablement plus d’explications.

      Quant à l’augmentation de l’immigration impériale en général, elle soulève également beaucoup de questions, notamment sur la nature de ces flux, compte tenu notamment :

      « Peu de statistiques existent sur le regroupement familial, car les pouvoirs publics communiquent peu sur la question. Entre 1975 et 1985, 147 938 femmes et enfants marocains se sont installés en France. Et depuis 1976, les Français d’origine étrangère par filiation directe ont beaucoup augmenté (6,7 millions en 2008, d’après l’Insee).

    .…En établissant que les immigrés représentent toujours 10% de la population, au lieu de reconnaître que l’immigration s’est accrue, et a changé de nature, l’Etat a causé de graves conséquences : un débat tabou et biaisé sur l’immigration, un ressentiment d’enfants d’immigrés comme dans les autres classes populaires françaises. L’actualité en porte quotidiennement les traces. » (p,314)

      « Avec 12 millions d’immigrés et leurs enfants (sans parler de la troisième génération), la population française des années 2000 est donc très différente de celle des années 1930 (ou cinquante ?), ce que la classe politique (droite et gauche confondues) peine à formuler. » (p,317)

      Le plus surprenant dans toute cette évolution est le rôle que les intellectuels « algériens » y ont joué :

       « Fin de l’assimilation et apologie de la diversité, le rôle des intellectuels « algériens ». (p,318,319)

      L’Algérie, toujours l’Algérie ! Historiquement, un slogan fit une fortune très relative, « L’Algérie, c’est la France ! », mais de nos jours, certains pourraient commencer à dire : « La France, c’est l’Algérie !

     Comment expliquer une évolution tout à fait paradoxale, partant d’une France qui n’a jamais été à proprement parler une France coloniale jusqu’aux indépendances, une France qui n’a jamais peuplé ses colonies, à la seule exception de l’Algérie (avec le concours des immigrations italiennes et espagnoles), laquelle, après « Le choc des décolonisations » se retrouve progressivement colonisée par des populations venues de l’outre-mer ?

     Je conclurai cette lecture en indiquant que ce livre permet de mieux comprendre pourquoi la question algérienne, avec son courant d’intellectuels issus de la matrice algérienne continue à occuper une place idéologique, politique, et médiatique qui correspond de moins en moins avec notre histoire coloniale et postcoloniale.

     Je regretterai toutefois que l’auteur n’ait pas accordé un peu de place à l’histoire quantitative, celle des ordres de grandeur, des échelles, des rapports de force existant entre tous les acteurs du fiasco décrit.

       Pourquoi ? Parce qu’il s’agit là, et à mon avis, d’une des grandes carences de l’histoire postcoloniale, l’oubli de l’histoire quantitative.

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés