Humeur Tique: 850 euros, le revenu minimum de Villepin – le mariage princier « british » de William et Kate

Humeur Tique : 850 euros, le revenu minimum de Villepin ? – William et Kate, le mariage princier « british » de la télévision française ?

Villepin, « casque à pointe », selon le gentil diminutif décerné par l’ancien ministre Léotard, et son revenu de 850 euros :

            Comment est-il possible de se poser comme un héritier du général de Gaulle et du gaullisme, en lançant à l’opinion publique une proposition aussi démagogique et irréalisable que celle d’un revenu citoyen « minimum » de 850 euros assuré à tout citoyen de plus de 18 ans pour vivre dans la dignité ?

            En sa qualité d’héritier avatar du gaullisme radical de la chiraquie, et aujourd’hui promoteur d’un nouveau gaullisme du trapèze volant ?

Du Mariage Princier « British » de William et de Kate et de notre belle télévision publique et républicaine ?

Il est tout de même paradoxal de lire dans un éditorial du Monde du 26 avril 2011, intitulé « La monarchie britannique doit se réinventer », (diable, tout un programme déjà ! avec un doigt d’ingérence ?) que « 70% des Britanniques se déclarent indifférents à ces noces », alors que, depuis des semaines, notre télévision nationale nous bassine les yeux et les oreilles avec ce mariage !

Il est vrai que cela nous change un peu du matraquage quotidien des présidentielles 2012, lequel a commencé il y a des mois et des mois ! Chaque jour, un candidat défile, et il y en a à la pelle !

1895-1896: un épisode tragique de la conquête de Madagascar, Gallieni fait fusiller le ministre de l’Intérieur- 2° partie

Retour historique sur un épisode tragique de la conquête de Madagascar (1895-1896)

A Madagascar, le 15 octobre 1896, le général Gallieni, nouveau proconsul de la France, fait fusiller le ministre de l’Intérieur de Madagascar

Deuxième partie du commentaire

Première partie sur le blog du   15 avril 2011

Le portrait du Prince de la Paix

« Il s’appelait Rainandriamampandry. On pourrait écrire avec traits d’union. Rain – Andria – Mampandry : parce que conformément à l’usage de la langue malgache, qui est, comme disent les philologues, agglutinante, ce nom propre est un conglomérat de mots empruntés à la langue usuelle. Il a donc un sens ;  Rain est un préfixe honorifique de courtoisie ; Andriamampandry signifie Prince de la Paix. Celui qui le portait était en effet un grand seigneur, tout à fait au sommet de la hiérarchie politique et administrative, « seizième honneur », pour adopter la tradition courante, non sans quelque regret… »

L’auteur a donc retenu, par commodité, la traduction de ce nom pour évoquer le personnage, et expliquait :

« Cette liberté qu’on se trouve amené à prendre avec un nom propre doit se concilier avec le plus grand respect pour l’homme qui l’a porté honorablement toute sa vie et dans sa mort violente. Prince de la paix a certainement laissé à Tananarivo des descendants qui ne peuvent pas manquer d’être légitimement fiers de lui, et dont on serait désolé de froisser la piété filiale. 

Si l’un d’eux fait jamais à ces quelques pages, l’honneur de les lire, il ne méconnaîtra pas, j’espère, qu’elles sont imprégnées au fond de sympathie déférente.» (page 69)

L’auteur proposait donc de tenter de comprendre ce haut personnage à partir de ses mémoires qu’il a eu la chance de pouvoir consulter.

Il introduisait donc le sujet en écrivant : « C’est Prince de la Paix qu’il s’agit de comprendre et il a été fusillé en 1896. »

L’auteur notait que le Prince de la Paix fut un écrivain en même temps qu’un homme politique, car il noircit donc beaucoup de livres, « le produit de ses veilles » :

« Quand on a parcouru ces gros livres, ils ouvrent un jour curieux sur l’âme d’un Malgache, élève des missionnaires, à la fin du XIX° siècle. »

« Son père était un haut fonctionnaire, à l’enterrement duquel on a tué un nombre incalculable de bœufs ; le corps était enveloppé de 60 suaires de soie, et 5.000 Francs en piastres ont été déposés dans le tombeau. »

L’auteur racontait donc :

« Moi aussi j’ai touché aux « grandes affaires », comme on disait au XVIIème siècle…J’ai été témoin de ce drame ; j’ai même appartenu, par la situation administrative que j’occupais alors, à cette catégorie de témoins que l’illusion d’une responsabilité oblige à nommer acteurs.

Chez un homme qui a passé le reste de sa vie sur la tour d’ivoire, dans une mémoire encombrée d’érudition livresque, cet épisode a laissé un lot de souvenirs incongrus qui font un contraste ridicule avec le reste…

Avouer que je fus, dans des circonstances graves, un administrateur d’une ineptie amusante, c’est risquer, il est vrai, d’atteindre indirectement celui qui m’a désigné pour ces hautes fonctions, mais celui-là, bien entendu et comme d’habitude j’imagine, c’est le hasard qui est au-dessus de tout discrédit….

Cela se passait dans le courant de 1896, si je ne me trompe, pendant l’insurrection qui suivit la conquête. Elle amena un changement de gouverneur, à M.Laroche succéda le général Gallieni, et le proconsulat militaire fut inauguré par la condamnation à mort et l’exécution du ministre malgache de l’intérieur et d’un prince de la famille royale. Cette exécution fit quelque bruit à l’époque et alimenta des polémiques de presse, aux uns elle parut un crime militaire monstrueux et inutile ; aux autres un geste énergique, équitable et bienfaisant. Naturellement tout fut oublié en quinze jours, on ne peut pas imaginer que ce détail d’histoire coloniale ait retenu plus longtemps l’attention publique.

Le prince malgache exécuté, qui se nommait Ratsimamanga, et qui n’était rien moins qu’oncle de la reine, m’était à peine connu, il avait chez les Malgaches une très mauvaise réputation, justifiée par ses mangeries, il n’avait pas beaucoup de tête et pas beaucoup de cœur…

La victime de premier plan fut certainement le ministre de l’intérieur, Prince de la Paix.

J’étais moi-même directeur des affaires indigènes par intérim, le ministre de l’intérieur malgache de l’intérieur était mon collaborateur ; dans les six mois qui ont précédé sa mort, je l’ai vu au bureau tous les jours matin et soir, je lui ai serré la main très régulièrement quatre fois par jour, et j’ai eu souvent avec lui de longues conversations amicales. La veille de son exécution, je faisais fonction d’interprète au conseil de guerre. En cette qualité, j’ai dû lui traduire la sentence de mort ; la salle du conseil était toute petite, on se touchait, je lui communiquai son arrêt comme on cause, les yeux dans les yeux, à trente centimètres de sa figure extrêmement connue. Je n’y ai vu aucune trace d’émotion, sauf trois petites gouttes de sueur qui perlèrent brusquement sur son front, et il répondit simplement « oui, oui » avec sa petite voix douce habituelle…

Je n’ai pas la prétention d’avoir compris Prince de la Paix au moment même de nos relations quotidiennes… Ainsi est-il advenu que je n’ai pas vu l’homme véritable au moment où je l’avais sous les yeux…

Dans cette période dangereuse  de troubles et de réorganisation qui suit immédiatement une conquête coloniale, que ç’ait été précisément moi qui fus chargé, en collaboration avec Prince de la Paix, de diriger la politique intérieure à Madagascar, je crois me souvenir que, dans ce temps-là, ça me paraissait après tout assez naturel. Aujourd’hui, quand je me reporte à ce passé lointain, j’ai bien le sentiment vif d’une disproportion considérable jusqu’au comique ente la tâche et la préparation professionnelle de l’ouvrier…

Le ministère malgache de l’Intérieur, au contrôle duquel j’étais préposé, fut installé dans le Palais « Au-dessus des désirs » (Tsy-azom-paniry). Ce n’était pas un édifice somptueux, mais il se dressait dans l’enceinte sacrée des palais, tout au sommet du roc de Tananarivo. On y avait à ses pieds presque toute l’Emyrne, l’immense plaine des rizières, et le cercle lointain des montagnes…

Vers le temps où j’eus le devoir très pénible de traduire à Prince de la Paix, mon collaborateur indigène, sa condamnation à mort, je fus moi-même mis à pied. Je m’imaginais alors que ces deux sentences, d’une sévérité inégale, étaient la punition du même crime, l’impéritie. Je sais aujourd’hui que je me trompais.. »

L’ancien directeur des affaires indigènes par intérim n’apprit la vérité que beaucoup d’années plus tard ! Innocence de sa part ou impéritie, allez savoir !

« Il appert que le palais « Au-dessus des désirs » n’a pas seulement favorisé inconsciemment l’insurrection par sa passivité officielle ; il a consacré beaucoup d’activités officieuses à l’organiser consciemment.

Prince de la Paix, mon collaborateur et ami, signait sa correspondance clandestine du pseudonyme « le Patriote ». Cela se dit en malgache Ra-tia-tanin-drazana, et ce substantif est à lui tout seul une petite phrase compliquée : cela signifie « le monsieur qui aime le pays et ses ancêtres »…

Pour Prince de la Paix, mon collaborateur et ami, l’usage d’un pseudonyme était une mesure de prudence bien naturelle. Mais ce pseudonyme était transparent, car les lettres étaient accompagnées de promotions et de brevets, expédiés en bonne et due forme, d’après les traditions de la chancellerie ; et le caractère officiel de toute la correspondance était donc patent…

J’essaie bien de me défendre contre la précision de ces révélations tardives. Le ministre de l’Intérieur fut exécuté pour connivence avec l’insurrection…

J’admets donc que feu mon collaborateur et ami s’est bien décidément moqué de moi outrageusement, et je lui pardonne de tout cœur…

De tout cela se dégage maintenant une figure toute nouvelle de Prince de la Paix, des détails biographiques épars s’harmonisent pour dresser l’image d’un homme extrêmement respectable…

Pendant la guerre de 1884, il commandait les forces malgaches à la côte Est, et il maintint ses positions de Farafate contre les attaques indécises de l’Amiral Miot…

Parmi tant de fonctionnaires peu estimables, Prince de la Paix avait tout de même la réputation d’avoir été, à tout prendre, probablement le plus honnête. C’est à ce titre qu’il fut nommé par le gouvernement français ministre de l’Intérieur, et au même titre exactement, il était naturel qu’il trahît l’étranger pour son pays…

Dans cet effondrement de l’indépendance malgache, où les dévouements et les énergies ont fait défaut, Prince de la Paix est le seul homme qui ait risqué sa vie délibérément.

Ç’aurait été une raison peut-être pour la lui laisser. »

Deux hauts fonctionnaires intervinrent auprès de Gallieni pour lui conseiller la clémence :;

« Messieurs, leur aurait répondu le Général, je vous remercie de votre conseil, mais je n’ai pas l’intention de le suivre »,

 mais, «  Plus tard, lorsqu’il connut le pays, il lui serait arrivé de dire à son Directeur des Finances et à son Directeur des Domaines :

« C’est vous qui aviez raison, Messieurs, j’ai regretté de ne pas vous avoir écoutés. »

« Avec un peu plus de chance le vieux Prince de la Paix aurait donc pu sortir vivant de l’épreuve redoutable. Il eût passé quelques années qui lui restaient à vivre dans l’apparat de ses dignités. On peut se demander si ces quelques années en valaient la peine. Il est permis de préférer pour lui la mort violente du héros, dans un moment de la vie de son peuple où l’héroïsme était rare. »

Deux simples commentaires :

Un jugement terrible sur le comportement de l’élite malgache de l’époque de la conquête.

Une décision du général Gallieni qu’il faut analyser et interpréter, alors qu’il ignorait tout de ce pays, qu’il avait été nommé à son nouveau poste dans un contexte d’insurrection, et enfin qu’il a toujours témoigné au cours de sa vie coloniale d’un amour sans doute trop exclusif de la nouvelle République française.

Et à observer le comportement des élites actuelles de ce beau et attachant pays – toujours dans un régime de transition, deux ans après un coup d’Etat -, il est possible de se demander si le premier commentaire n’a pas conservé toute sa valeur.

La France serait d’ailleurs bien inspirée de rappeler son ambassadeur à Madagascar, sauf pour l’auteur ou les auteurs du Coup d’Etat de février 2009, à cesser leurs palinodies et à accepter des élections libres et démocratiques sous le contrôle d’institutions internationales, et cela, dans un délai de quelques  mois !

Jean Pierre Renaud

Les caractères gras sont de ma responsabilité

PS : Le livre « Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large » (Jean Pierre Renaud, Editions JPR) propose, entre autres (Soudan, Tonkin, et Fachoda), une analyse du déroulement de l’expédition de Madagascar sous l’angle de la communication technique, politique et militaire entre gouvernement et  chef militaire de l’expédition. En clair, quels ordres étaient donnés ? Comment ? Par qui étaient-ils exécutés ? Question : les généraux n’en faisaient-ils qu’à leur tête, en pratiquant la politique du « fait accompli » ?

Eclats de vie coloniale : Madagascar

Retour historique sur un épisode tragique de la conquête de Madagascar (1895- 1896)

A Madagascar, le 15 octobre 1896, le général Gallieni, nouveau proconsul de la France fait fusiller le ministre de l’Intérieur de Madagascar.

Première partie du commentaire

Pourquoi ?

 La source historique:

« Trois Héros

Le Général Laperrine – Le Père de Foucauld – Prince de la Paix »

Par E.F.Gautier Professeur à l’Université d’Alger »

Le sacrilège colonial ?

La singularité « colonialiste » du professeur Gautier

            Ce petit livre de 139 pages a été publié par les Editions Payot, en 1931, date de la grande Exposition coloniale de 1931, laquelle aurait, d’après certains chercheurs, marqué en profondeur la mentalité des Françaisen confirmant la culture coloniale qui, grâce au « matraquage » de la propagande coloniale, aurait imprégné la mentalité des Français, à un degré tel, qu’ils seraient encore porteurs, « sans le savoir », de « stéréotypes coloniaux », portés par « l’inconscient collectif » cher  à l’historienne Coquery-Vidrovitch. 

            Le petit livre en question a été écrit par un universitaire français, Emile-Félix Gautier, qui s’est illustré par ses recherches sur Madagascar et le Sahara.

            Sorti de l’Ecole Normale, en 1884, il réussit à se faire donner, en 1892, une mission d’exploration géographique à Madagascar. Il y passa trois ans à parcourir à pied  les régions encore inconnues de l’ouest de la grande île.

            En 1895, la conquête de Madagascar mit fin à sa mission, et il se retrouva directeur intérimaire des Affaires indigènes, avant de devenir directeur de l’enseignement entre 1896 et 1899.

            C’est dans ce poste d’intérimaire qu’il côtoya le ministre de l’Intérieur malgache, dont il raconte la destinée tragique.

Son ouvrage est tout à fait singulier, pour sa date de publication déjà évoquée, mais pour deux autres raisons majeures :

–       Il est tout à fait étrange de voir ce ministre fusillé par Gallieni, dont il retient le nom traditionnel « Prince de la Paix », rangé dans la catégorie des Trois héros (pour la moitié de ses pages), alors que les deux autres sont le général Laperrine, mort dans un accident d’avion, en 1917, le conquérant militaire du Sahara, et Charles de Foucauld, ermite à Tamanrasset, assassiné en 1916, quatre-vingt ans avant l’assassinat en Algérie, des moines de Tibihérine. Gallieni fit fusiller le même jour un oncle de la reine, le prince Ratsimamanga.

–       Seul point commun apparent : les trois héros sont morts de mort violente !

–       Le portrait du Prince de la Paix qu’il propose n’est pas du tout négatif, bien au contraire, et c’est sans doute en reconnaissant le courage national de ce haut dignitaire malgache, dans les circonstances difficiles de la conquête de son pays, qu’il ose le ranger aux côtés des deux autres héros. Il lui reconnait l’honneur de son double jeu en présence de l’occupant.

Donc, un  ouvrage tout à fait singulier à plusieurs titres !

Le théâtre historique de la conquête

            Revenons un instant sur l’histoire des relations entre la France et Madagascar avant la conquête coloniale de 1895.

Jusqu’à la révolution technologique du dix-neuvième siècle (vapeur, électricité, télégraphe et câbles, armement, industries, canal de Suez, etc…) les puissances occidentales s’étaient depuis longtemps intéressé aux richesses de l’Orient et de l’Asie, et de grandes compagnies de commerce avaient rivalisé pour y implanter des comptoirs, notamment anglaises et hollandaises.

Mais la révolution technologique en question produisit une révolution dans les relations entre nations, l’Occident disposant alors des moyens nécessaires pour  assurer une domination coloniale sur les pays dits « arriérés ».

Après un bref épisode « heureux », la France avait été éliminée des Indes, mais elle avait continué à entretenir des relations politiques et commerciales sur la route des Indes, notamment dans l’Océan Indien, avec la persistance de la rivalité coloniale historique franco-anglaise.

Les navires français avaient fréquenté les côtes malgaches, tout au long du dix-huitième et du dix-neuvième siècle, et la France s’était implantée définitivement dans l’île de la Réunion, une île de colons, souvent très entreprenants, pour ne pas dire « colonialistes » à l’égard de leur grand voisin malgache.

C’est d’ailleurs à l’occasion d’un passage éclair, quinze jours en tout, d’un colon réunionnais au ministère de la Marine et des Colonies, M.de Mahy, que la France se lança dans les premières opérations de conquête de la grande île, en 1885.

Cette campagne ne fut pas un succès et se solda par un traité boiteux et ambigu entre la monarchie Hova et la République française, traité qui posa en fait les bases du contentieux qui allait servir de prétexte à la France pour intervenir à Madagascar, en 1895.

Le lecteur notera au passage qu’au cours de cette campagne un des rares nobles de la monarchie malgache à s’être brillamment illustré en résistant vaillamment aux troupes françaises, à Farafate,  sur la côte orientale de Tamatave, fut le fameux ministre de l’Intérieur fusillé en 1896, M. Rainandriamampandry, dont l’histoire tragique est ici racontée succinctement.

En 1895, la France s’était donc lancée dans la folle aventure coloniale de la conquête de Madagascar, sous la conduite du général Duchesne, une conquête de plus, une expédition coûteuse pour les épargnants français, mais surtout coûteuse en vies humaines.

L’historien Brunschwig notait que « l’expédition Duchesne fut criminelle », car les pertes, principalement pour cause de maladies, furent considérables, un soldat sur trois, et surtout dans les unités recrutées en métropole : le 200ème de ligne et le 40ème Chasseurs avaient perdu la moitié de leur effectif.

Il était d’ailleurs tout à fait exceptionnel que les gouvernements de la Troisième République fassent appel, pour ces conquêtes, et même partiellement, à des contingents de troupes métropolitaines.

Toujours est-il que Tananarive tomba aux mains des Français le 30 septembre 1895, et que le gouvernement français fit rapidement voter par la Chambre des Députés l’annexion de Madagascar : la monarchie était donc devenue une fiction.

Pour expliquer, mais surtout justifier ce processus, le ministre Hanotaux avait utilisé une formule surprenante « les événements ont marché », formule qui illustrait parfaitement les pratiques coloniales du fait accompli, lesquelles n’étaient pas toujours celles des généraux, comme je l’ai démontré dans le livre « Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large ». (1)

Problème pour le nouvel occupant des lieux, la population malgache résistait et l’île s’embrasait. Le général Gallieni remplaça donc l’ancien résident Laroche et reçut la mission de pacifier la nouvelle colonie. Il débarqua à Tananarive le 28 septembre 1896, un peu plus d’un an après la conquête.

C’est dans ce contexte historique que M.Gautier, directeur des affaires indigènes par intérim, travailla aux côtés de celui qu’il baptisa du nom de Prince de la Paix, le ministre de l’Intérieur très éphémère du proconsul Gallieni ou de la reine Ranavalonana III, car il y avait bien une fiction institutionnelle.

La juxtaposition des trois noms, Laperrine, de Foucauld et prince de la Paix est d’autant plus surprenante que le livre a été publié en 1931.

Jean Pierre Renaud

(1)  « Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large » Editions JPR 2006

Le rôle de la communication et des communications dans les conquêtes coloniales (1870-1900) »

Le blog  publiera la deuxième partie de cette chronique dans  la semaine du 25 avril 2011

1896: Gallieni fait fusiller le ministre de l’Intérieur de Madagascar

Eclats de vie coloniale : Madagascar

Retour historique sur un épisode tragique de la conquête de Madagascar (1895- 1896)

A Madagascar, le 15 octobre 1896, le général Gallieni, nouveau proconsul de la France fait fusiller le ministre de l’Intérieur de Madagascar.

Première partie du commentaire

Pourquoi ?

 La source historique:

« Trois Héros

Le Général Laperrine – Le Père de Foucauld – Prince de la Paix »

Par E.F.Gautier Professeur à l’Université d’Alger »

Le sacrilège colonial ?

La singularité « colonialiste » du professeur Gautier

            Ce petit livre de 139 pages a été publié par les Editions Payot, en 1931, date de la grande Exposition coloniale de 1931, laquelle aurait, d’après certains chercheurs, marqué en profondeur la mentalité des Françaisen confirmant la culture coloniale qui, grâce au « matraquage » de la propagande coloniale, aurait imprégné la mentalité des Français, à un degré tel, qu’ils seraient encore porteurs, « sans le savoir », de « stéréotypes coloniaux », portés par « l’inconscient collectif » cher  à l’historienne Coquery-Vidrovitch. 

            Le petit livre en question a été écrit par un universitaire français, Emile-Félix Gautier, qui s’est illustré par ses recherches sur Madagascar et le Sahara.

            Sorti de l’Ecole Normale, en 1884, il réussit à se faire donner, en 1892, une mission d’exploration géographique à Madagascar. Il y passa trois ans à parcourir à pied  les régions encore inconnues de l’ouest de la grande île.

            En 1895, la conquête de Madagascar mit fin à sa mission, et il se retrouva directeur intérimaire des Affaires indigènes, avant de devenir directeur de l’enseignement entre 1896 et 1899.

            C’est dans ce poste d’intérimaire qu’il côtoya le ministre de l’Intérieur malgache, dont il raconte la destinée tragique.

Son ouvrage est tout à fait singulier, pour sa date de publication déjà évoquée, mais pour deux autres raisons majeures :

–       Il est tout à fait étrange de voir ce ministre fusillé par Gallieni, dont il retient le nom traditionnel « Prince de la Paix », rangé dans la catégorie des Trois héros (pour la moitié de ses pages), alors que les deux autres sont le général Laperrine, mort dans un accident d’avion, en 1917, le conquérant militaire du Sahara, et Charles de Foucauld, ermite à Tamanrasset, assassiné en 1916, quatre-vingt ans avant l’assassinat en Algérie, des moines de Tibihérine. Gallieni fit fusiller le même jour un oncle de la reine, le prince Ratsimamanga.

–       Seul point commun apparent : les trois héros sont morts de mort violente !

–       Le portrait du Prince de la Paix qu’il propose n’est pas du tout négatif, bien au contraire, et c’est sans doute en reconnaissant le courage national de ce haut dignitaire malgache, dans les circonstances difficiles de la conquête de son pays, qu’il ose le ranger aux côtés des deux autres héros. Il lui reconnait l’honneur de son double jeu en présence de l’occupant.

Donc, un  ouvrage tout à fait singulier à plusieurs titres !

Le théâtre historique de la conquête

            Revenons un instant sur l’histoire des relations entre la France et Madagascar avant la conquête coloniale de 1895.

Jusqu’à la révolution technologique du dix-neuvième siècle (vapeur, électricité, télégraphe et câbles, armement, industries, canal de Suez, etc…) les puissances occidentales s’étaient depuis longtemps intéressé aux richesses de l’Orient et de l’Asie, et de grandes compagnies de commerce avaient rivalisé pour y implanter des comptoirs, notamment anglaises et hollandaises.

Mais la révolution technologique en question produisit une révolution dans les relations entre nations, l’Occident disposant alors des moyens nécessaires pour  assurer une domination coloniale sur les pays dits « arriérés ».

Après un bref épisode « heureux », la France avait été éliminée des Indes, mais elle avait continué à entretenir des relations politiques et commerciales sur la route des Indes, notamment dans l’Océan Indien, avec la persistance de la rivalité coloniale historique franco-anglaise.

Les navires français avaient fréquenté les côtes malgaches, tout au long du dix-huitième et du dix-neuvième siècle, et la France s’était implantée définitivement dans l’île de la Réunion, une île de colons, souvent très entreprenants, pour ne pas dire « colonialistes » à l’égard de leur grand voisin malgache.

C’est d’ailleurs à l’occasion d’un passage éclair, quinze jours en tout, d’un colon réunionnais au ministère de la Marine et des Colonies, M.de Mahy, que la France se lança dans les premières opérations de conquête de la grande île, en 1885.

Cette campagne ne fut pas un succès et se solda par un traité boiteux et ambigu entre la monarchie Hova et la République française, traité qui posa en fait les bases du contentieux qui allait servir de prétexte à la France pour intervenir à Madagascar, en 1895.

Le lecteur notera au passage qu’au cours de cette campagne un des rares nobles de la monarchie malgache à s’être brillamment illustré en résistant vaillamment aux troupes françaises, à Farafate,  sur la côte orientale de Tamatave, fut le fameux ministre de l’Intérieur fusillé en 1896, M. Rainandriamampandry, dont l’histoire tragique est ici racontée succinctement.

En 1895, la France s’était donc lancée dans la folle aventure coloniale de la conquête de Madagascar, sous la conduite du général Duchesne, une conquête de plus, une expédition coûteuse pour les épargnants français, mais surtout coûteuse en vies humaines.

L’historien Brunschwig notait que « l’expédition Duchesne fut criminelle », car les pertes, principalement pour cause de maladies, furent considérables, un soldat sur trois, et surtout dans les unités recrutées en métropole : le 200ème de ligne et le 40ème Chasseurs avaient perdu la moitié de leur effectif.

Il était d’ailleurs tout à fait exceptionnel que les gouvernements de la Troisième République fassent appel, pour ces conquêtes, et même partiellement, à des contingents de troupes métropolitaines.

Toujours est-il que Tananarive tomba aux mains des Français le 30 septembre 1895, et que le gouvernement français fit rapidement voter par la Chambre des Députés l’annexion de Madagascar : la monarchie était donc devenue une fiction.

Pour expliquer, mais surtout justifier ce processus, le ministre Hanotaux avait utilisé une formule surprenante « les événements ont marché », formule qui illustrait parfaitement les pratiques coloniales du fait accompli, lesquelles n’étaient pas toujours celles des généraux, comme je l’ai démontré dans le livre « Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large ». (1)

Problème pour le nouvel occupant des lieux, la population malgache résistait et l’île s’embrasait. Le général Gallieni remplaça donc l’ancien résident Laroche et reçut la mission de pacifier la nouvelle colonie. Il débarqua à Tananarive le 28 septembre 1896, un peu plus d’un an après la conquête.

C’est dans ce contexte historique que M.Gautier, directeur des affaires indigènes par intérim, travailla aux côtés de celui qu’il baptisa du nom de Prince de la Paix, le ministre de l’Intérieur très éphémère du proconsul Gallieni ou de la reine Ranavalonana III, car il y avait bien une fiction institutionnelle.

La juxtaposition des trois noms, Laperrine, de Foucauld et prince de la Paix est d’autant plus surprenante que le livre a été publié en 1931.

Jean Pierre Renaud

(1)  « Le vent des mots, le vent des maux, le vent du large » Editions JPR 2006

Le rôle de la communication et des communications dans les conquêtes coloniales (1870-1900) »

Le blog  publiera la deuxième partie de cette chronique dans  la semaine du 25 avril 2011

Le film « Essential Killing » de Jerzy Skolimowski

Avant de donner quelques impressions sur ce film, de faire part de mes réactions de cinéphile amateur de films de dépaysement, je voudrais dire que je suis toujours surpris par l’écriture des quelques critiques de cinéma dont j’ai l’habitude de lire les textes, des textes le plus souvent fort bien écrits, léchés, toujours sophistiqués, dans lesquels j’ai quelquefois la plus grande peine à loger mes propres impressions , ma lecture personnelle du film.

            J’ai sans doute le tort de ne pas faire partie du petit cénacle de cinéphiles professionnels.

            J’ai donc été voir ce film dans une salle d’art et d’essai, un film auréolé des critiques les plus élogieuses, de la part du cénacle en question, mais ma vision n’a pas du tout été celle des professionnels.

            Pour parler de ce film, un critique a proposé l’adjectif « radical », et je serais tenté de dire que ma critique sera tout aussi radicale.

L’histoire d’un taliban qui ne dit pas son nom, poursuivi et arrêté, après avoir tué plusieurs soldats américains dans un très beau désert de cinéma à canyons profonds et brûlés de soleil, qui ne dit pas non plus son nom, – assez différent des paysages d’’Afghanistan dont les images passent en boucle, au fil des années, sur toutes les chaînes de télévision, –transféré en secret dans un pays du nord qui ne dit pas non plus son nom. A nouveau en fuite, à nouveau poursuivi, dans une forêt profonde, enneigée, peuplée d’arbres magnifiques, courant, courant, pourchassé, toujours pourchassé, sans boire, ni manger, des jours et des nuits qu’on ne compte plus…

Un ballet d’hélicoptères avec ce fameux bruit toujours entêtant des pales que connaissent les familiers d’Apocalypse Now (ou ceux des djebels de Kabylie),  un flot continu de très belles images de paysages et de forêts enneigés, et du héros, caméra sur l’épaule, de très belles images, mais jusqu’à plus soif ! Le héros a d’ailleurs soif !

Il est difficile de croire à cette histoire ténue et d’adhérer à une esthétique qui écrase, un pur exercice d’esthétique, les deux « one man show » du réalisateur et d’un acteur qui a d’ailleurs, plus que parfaitement, fait son métier.

Avant de terminer, je serais tenté de dire : est-ce qu’il ne s’agit pas d’un exercice subliminal de cinéma à la gloire des talibans ? Une chasse à l’homme, avec un héros magnifique et magnifié dans sa fuite, un nouveau martyre, lequel dans ses quelques moments d’hallucination, voit passer en rêve le texte de quelques sourates du Coran.

Mais si vous allez voir ce film, vous n’êtes naturellement pas obligé d’adhérer à ces propos, et trouverez peut-être qu’au moins deux moments de ce film sont extraordinaires : la scène au cours de laquelle le fuyard, mort de faim et de soif, se jette sur une femme qui donne le sein à son bébé, au bord d’un chemin, pour s’allaiter lui-même à son sein, et celle de sa fuite sur un beau cheval blanc ; gravement blessé par une tronçonneuse au cours d’une lutte avec un bûcheron, il pisse un sang rouge qui inonde l’encolure blanche de son beau cheval blanc. Dans une anthologie kitsch du cinéma?

Jean Pierre Renaud

Humeur Tique: la Françafrique d’avant et d’après Côte d’Ivoire? Mourir à Doha et le président de la République Française?

Humeur Tique : Françafrique modèle 2011, un avant et un après Côte d’Ivoire ?

La première page ambigüe de Libération du 12 avril 2011 : « La France sort Gbagbo »

Ou de préférence « Le regard de Plantu » en première page du Monde du 13 avril intitulée « Gbagbo se plaint de ses conditions de détention », avec l’apparition des Vergès et Dumas, « cher client » et la réponse en bulle de Gbagbo « Ah non ! Pas eux ! »

Un dictateur africain déchu, très bien ! Au tour des autres à présent ?

L’intervention de la France dans le dénouement de cette crise pose, en tout cas et une fois de plus, le problème de son rôle dans l’ancien « pré carré »  africain.

            En la circonstance, la France a été le bras militaire séculier de l’ONU, mais il est évident que son intervention, sous le parapluie d’une cause internationale, n’aurait pas été possible, en tout cas dans les conditions connues, si la France n’avait pas disposé d’une force militaire disponible en Côte d’Ivoire, avant même, sauf erreur, la couverture diplomatique de l’ONU.

            Et chacun sait que notre pays dispose d’autres forces « prépositionnées » de notre armée « professionnelle »  en Afrique ! Qu’en sera-t-il à nouveau, si dans l’un ou l’autre de ces pays, au Gabon, ou à Djibouti, le même type de crise se produit ?

            A l’occasion des prochaines élections présidentielles, les différents candidats devraient faire connaître clairement aux Français les conditions éventuelles d’intervention des forces armées françaises dans ces pays, en modifiant sans doute le droit constitutionnel applicable, en cas d’intervention militaire.

Humeur Tique : Mourir à Doha ? Guerre et Paix du Président de la République ?

            Il n’est pas besoin d’être un savant dans la chose constitutionnelle pour être un peu surpris, en qualité de citoyen français, par la facilité déconcertante avec laquelle un Président de la République Française  a la possibilité d’engager nos forces armées à l’étranger. Tel a été le cas le plus récent de la Libye.

            D’après le Monde du 9 avril dernier (page 10) :

 « Les engagements successifs de la France sur deux terrains d’opérations extérieurs n’ont pas provoqué de grands débats parlementaires. Il est vrai que le président de la République, chef des armées, n’a pas besoin de l’autorisation du Parlement pour faire intervenir les forces armées à l’étranger. Le gouvernement est néanmoins tenu, aux termes de la Constitution, d’informer celui-ci « au plus tard trois jours après le début de l’intervention ». Cette information peut être suivie d’un débat mais sans vote. Ce n’est que lorsque l’intervention excède quatre mois que le gouvernement doit soumettre sa prolongation à l’autorisation du Parlement »

Il s’agit en effet de l’article 35 de la Constitution !

Et d’ajouter à la citation du journal la fin de cet article : « Il peut demander à l’Assemblée Nationale de décider en dernier ressort. Si le Parlement n’est pas en session à l’expiration du délai de quatre mois, il se prononce à l’ouverture de la session suivante. »

En résumé  donc, tout pouvoir au président de la République et la guerre ou la paix peuvent se mettre en vacances !

Une découverte sans doute pour beaucoup de citoyens qui n’avaient prêté aucune attention, à tort, à une réforme faite en 2008 !

            La France en guerre sans véritablement le savoir, et sans que la représentation nationale ait quasiment son mot à dire, c’est à dire donner son autorisation démocratique !

            Quand est-ce que la France va enfin accéder au statut d’une véritable démocratie ?

            Un exercice de pouvoir d’autant plus facile qu’avec la fameuse armée professionnelle, initiée par Chirac, dont le savoir-faire et la compétence ne sont pas en cause, le Président de la République peut prendre sa décision avec une « âme légère ».

            Lorsque le général de Gaulle a fait voter la nouvelle Constitution de la Vème République, il n’en était pas de même, puisque l’armée française était constituée pour l’essentiel de conscrits issus donc de la conscription.

Les prochaines élections présidentielles devraient être l’occasion de remettre complètement à plat ce système de pouvoir « autocratique » et redonner à la représentation nationale la capacité d’engagement ou de refus d’engagement de notre armée à l’étranger.

Et pour les citoyens initiés, jamais sans doute la France ne se serait engagée dans les conquêtes coloniales de la Troisième République sans son armée coloniale « professionnelle » !

Et pour les citoyens avisés, comment ne pas être surpris que la France trouve toujours de l’argent pour soutenir ou engager des opérations militaires extérieures, alors qu’elle est, depuis plus de trente ans, dans l’incapacité de mettre le même argent dans un programme dédié au retour des « ghettos urbains » dans la République ?

Humeur Tique : Borloo, le « gazeur » du gaz de schiste ?

        Vous vous souvenez sans doute du Grenelle de l’Environnement 1, 2, peut-être 3,  difficile à dire ? Et du ministre de l’Ecologie ou de l’Environnement, M.Borloo, peut-être ?

            Mais savez-vous que le même Boorlo  nous a tous « gazé », nous, les pauvres petits électeurs en autorisant, sans précautions, les sondages dans des gisements supposés de gaz de schiste.

            Une signature donnée à la sauvette alors qu’il faisait des pieds et des mains pour se hisser à Matignon !

            On a beaucoup dit que si la France n’avait pas de pétrole, elle avait des idées, et ne pourrait-on pas dire aujourd’hui que si la France a du gaz elle a aussi ses « gazeurs » ?

PS : voir le mot gazer dans les enquêtes de Nicolas le Floch

Humeur Tique: Borloo « Je quitte l’UMP »: Encore du gazage

Humeur Tique : Borloo « Je quitte l’UMP »

Le Parisien du 8 avril 2010

Encore du « gazage » ?

Mais alors, Borloo ne sera plus sous perfusion financière de l’UMP qui assurait les recettes du Parti Radical (indépendant ?) jusqu’à 77% en 2009 ? (Source Direct Matin du 2 février 2010)

Borloo va vraiment couper le tuyau ? Comment joindra-t-il alors les deux bouts ? Je quitte vraiment l’UMP et ma situation de maison politique «  entretenue » ?

Courage politique ou nouvelle opération de « gazage » du citoyen ?

Sauf à bénéficier d’une autre transfusion, celle d’un parti exotique de Tahiti, lequel a assuré une grande partie du financement d’un autre parti centriste « indépendant », le Nouveau Centre ?

Allons donc tous à Tahiti !

Humeur Tique : la nouvelle Françafrique ? Modèle 2011 ? Côte d’Ivoire et Madagascar

La Côte d’Ivoire et la France :

Toutes les explications officielles données, soit par la France, soit par l’ONU, justifient l’intervention de la force française Licorne en Côte d’Ivoire, très bien !

            Mais il est évident que cette justification n’a de fondement qu’en raison de la présence de ce contingent militaire à Abidjan !

            Question donc ? Chaque fois qu’une importante « colonie » française d’expatriés est présente dans un pays étranger, la France est-elle disposée à proposer à l’ONU son soutien militaire ?

Il est évident que la position officielle de la France dans ce cas d’espèce souffre d’une certaine dose d’hypocrisie, laquelle, dans le cas présent, est de bonne guerre.

Madagascar, la France, et les déclarations de l’ambassadeur Châtaigner dans Madagascar Tribune.com du 4 avril 2011

            Rien à dire sur le fond des déclarations de l’ambassadeur au sujet de son analyse de la situation politique de la grande île, mais est-ce que ce type d’intervention publique s’inscrit dans une nouvelle politique étrangère de la France qui verrait ses représentants à l’étranger s’exprimer sur la situation intérieure du pays où, précisément, ils représentent notre pays ?

            La réponse est sans doute non ! Verrait-on le même M.Châtaigner, ambassadeur à Rome, ou à Tokyo, s’exprimer de la sorte sur la situation politique de l’Italie ou du Japon ?

Comment ne pas trouver, une fois de plus, que de la sorte, nos ambassadeurs font de l’ingérence, d’autant plus dommageable que les élites de ces pays ont la sensibilité nationale à fleur de peau, compte tenu de notre passé commun ?

2012: la problématique du Parti Socialiste face à l’Europe et au monde

Les « propositions » du Parti Socialiste pour 2012 ?

Un catalogue ? Une stratégie ?

Au crible de la difficile problématique de la gauche face à l’Europe et au monde !

       Outre le fait que les primaires risquent d’affaiblir la gauche avant son combat présidentiel, situation que je qualifierais volontiers de facteur secondaire par rapport aux véritables enjeux de la politique française dans les prochaines années, la gauche est mal armée pour affronter les défis auxquels la France doit faire face, ceux de l’Europe et du monde.

            Et la question de fond qu’il convient de poser est celle de savoir, si dans la configuration actuelle du monde et de l’Europe, la gauche est en mesure de proposer un projet socialiste crédible.

            Première difficulté, celle des pouvoirs réels dont dispose encore un gouvernement français face à l’Union européenne, pour ne pas citer ceux, encore beaucoup plus ignorés, de certaines autres institutions internationales !

Les Français ont en effet le droit et le devoir de connaitre le « qui fait quoi » en Europe par grands secteurs d’intervention politiques, le qui est responsable de quoi ?

 Quelle est véritablement la marge de manœuvre de la France dans l’énergie, l’industrie, l’agriculture, les services, le crédit, la fiscalité, les interventions sociales, ou les impôts… ?

Quelle est la marge de manœuvre de la France pour mener une politique socialiste de répartition des revenus et des richesses dans le réseau enchevêtré des pouvoirs entre l’Union et ses membres ?

Pourquoi ne pas mettre en face de chacune des propositions « dépend de la France uniquement » ou « dépend de la France et de l’Europe » ? Et même éventuellement d’une autre autorité internationale ?

Et pourquoi ne pas mettre aussi, pour chacune d’entre elles, les dates de mise en œuvre des « 30 priorités » ?

            Deuxième difficulté liée à la mondialisation, à la globalisation des échanges et des communications, celle de la nouvelle répartition des richesses dans le monde, au profit aussi, il faut le reconnaître des pays jusque-là défavorisés.

            Comment expliquer qu’on refuse les délocalisations, alors qu’elles réalisent une nouvelle répartition internationale des richesses que la gauche serait bien en peine de réaliser sur le plan national ?

Que peut proposer la gauche, en matière de régulation mondiale, avec des effets rapides, à moyen terme de quatre ou cinq ans,  alors qu’aucune puissance ne dispose aujourd’hui des leviers susceptibles de modifier la donne ? Alors que l’Europe fait encore trop preuve d’enfantillage dans la perception des problèmes et dans la définition des solutions !

Le citoyen européen a l’impression que l’Union européenne, dans son état actuel, est incapable de jouer le rôle qui devrait être le sien dans le débat international, la défense de ses intérêts, la promotion d’une politique.

Dans un tel contexte flou à tous points de vue, la gauche serait en mesure de proposer ses solutions et faire croire aux Français que leur vie va changer avec leur accession au pouvoir ?

Alors il est vrai qu’une partie de la gauche tient un discours humanitaire sur l’immigration, la diversité, ou la culture, mais cette posture revient à botter politiquement en touche, c’est-à-dire à reconnaître qu’il est beaucoup plus facile de positionner son discours sur le culturel que sur l’égalité.

En effet, et comme l’a parfaitement analysé le professeur Walter Benn  Michaëls, en examinant la situation des Etats Unis, dans son petit livre « La diversité contre l’égalité », il était plus facile de promouvoir la « diversité » que l’«égalité » entre riches et pauvres. (voir analyse sur le blog du 16/05/2010)

Il est donc difficile d’être convaincu par ce discours, et la même conclusion pourrait d’ailleurs être proposée pour la droite, et c’est tout le problème!

Marx avait fort bien analysé les contradictions du capitalisme, et il manque sans doute de nos jours, une analyse parallèle des contradictions du socialisme, et tout autant d’un monde nouveau structuré par des forces à la fois mal identifiées et mal régulées.

La France est propulsée dans un monde tel que son modèle politique, économique, et social est obsolète. On continue à croire, ou à faire croire qu’un gouvernement national peut changer la donne internationale, à faire croire aux électeurs que leur vie va changer rapidement, alors que les partis, pour que les choses changent, devraient se positionner sur l’échiquier européen, proposer un projet qui tienne compte des contraintes européennes et mondiales.

Il convient à présent que le Parti Socialiste a publié son programme que les spécialistes disent aux Français si l’épure politique proposée s’inscrit oui ou non, dans la réalité du fonctionnement de l’Europe et du monde.

A première lecture, ces propositions sont muettes sur la stratégie proposée, leur calendrier de réalisation, alors que pour au moins quatre d’entre elles (les 3 (emprunt européen), 6 (droits douanes), 8 (TVA), 9 (achats publics), elles supposent une négociation au niveau européen, donc un accord,  d’autant plus difficile à obtenir qu’elles mettent en avant une dose de protectionnisme, alors que c’est le tout libéral qui commande actuellement en Europe.

 Il y manque enfin, et sans doute en « pole position », une proposition précise destinée à aider les « ghettos » urbains à retrouver les chemins de la République.

Une telle proposition aurait en outre l’immense avantage de consolider l’assise politique des éléphants roses de la Seine Saint Denis, notamment celle de l’imam caché de Sarcelles, grands élus qui n’ont pas encore véritablement démontré leur savoir-faire sur ce point.

Dans l’état actuel de ces propositions, il s’agit donc beaucoup plus d’un catalogue de bonnes intentions que d’un projet à stratégie politique possible de réalisation

Jean Pierre Renaud