Paris, une Commune en excès de pouvoir !

« Dati «  Hidalgo saigne les Parisiens par l’impôt » Marion Mourgue Le Figaro du 30/11/2022, page 7

Ce sont les minorités qui nous gouvernent !

Une interview dont le contenu est intéressant pour un ancien haut fonctionnaire qui a contribué à la mise en place de la grande réforme institutionnelle des années 1975- 1980 redonnant un maire à la capitale.

            Cette interview pose une série de questions,  mais n’aborde pas, à mes yeux, les problèmes de fond de Paris Capitale de la France, c’est-à-dire l’inadéquation  des institutions parisiennes des années 70 à l’évolution de la région parisienne et du pays, et face à l’évolution des pouvoirs, notamment l’émergence et l’explosion des réseaux sociaux et de la communication.

Paris occupe  une « position stratégique » inégalable en France.

            Le 19 octobre 2021, je publiais une chronique intitulée « Les destinées de Paris « Commune » ou « un État dans l’État » ?

            J’écrivais : « Presque  quarante ans après les réformes des années 70-80, les  relations institutionnelles que j’avais décrites sont à revoir complètement, entre Paris, soi-disant commune de droit commun, les communes et départements sacrifiés de sa banlieue, une métropole qui peine à exister, une région dynamique, et un État central bureaucratique légitimement contesté par nos provinces, sur un écran permanent de communication et de manipulation politique tous azimuts de la part des élus parisiens. »

            Traitons successivement questions du jour et questions de fond :

Les Questions du jour

Les chiffres cités ?

            Mme Dati : « …. Je dénonce effectivement l’explosion d’une dette qui s’élève à 10 milliards d’euros. »

D’où vient ce chiffre dont je n’ai pas trouvé la source ? Je ne l’ai pas trouvé dans les derniers rapports de la Chambre Régionale des Comptes.

« Tours de passe-passe comptables » : lesquels, faute d’audit effectué par les oppositions au Conseil de Paris ?

« Nous exigeons depuis deux ans un audit de la gestion de la ville… »

Il y a bien longtemps que l’opposition aurait pu le faire si elle l’avait décidé. Elle n’en n’aurait eu ni la compétence, ni les moyens ?

L’audit nécessaire rencontrera une grande difficulté liée à l’extrême complexité du système administratif et financier parisien et à la constellation des organismes et sociétés qui en font partie : un vaste réseau de vases communicants qui permettent de « fausser », pour ne pas dire « truquer » la comptabilité, mais il faut le démontrer. 

Comment ne pas relever les initiatives démagogiques de la mairie, dans le tout vert et le tout social (explosion de la dépense sociale, le logement, des dépenses soi-disant vertes, des chantiers partout…. ) sans compter ce que coûte déjà la préparation des JO de 2024, peu compatibles avec une politique de décarbonation de la Ville, et la réduction du nombre des passoires thermiques de la Ville ?

Effectivement, Paris est dans un triste état !

L’équipe municipale actuelle met presque chaque jour la Ville de Paris en ébullition, et récemment en chamboulant les voies de circulation, en multipliant les travaux, les interdictions, au mépris des habitants de la banlieue et des activités économiques de la capitale, comme si les institutions de l’État n’existaient pas, les assemblées ou le gouvernement, l’ensemble des représentations diplomatiques, les Préfets actuels donnant l’impression d’être aux abonnés absents : la Maire donne les ordres.

Les Parisiens ne partagent pas tous la culture bobo de l’équipe Hidalgo, alors qu’elle n’a fait que 1,75 % des voix aux dernières présidentielles, après avoir déclaré, avant les municipales, qu’elle ne serait pas candidate à cette élection.

Les conseillers de Paris jouissent d’une rente de situation, d’un privilège politique, un potentiel de communication fondé sur leur position dans la capitale, alors que leur représentativité politique est faible ou non démontrée.

Les Rousseau, Obono, Charon, Bayou, Benbassa…, ont très souvent tendance à s’exprimer sur le plan national en jouant sur une représentativité politique qui pose question.

L’’équipe municipale actuelle a bien assimilé la partition, sauf qu’elle n’a en effet pas les bases politiques nationales nécessaires, et qu’en prenant toutes sortes d’initiatives sur tous les plans, elle ajoute à la grande confusion des pouvoirs qui existe dans la capitale et dans la région, le qui fait quoi entre la région, les départements, les communes, la métropole, et l’État, un mille-feuille bureaucratique.

La capitale souffre de l’absence de l’État et pour Madame Hidalgo : «  l’État, c’est moi ! ».

La « position » politique et stratégique de Paris a toujours nourri les ambitions les plus folles, aujourd’hui celles de la Maire de la capitale, car la capitale constitue une plateforme exceptionnelle de communication, d’influence et de pouvoir.

La Maire de Paris n’aurait sans doute pas pu bénéficier du soutien d’une équipe municipale, politiquement multicarte, si ses membres n’y avaient vu également leur intérêt, celui de disposer d’un levier politique qu’ils n’auraient jamais eu avec les minorités politiques ou civiles qu’ils représentaient, les communistes, les fractions écolos, et un Parti Socialiste « sociétal » exsangue.

Pour avoir en France une compréhension  complète des enjeux économiques, sociaux et politiques, il est nécessaire de faire intervenir le rôle majeur de l’establishment qui est au cœur de tous les problèmes et décisions nationales,  et pour ce faire, rééquilibrer le système de pouvoir au profit des provinces, de ce qu’on appelle les « territoires ».

Les Questions de Fond

« Paris, un État dans l’État » ? Toujours !

Oui, pour d’autres raisons !

Avant la réforme des années 70, le système parisien fonctionnait dans un contexte étatique préfectoral doté de moyens démarqués de l’État, notamment  pour les statuts du personnel.

 De nos jours, la Ville de Paris jouit encore de privilèges hérités de l’Etat, à la fois dans la gamme de ses statuts ou dans l’adaptation des anciens statuts.

Excès de pouvoir ? Pourquoi ?

Les héritages de l’ancien système parisien

La Chambre Régionale des comptes vient de publier un rapport fort intéressant intitulé « Paris et Métropole Exercices 2016 et suivants »

Ce document montre l’ensemble des liens juridiques qui permettent à la ville de Paris d’échapper à la Métropole grâce aux nouveaux tentacules de pouvoir  que sont les accords de coopération bilatérale passés avec les départements voisins, s’ajoutant aux anciens, établis sur la base du patrimoine immobilier important qu’elle détient encore en banlieue.

La Ville de Paris est au cœur d’une mini métropole parallèle à la Grande Métropole qui a du mal à exister. Elle jouit d’une grande capacité à tirer beaucoup de ficelles  dans la Région Ile de  France.

Quelques notes du Rapport : 

« La Ville de Paris poursuit sa propre stratégie métropolitaine, autonome par rapport à la MGP…elle n’est pas, ou pas encore au cœur d’une métropole polycentrique. … l’organisation des services de la ville n’intègre qu’à la marge « la « dimension métropolitaine »… le rôle déterminant de la Ville de Paris dans la gouvernance de la MGP… une gouvernance Paris/MGP partagée… absence de transferts en matière d’aménagement et de logement… des groupements de commandes principalement coordonnés par la ville de Paris….l’absence de dimension métropolitaine dans les services de la ville », « une coopération par projet »   le PLU 2020, « un projet autonome ».

Il est évident que l’équipe Hidalgo ne joue pas le jeu démocratique d’une métropole parisienne, et qu’elle en a fait un outil de plus de domination politique.

En ce qui concerne le boulevard périphérique, la Ville considère qu’il lui appartient, alors que l’État et l’ancien District de Delouvrier sont à l’origine financière de la création de ce boulevard, dont l’intérêt interdépartemental est indiscutable.

Nécessité d’une nouvelle réforme institutionnelle

Plus de quarante après, les relations institutionnelles en question sont à revoir complètement, entre Paris, soi-disant commune de droit commun, les départements sacrifiés de sa banlieue, une métropole qui peine à exister, une région dynamique, et un État central bureaucratique de plus en plus contesté par nos provinces, sur un écran permanent de communication et de manipulation.

            Paris est ouvert à tous les vents, souvent de l’étranger, avec par exemple un Qatar qui occupe une « position » de choix dans la communication de Paris et donc de la France, une forme de capture d’image qui ne dit pas son nom, alors que Paris s’enferme comme dans sa forteresse, aujourd’hui bobo.

Le « périphérique » n’est pas uniquement physique !

Paris a pris tout un ensemble de mesures de circulation et de stationnement qui valent bien  les « octrois » du passé – payer pour y accéder -,  des octrois supprimés en 1943 par le Régime de Vichy, en biffant la solidarité nécessaire entre Paris et sa banlieue.

Ajoutons enfin que Paris  reste au cœur de l’«establishment » français qui continue à gouverner notre pays, à imposer sa loi et sa bureaucratie à nos provinces  françaises, d’où l’importance de retrouver un équilibre des pouvoirs entre l’ensemble de nos provinces.

Conclusion :

il faut adapter la répartition des pouvoirs à l’évolution de notre pays, mettre fin à une bureaucratie qui multiplie les niveaux de compétence, entre l’Union européenne, la nation, les provinces, les départements, les communes, simplifier.

En concurrence avec les pouvoirs de l’Union européenne, que l’Etat central fasse son métier régalien, et les vaches seront bien gardées, selon un de nos vieux dictons provinciaux.

Que l’État transfère à nos régions ses pouvoirs dans les domaines non régaliens : économie, emploi, environnement, enseignement, santé, culture…

Dans la région d’Ile de France, Il faut instituer une vraie métropole qui égalise les chances du « pouvoir » entre Paris et les départements de la Petite Couronne.

La Com, les réseaux sociaux, l’affaiblissement des corps intermédiaires ont attribué un pouvoir excessif au système parisien, à son establishment, un excès de pouvoir qui  défie nos  institutions  démocratiques et républicaines, d’autant plus que quelques minorités diffusent leur propagande grâce à la position stratégique que leur donne leur élection parisienne.

Jean Pierre Renaud       Tous droits  réservés

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