« Ces migrants que la France ne fait pas rêver »
Titre de la première page du journal Le Monde des 13 et 14 septembre 2015
OU
Ces migrants qui ne font pas rêver les Français !
En comprenez-vous les raisons ?
Il ne s’agit pas de celles qu’évoque Monsieur Stora, historien, camarade de gauche bien connu, qui semble avoir oublié l’accueil enthousiaste que la France a « réservé » au million de Français d’Algérie à l’occasion de l’indépendance de ce pays, et il ne s’agissait pas alors de « migrants ».
A voir le succès de fréquentation de la Cité de l’Immigration, il n’est pas interdit de se demander si cette création purement politique (Chirac), sorte de gage du malaise des quartiers sensibles, n’est pas à la fois inutile et coûteuse.
Il ne s’agit pas des raisons caricaturales qu’il développe dans sa tribune du Monde des 6 et 7 septembre 2015, la « diabolisation des combats antiracistes », « la mise au secret des histoires migratoires qui ont fait la France »
Diable, c’est le cas de le dire !
Comment ne pas souligner que Monsieur Stora, en compagnie de nombreux autres intellectuels ou chercheurs développent depuis des années un discours mémoriel et historique d’autoflagellation, pervers, idéologique, politique, d’une France coupable de tous les maux coloniaux imaginables ou pas, avec en prime l’inévitable guerre d’Algérie qui, aux yeux de l’historien, représenterait l’alpha et l’oméga de notre histoire coloniale.
Comme je l’ai écrit à plusieurs reprises, la propagande coloniale n’a jamais eu l’ampleur de celle que ces groupes de chercheurs politiques, animés par un esprit d’anticolonialisme anachronique développent dans notre pays depuis des dizaines d’années.
Au feu ! Au feu ! Clament-ils ! Alors qu’ils ont allumé la mèche, et qu’ils en entretiennent les braises !
Ce discours pervers a donc produit des effets dans l’opinion publique aussi bien d’adhésion que de rejet.
Les spécialistes parleraient à juste titre d’un discours autoréalisateur, avec la sorte de mission réussie de mise en accusation permanente de l’histoire de notre pays, une mise en accusation qui fait logiquement peur à une partie de l’opinion publique, une peur de l’étranger.
Le livre « Supercherie coloniale » que j’ai publié en 2007 dénonçait déjà ce discours d’intoxication qui produit de nos jours des résultats destructeurs.
Le lecteur pourra se reporter plus loin aux textes que j’ai publiés à ce sujet, en particulier la postface.
Pour les citoyens bien ou mal informés, le « secret » dénoncé par Monsieur Stora ne serait-il pas au contraire celui qui pèse en partie sur certaines statistiques de l’immigration, sur les origines « ethniques », sur les flux du regroupement familial et des mariages mixtes, sur les chiffres des binationaux par pays, sur la réalité historique des demandeurs d’asile.
On sait que les trois quarts de ces demandeurs n’ont pas droit à l’asile, et qu’en cas de refus, le retour dans leur pays d’origine est pure illusion.
Faites le calcul sur les dernières années, sur des demandes annuelles de l’ordre de 60 000, 45 000 restent concrètement dans notre pays, sous quel statut ?
La démonstration que vient de faire l’OFPRA à Munich pour tenter de faire venir en France quelques centaines de demandeurs d’asile est tout à fait surréaliste, compte tenu de l’impéritie qui a été la sienne depuis plusieurs dizaines d’années.
Pour beaucoup de nos compatriotes, une autre raison, bonne ou mauvaise : on a déjà donné ! Dans le passé, et par exemple, des régularisations massives de clandestins.
La France a une situation qui n’a rien à voir avec celle de l’Allemagne.
Le pays n’est pas bien portant, le chômage est important, beaucoup de Français souffrent, alors qu’ils voient se déployer, année après année, de nouveaux flux de population venant du sud ou de l’est, des concurrents économiques et sociaux qui viennent déstabiliser, qu’on le veuille ou non, l’accès au travail ou aux soins.
Est aussi à citer, le multiculturalisme dont les tenants de l’« établissement » parisien raffolent, sauf que sur le terrain, ce mouvement de fond anime tout autant un communautarisme socio-politique et culturel, pour ne pas dire religieux, qui donne en prime, la majorité, dans telle ou telle collectivité, aux populations venues d’ailleurs.
Un communautarisme à caractère de plus en plus religieux, compte tenu du poids de la population de confession musulmane, du prosélytisme d’une partie d’entre elle, et de l’absence d’interlocuteurs représentatifs.
La communauté musulmane est divisée, tiraillée, entre plusieurs courants, principalement entre chiites et sunnites qui se font une véritable guerre de religion, au Moyen Orient ou ailleurs, pour ne pas parler d’autres nombreuses allégeances.
Enfin, face à ces vagues de jeunes migrants qui semblent bien portants, qui se recommandent de nos droits de l’homme, les Français sont en droit des se poser la question : combien seraient-ils prêts à s’engager pour la cause des droits de l’homme à établir dans leur pays ?
La France est en quête de vérité.
Jean Pierre Renaud, avec la collaboration de MCV
« Supercherie coloniale »
Jean Pierre Renaud
Postface (page 273)
Le discours anachronique, idéologique, et pseudo scientifique de ces chercheurs n’aidera certainement pas les Français d’origine immigrée à trouver leur juste place au sein de la communauté française. Il ne contribuera pas non plus à assurer la paix des esprits et des cœurs, ou tout simplement la paix civile.
Aujourd’hui, on mélange tout, mémoire et histoire, et le dossier algérien submerge toute réflexion objective sur notre mémoire, comme sur notre histoire nationale, car la population française compte aujourd’hui des millions de citoyens d’origine algérienne qui cultivent des mémoires conflictuelles. Et une proportion encore plus importante de Français de souche qui entretiennent d’autres mémoires conflictuelles. Ces conflits n’étant pas prêts de s’apaiser, il convient donc de traiter ce dossier à part parce qu’il empoisonne tout.
Il n’est pas sérieux de dire que l’histoire coloniale française (y compris algérienne) a été une histoire cachée, alors que des travaux innombrables ont été effectués et non censurés, avec des thèses historiques souvent opposées. Que l’histoire coloniale n’ait pas fait l’objet de pages et de pages dans les livres scolaires modernes, quoi d’étonnant alors qu’elle n’occupait pas une place beaucoup plus grande au temps béni des colonies ! Cette situation continue à exprimer tout simplement le désintérêt continu du pays pour son ancien empire.
Alors il est vrai que notre histoire nationale est une sorte de roman, comme l’ont écrit certains, mais elle a au moins le mérite, en comparaison d’autres, d’être ouverte à toutes les critiques.
Alors il est vrai que certaines minorités françaises se plaignent de voir ignorer leur propre histoire, mais personne ne les a empêchées, semble-t-il, de manifester leur curiosité pour leur propre histoire. J’ai rencontré il n’y a pas si longtemps une fort belle antillaise qui ne s’était jamais préoccupée de ses origines : s’agissait-il d’une exception ? Et auparavant, j’avais fait la même expérience avec de jeunes membres de l’élite malgache.
Rassurez-vous, les Français de métropole cultivent la même ignorance de l’outre-mer, sauf lorsqu’il se pare, comme dans le passé, des couleurs d’un exotisme, depuis peu mâtiné de générosité internationale.
Et en ce qui concerne l’Afrique francophone, il est heureux que l’histoire coloniale ait permis à beaucoup de traditions orales d’être transcrites, au lieu d’être perdues, et mises à la disposition de l’histoire africaine !
Ce livre met en évidence le manque de culture générale de ces chercheurs et leur goût forcené pour le tout médiatique, imitant à leur façon et dans leur domaine, toute une partie de notre élite politique, culturelle, sociale, et économique, qui souffre du même travers.
Alors, on raconte n’importe quoi !
Le 12 décembre 2007
Je publierai ultérieurement la quatrième de couverture de ce livre.